La Monnaie de Paris a deux activités principales : d'une part la fabrication des pièces en euros pour l'État Français ainsi que celle de monnaies courantes étrangères dans le cadre d'appels d'offre, d'autre part la création de bijoux, médailles et pièces en petites séries pour ses clients. Le siège et la production des petites séries sont localisés quai Conti à Paris, la production des grandes séries à Pessac, près de Bordeaux.
Gros changements
Jusqu'en 2006, la Monnaie de Paris était la direction des monnaies et médailles, rattachée à la direction du ministère de l'économie et des finances. Mais, le 21 décembre 2006, elle est devenue un EPIC (Établissement Public à caractère Industriel et Commercial). Ce changement de statut a notamment engendré un passage d'une comptabilité publique à une comptabilité privée.
Or, les logiciels constitutifs du système d'information utilisé à l'époque ne communiquaient pas entre eux. De plus, il existait de nombreux spécifiques qui n'évoluaient que très laborieusement. Enfin et surtout, le système en place ne gérait pas de comptabilité privée.
Cette situation a mené à une refonte complète du système d'information de l'entreprise. "Le changement de statut de la Monnaie de Paris était devenu une nécessité", explique Gilles de Gouyon, directeur général adjoint, directeur des finances et de la performance. "Nous étions alors la seule usine du ministère, avec des problématiques industrielles et opérationnelles très spécifiques. En outre, nous étions minuscules comparativement aux géants que sont les autres entités dépendant du ministère. Enfin, nous avons des contraintes commerciales difficilement compatibles avec un mode de gestion de type 'administration'. Notre budget était voté chaque année sans possibilité d'ajustement en cours d'exercice. Or, une commande arrivée en cours d'année génère certes du chiffre d'affaire, ce qui n'ennuie pas le ministère, mais aussi des dépenses, comme l'achat des métaux nécessaires pour honorer cette commande. Il était impossible de réévaluer le budget des dépenses, d'où des situations difficiles à gérer. En tant qu'EPIC, nous sommes plus autonomes."
Les objectifs de cette refonte, menée avec le soutien de la direction générale, étaient de passer d'une gestion par le chiffre d'affaires à une gestion par la marge, de disposer d'une CAI (Comptabilité Analytique Industrielle) permettant d'avoir une vision plus fine de l'activité et d'homogénéiser les processus entre les 2 sites. Pour cela, il a été décidé de faire évoluer l'ensemble du SI, depuis la gestion comptable et financière jusqu'à la gestion de la production en passant par la gestion commerciale. Seuls la paie et la boutique Web en étaient exclus.
La phase de choix
Pour ce faire, la Monnaie de Paris a lancé un premier appel d'offre, portant sur l'accompagnement à la maîtrise d'ouvrage. C'est le cabinet lyonnais Ineum qui est retenu pour l'AMOA (Assistance à Maîtrise d'Ouvrage). Celui-ci élabore alors un cahier des charges sous le contrôle de la Monnaie de Paris, qui aboutit à un second appel d'offre. S'ensuit un processus de choix "en entonnoir" : après un premier tri, purement administratif, des dossiers, une visualisation de maquettes et des démonstrations ont été demandées. Puis, une short-list de 4 produits a été dressée : Microsoft, SAP, Lawson et Sage. C'est ce dernier qui, après la dernière phase de l'entonnoir ? l'analyse de jeux d'essais ? a été retenu.
"Sage ERP X3 possède une couverture fonctionnelle standard riche, qui couvre la quasi-totalité de nos besoins", commente Gilles de Gouyon. "Il présente aussi une grande facilité d'appropriation par les utilisateurs et nous a permis de réaliser nos rares développements spécifiques : le double suivi des mouvements de stocks de métaux (poids standard et poids réel) et la gestion et le suivi à l'unité les tirages limités pour les produits de collection. Mais c'est sans aucun doute le facteur humain qui a fait la différence".
Le Big Bang
Le contrat a été signé début 2008 et la Monnaie de Paris disposait alors de 11 mois pour basculer tout son SI. Il était en effet impossible d'envisager un basculement à un autre moment que la clôture de l'exercice comptable. "Les délais étaient donc assez serrés", constate Daniel Uzan, directeur informatique. "Les consultants de Sage se sont toutefois fermement engagés à les tenir". Un groupe de projet a alors été constitué. Celui-ci comptait 15 personnes, dont Daniel Uzan, un responsable de chaque grand service fonctionnel et les représentants de la société Ineum. "Ce groupe a été un facteur de succès important du projet", commente Gilles de Gouyon. "C'est d'autant plus vrai qu'en dehors de l'informatique, personne n'y était dédié et qu'il a fallu à chacun dégager le temps nécessaire au projet". Le même groupe a, en fin d'année, formé les "key users" à l'utilisation de X3. Puis, des sessions de formation par fonction ont été étalées sur 3 mois, avant la bascule de type "Big Bang", fin décembre 2008. Dès le 5 janvier 2009, les premières factures produites par Sage ERP X3 ont été éditées.
Bilan
"Au bilan, les délais ont été respectés et nous avons démarré sans perte de jour de production ou de facturation", se félicite Gilles de Gouyon. "La solution est moderne (workflows, requêteur graphique, traçabilité...) et la comptabilité analytique puissante. Elle permet d'analyser finement l'activité, d'imputer les dépenses par centre de coût et prend en charge les contraintes juridico-comptables liées à notre changement de statut". Sur la première année d'utilisation, les 250 utilisateurs au quotidien ont produit 100 000 factures clients ou bons de livraisons, plus de 15 000 ordres de fabrication et plus de 4 000 commandes d'achats.
La Monnaie de Paris enregistre aussi un meilleur pilotage de la performance, grâce à une information plus complète et plus pertinente en temps réel. "L'information est produite plus fréquemment : auparavant, nous avions un OF par an pour Pessac, aujourd'hui, nous avons un OF par mois. Avant, nous faisions des clôtures trimestrielles, aujourd'hui elles sont devenues mensuelles. L'information est aussi de meilleure qualité : les flux des factures sont centralisés. Enfin, nous sommes passés d'une structure hiérarchique verticale à une structure transversale, organisée en mode projet. Nous avons des procédures harmonisées (au nombre de 195 pour l'instant, disponibles sur un intranet) sur les deux sites et les services sont décloisonnés", poursuit Gilles de Gouyon.
Facteurs clés de réussite
"La dimension humaine a joué un rôle prépondérant et les changements organisationnels ont laissé beaucoup de traces", constate Gilles de Gouyon. "Mais ce n'est pas tout. La conduite du changement a également joué un rôle majeur. Le projet était porté par une direction impliquée et le travail du groupe projet a été remarquable : ils ont totalisé 1 an et demi de préparation en plus de leur charge de travail habituelle. Soulignons aussi que le plan de formation des utilisateurs a joué un rôle important", constate-t-il. À cela il faut ajouter un plan de bascule détaillé par service et la motivation qu'a représenté pour les équipes l'échéance imposée.
Gilles de Gouyon fait toutefois son autocritique et estime que, pour éviter un télescopage en fin d'année, ils auraient pu nettoyer bien plus tôt les données à reprendre, indépendamment du projet. "Nous aurions dû aussi recruter plus tôt les pilotes de la comptabilité analytique", ajoute-t-il.
Mais la Monnaie de Paris tire globalement un bilan très positif de son expérience ERP et envisage déjà de migrer sa solution de gestion des immobilisations actuelle vers Sage FRP Fixed Assets. À l'heure où vous lirez ces lignes, elle sera sans doute en cours de bascule. Et plus tard, en 2011, ce sera le tour du passage à la V6 de X3.
Benoît Herr
La projet de la Monnaie de Paris en bref
CA 2009 : 126 M€ (+20% en 2 ans)
Résultat net 2009 : 16 M€
500 collaborateurs, répartis sur 2 sites :
Paris pour l'industrie artisanale (fontes à l'unité, médailles, décorations, monnaies de collection) représentant 40% du CA
Pessac pour la grosse industrie (monnaies courantes (1,14 milliard d'unités en 2009) et monnaies de collection en argent
X3 en 2009 :
250 utilisateurs au quotidien
100 000 factures clients ou bons de livraisons traités
+ de 15 000 ordres de fabrication (OF) créés
+ de 4 000 commandes d'achats intégrées