C'est dire si le sujet est mobilisateur et attire tous les regards dans le monde de l'IT. L'Eyjafjöll et son nuage de cendres avaient empêché beaucoup de monde et de choses de tourner rond, en ce mois d'avril et les états généraux d'EuroCloud ont été concernés : c'est ainsi que Bill McNee, fondateur et CEO de Saugatuck Technology, qui devait intervenir à cette occasion, a dû rester chez lui aux États-Unis pour cause de fermeture des aéroports européens. Fort opportunément, Louis Naugès, de Revevol, qui devait intervenir au même moment aux États-Unis, est également resté cloué au sol. Il a ainsi pu remplacer au pied levé Bill McNee.
Manifestation dédiée aux professionnels du secteur du cloud computing et de SaaS (à l'inverse de Data Center & Cloud Computing, dédiée aux utilisateurs), les états généraux d'EuroCloud proposaient des parcours thématiques sur les canaux de distribution, les stratégies d'acteurs du cloud computing et des ateliers pratiques (sur les techniques d'hébergement, etc.). Ils ont aussi été l'occasion de faire un point annuel sur ce marché, avec deux temps forts : la vision mondiale de Saugatuck, et le baromètre des prestataires français du cloud computing et du SaaS réalisé par le cabinet Markess International.
Au niveau mondial
Selon Bill McNee, s'exprimant donc par la voix de Louis Naugès, le cloud computing serait la tendance dominante de l'informatique aujourd'hui. Il estime que 40% des nouvelles applications de gestion seront dans le cloud en 2014 (contre 15 à 20% en 2009) et que 25% au moins des charges totales des entreprises seront sur le cloud à cet horizon. Les organisations ne vont cependant pas abandonner leurs installations existantes et les charges seront réparties entre "on-premise" et cloud (ou hybrides ? cf. schéma 1), avec une part toujours croissante pour le cloud.
Si tous les fournisseurs ont été touchés par la récente crise économique, les entreprises du secteur du cloud se sont bien mieux comportées que celles proposant des solutions "on-premise" et sortent de la crise sur une pente ascendante. "La croissance est dans le monde du cloud", commente Louis Naugès.
Par ailleurs, on observe un mouvement rapide des grands acteurs vers le cloud : IBM, Microsoft, Oracle, HP et SAP ont d'ores et déjà réalisé des investissements importants dans le cloud, qui devraient porter leurs premiers fruits d'ici à 2012 au plus tard. Ajoutons à ceci les "stars" du cloud que sont les Google, Salesforce et autres Amazon et les 40 à 45% d'éditeurs indépendants qui ont d'ores et déjà amorcé le virage du cloud, et le tableau sera complet.
À noter que le modèle classique de l'écosystème cloud décrit par Saugatuck passe de 4 à 5 niveaux (numérotés de 0 à 4) : le niveau "Business Process Outsourcing, managed services, business & information services" vient désormais se rajouter au niveau "SaaS et services associés".
Un mot des applications cloud, qui selon Saugatuck se diversifient avec la BI, qui rejoint le CRM et le collaboratif en tête de liste des applications SaaS les plus utilisées (étude réalisée auprès d'entreprises de 3 continents : États-Unis, Europe et Asie). L'ERP, quant à lui, reste à la dernière place de cette liste de 23 applications, ce qui n'a rien de surprenant.
En France
Sylvie Chauvin, de Markess International, est venue commenter la quatrième édition de son baromètre des prestataires du cloud computing et du SaaS, qui complète utilement la vision mondiale livrée par Saugatuck et englobe désormais les aspects infrastructure (IaaS) et environnements de développement (PaaS).
Le marché français devrait passer de 1500 M€ (dont 90% pour le SaaS) à 2290 M€ en 2011, soit une croissance de 23,6% par an. Pour mémoire, selon Syntec, le marché du logiciel en France représente 12 milliards d'euros.
Markess a interrogé récemment les offreurs et défini 5 critères : la perception de la demande des clients, le modèle économique des éditeurs de logiciels, les conditions du marché à court terme, la durée moyenne des contrats et les profils dominants des prestataires.
La progression de la demande des entreprises vis-à-vis du cloud computing se confirme : les prestataires sont dans l'ensemble confiants vis-à-vis de la demande des entreprises, qu'il s'agisse d'IaaS, de PaaS ou de SaaS, notamment en ce qui concerne celle des grandes entreprises et des PME. Les offres se sont structurées, clarifiées et ont gagné en maturité, permettant une meilleure compréhension des modèles.
En ce qui concerne le modèle économique des éditeurs, le consensus se fait autour de la nécessité d'évoluer. 88% des 120 prestataires interrogés s'accordent pour avancer que le modèle traditionnel de vente de licences logicielles devrait progressivement basculer en France vers le modèle SaaS. La tendance observée lors des deux précédentes éditions du baromètre Markess se confirme donc puisqu'ils étaient 62% à mentionner cette évolution en 2008 et 86% en 2009.
Pour le panel des prestataires interrogés, les conditions de marché s'améliorent par rapport à 2009 et les perspectives pour les six mois à venir leur semblent plus favorables. Alors que 95% des prestataires interrogés en 2010 espèrent une hausse du nombre de leurs clients, ils n'étaient que 86% en 2009. 89% espèrent un gonflement de leur carnet de commande global, contre 81% en 2009.
La durée des engagements contractuels diffère en fonction du domaine du cloud computing concerné : les prestataires proposant des offres de type IaaS/PaaS indiquent dans l'ensemble des durées légèrement plus longues que ceux positionnés sur le SaaS. La durée moyenne d'engagement contractuel en SaaS diminue sensiblement : le nombre de prestataires affichant une durée moyenne d'engagement de 2 ou 3 ans diminue, alors que dans le même temps le nombre de prestataires affichant des durées moyennes d'engagement de moins d'un an à un an progresse de plusieurs points par rapport à 2009. Les contrats s'assouplissent donc, pour répondre aux demandes des clients, mais aussi à la concurrence, toujours plus vive.
Enfin, "les pure players" et les éditeurs confirment leur avance en termes de légitimité et de reconnaissance sur le marché par les offreurs, mais voient les hébergeurs les rejoindre rapidement, avec la montée en puissance de la demande en services d'infrastructures (IaaS). La position dominante des pure players sur les éditeurs, déjà identifié dans le baromètre 2009, se confirme encore en 2010, avec un écart qui tend à se creuser légèrement selon les offreurs interrogés.
La lame de fond du cloud se poursuit donc sur sa lancée, aussi bien en France que dans le monde.
Benoît Herr
État d'avancement d'EuroCloud
"L'association EuroCloud est aujourd'hui présente dans 19 pays européens, avec un objectif à 25 pays à la fin de l'année", explique Pierre-José Billotte, son président. "Les prochains pays à intégrer l'organisation devraient être la Suisse et la Russie."
L'actualité du semestre, outre les états généraux d'Eurocloud France, se joue à Luxembourg le 21 juin, où ?se tiendra le premier board européen de l'association, avec 2 axes : le réseautage et un livre blanc destiné à être remis au représentant de la commission européenne chargé du numérique.