Retards, impayés, préjudices d'image commerciale et financière... le coût de l'impayé est un véritable fléau pour l'économie française. Cette réalité, souvent mal appréhendée par les pouvoirs publics, est au cœur des préoccupations et des missions des cabinets de recouvrement de créances, au rôle absolument majeur pour le tissu économique de notre pays.
Chiffres clés
- En 2017, 56 milliards d'euros de créances sont restées impayés, soit environ de 2 % du PIB, passés aux comptes pertes et profits des entreprises françaises ;
- Le respect des délais de paiement permettrait de libérer 12 milliards d'Euros de trésorerie ;
- Sur les 8 milliards de créances confiées chaque année aux professionnels du recouvrement, près de 2 milliards sont récupérés ;
- 90 % des sommes sont recouvrées par voie amiable ;
- Plus d'une procédure collective sur quatre est causée par des problèmes d'impayés et de retards de paiement ;
- Seuls 18 % des particuliers débiteurs sont réellement insolvables ;
- Au final, l'ANCR a évalué le préjudice moyen résultant d'un retard de paiement d'une créance contractée entre professionnels à 600 € et le coût unitaire pour les nombreuses petites créances contractées entre les professionnels et les consommateurs à 30 €.
Délais de paiement : une amélioration constante depuis 15 ans
En 2017, les délais de paiement poursuivent leur mouvement historique de baisse et atteignent leur point le plus bas depuis 15 ans. Cette tendance générale apparaît néanmoins relativement instable et les périodes de rationnement du crédit engendrent des hausses significatives des délais de paiement constatés. Par ailleurs, la baisse tendancielle des délais de paiement ne se traduit pas forcément par un allègement de la charge financière globale liée pesant sur les entreprises.
La moyenne européenne en matière de délais de paiement s'établissait fin 2016 à 12,9 jours. L'Allemagne, avec 6,3 jours de retard en moyenne, fait figure d'élève modèle. En bas du classement, le Portugal accumule 27,5 jours de retard en moyenne. En France, le nombre de jours de retard de paiement est passé de 13,2 à 11,2 jours entre le 3ème trimestre 2015 et le 3ème trimestre 2017. Toutefois au deuxième trimestre 2017, la France présentait une proportion de paiements sans retard de 43,6 %, légèrement inférieure à la moyenne des principaux pays européens, qui s'établissait à 44,4 %, loin de la moyenne allemande qui se situait à 66,4 %.
Les conséquences micro et macroéconomiques
Au niveau microéconomique, les retards de paiement génèrent :
- des surcoûts liés aux coûts directs et indirects de recouvrement et aux coûts de l'éventuel financement alternatif du poste clients à mettre en place ;
- un manque à gagner lié à l'absence de rémunération pour l'entreprise de la trésorerie qui aurait dû être encaissée à échéance de la facture ;
- un risque réel de perte de continuité d'exploitation ;
- un préjudice d'image.
Au niveau macroéconomique, la trésorerie qui serait libérée dans l'hypothèse d'un strict respect de la loi sur les délais de paiement est estimée à 12 milliards d'euros par an, soit environ 0,4 % du PIB ; le transfert serait favorable aux petites et moyennes entreprises pour environ 16 milliards d'euros et aux entreprises de taille intermédiaire pour 4 milliards d'euros ;
Les pistes de l'ANCR pour venir à bout du fléau de l'impayé
Thierry Gingembre, président de l'ANCR, propose quelques pistes d'amélioration afin de lutter efficacement contre ce fléau pour les entreprises françaises. Comme il le précise, "en France, les sociétés de recouvrement de créances et de renseignement commercial pourraient contribuer à une diminution plus large de ces mauvais chiffres si étaient levés les obstacles qui entravent l'exercice de leur mission. Ces obstacles ne sont pas difficiles à lever. Il suffirait pour les éradiquer de modifier très légèrement certains textes déjà existants".
- La "Loi Macron" sur la procédure simplifiée du recouvrement des petites créances est pour l'instant réservée aux seuls huissiers de justice alors que la participation des sociétés de recouvrement amiable de créances en liaison avec les huissiers de justice rendrait l'application de ce texte particulièrement efficace, ce qui n'est pas suffisamment le cas depuis qu'il est entré en vigueur ;
- La tarification des mandataires judiciaires sur le recouvrement des impayés les décourage de faire appel à des tiers pour le recouvrement des créances impayées du failli et fait que ce problème pour le moins essentiel est à peine traité par les études ;
- La loi du 30/12/2004 réserve aux seuls huissiers de justice le recouvrement amiable des créances publiques, alors même qu'ils ne bénéficient d'aucun monopole en matière de recouvrement amiable et que leur cœur de métier n'est pas le recouvrement forcé ;
- L'article 853 du CPC permet à quiconque et notamment aux sociétés de recouvrement de créances de représenter les créanciers à moindre frais devant les tribunaux de commerce mais sa mise en application a été rendue inefficace par une jurisprudence récente ne réservant cette possibilité qu'aux seuls avocats ;
- Les textes exonèrent directement ou indirectement les débiteurs particuliers de toute responsabilité au titre des impayés dont ils sont à l'origine. Cette absence de responsabilisation s'est vue confortée par des textes récents ("Loi Hamon") et des prises de position contestables de certaines administrations telle la DGCCRF.
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