Lors du Forum Decideo le 8 décembre 2010, François Nguyen, directeur du SI interne de SFR, a présenté la solution qu'il a mise en place pour diagnostiquer et remédier à des soucis rencontrés dans la comptabilité fournisseurs, intégrée dans la chaîne SAP. Le SI interne s'est attaché à comprendre les causes de retards de paiement signalés par certains fournisseurs et à modifier les processus en conséquence.
L'analyse de processus, une tâche complexe
Les premières tentatives pour analyser le problème et apporter des solutions ont consisté à lancer un audit, faire des interviews, établir des diagrammes du processus. Elles ont abouti à des recommandations sous forme de conseils d'ordre général, voire d'idée reçues, comme ne pas accepter les factures sans commande, ou scanner toutes les factures. Mais au bout de plusieurs mois, aucune amélioration substantielle du processus n'a été constatée. En réalité, ces méthodes s'appuient sur des moyennes, alors que les événements significatifs, qui posent problème, sont des événements extrêmes, pour lesquels aucun indicateur chiffré n'était disponible.
Analyser les processus est une tâche complexe car elle ne peut se contenter de généralités. Obtenir une moyenne de fonctionnement ne donne aucune piste d'explication. En effet, les processus comportent des variantes. Toutes les étapes sont liées et la découverte d'un problème à l'étape 4 peut découler d'un problème survenu à l'étape 1. Mais surtout, chaque occurrence du processus est unique et importante dans l'analyse globale. Si une opération s'est déroulée parfaitement 99 fois mais que la dernière fois, le client a été livré 2 mois en retard, il faut identifier cette dernière occurrence pour analyser les causes du dysfonctionnement.
Des solutions décisionnelles traditionnelles aux solutions innovantes
Il fallait donc disposer d'un outil capable de donner une vision précise des étapes du processus. Suite aux divers rachats de sociétés par SFR, l'informatique interne dispose de nombreuses solutions décisionnelles, qui répondent chacune à des besoins spécifiques. Mais aucune d'entre elles ne répondait au besoin ni à l'urgence exprimés. "Je ne crois pas à la plate-forme unique de BI", explique François Nguyen. "Les solutions traditionnelles sont complexes : elles nécessitent de la formation, de l'accompagnement au changement. L'innovation apporte de nouvelles solutions, de nouvelles possibilités.".
Dans un ERP classique, il est difficile de regrouper des événements disjoints pour les associer dans une occurrence qui représente le processus. La visibilité des processus et leur pilotage ne sont pas intégrés dans l'ERP. Un outil décisionnel "in memory" associatif répond à ce besoin. Le choix s'est porté sur Qlikview, capable de s'interfacer facilement avec SAP, d'en récupérer les tables et d'effectuer des analyses très rapides de données grâce à une technologie de tables en mémoire. Il permet de faire du calcul à la volée avec la base de données en mémoire. Avec Qlikview, François Nguyen a repris les factures, les paiements, toutes les dates du processus, puis il a cherché à analyser ce qui se passait dans ce processus et les raisons des retards et blocages.
En effet, l'outil conserve en mémoire l'ensemble des données, c'est-à-dire toutes les occurrences du processus, ce qui n'est pas le cas des solutions décisionnelles classiques, qui travaillent sur un jeu de données présélectionnées. La très forte interactivité de ce genre d'outil permet d'explorer tous les attributs, toutes les caractéristiques des processus. Son aspect associatif permet de relier toutes les étapes d'un processus, de regrouper les événements pertinents au sein d'une occurrence unique qui représente le processus. Le paiement final est associé à une facture, une réception, une commande précises. Il est donc possible d'en tirer des informations concrètes.
Mise en évidence de la dispersion des délais de traitement
Ecran de visualisation du processus
Avec Qlikview, François Nguyen a obtenu deux représentations. La première affiche les données et les critères du processus. Une image de fond représente l'ensemble des étapes du processus. Les indicateurs calculés à la volée s'affichent par-dessus. Un menu propose une sélection des critères qui influencent le processus. En cliquant sur l'un d'entre eux, on peut voir immédiatement l'effet d'un facteur sur la qualité d'un processus : par exemple, comment sont traitées les factures d'un fournisseur précis, ou l'impact de la présence d'une commande sur le délai de traitement du processus. Le bouton "Recherche" permet de saisir des plages de valeurs pour chercher par exemple tous les délais de paiement compris entre 30 et 60 jours.
Une première vision globale a montré qu'il y avait peu de différence de délais de traitement entre les factures scannées et les factures traitées directement. Dans les deux cas, le délai de prise en compte des factures était très élevé. Si bien que le temps restant pour les payer dans les délais contractuels était très faible : 13 jours en moyenne.
En explorant les 450 000 factures concernées de manière plus ciblée, un premier résultat important est apparu : 400 000 factures étaient payées en moins de 60 jours et 50 000 l'étaient très en retard. La majorité des factures étaient donc traitées et payées tout à fait correctement. Le chiffre moyen de 81 jours du délai de paiement masquait en fait une réalité plus complexe. Il fallait donc se concentrer sur les factures problématiques. L'outil Qlikview a permis de sélectionner de nombreux critères pour examiner leur effet sur le processus.
La représentation calendaire apporte des informations précieuses
Calendrier associé des événements
Une deuxième représentation, que François Nguyen appelle "calendrier associé des événements", affiche pour chaque jour chacune des 4 grandes étapes du processus. Ce qui permet d'obtenir une visualisation quotidienne du nombre de factures émises par les fournisseurs, du nombre de factures saisies par la comptabilité fournisseurs, du nombre de factures restant à payer et du nombre de facture payées ce jour. Le tableau met bien en évidence les différences de rythme entre l'arrivée des factures et leur traitement. Par exemple, on constate un pic d'arrivée de factures en fin de mois, mais un manque d'adaptation du côté de la comptabilité, entraînant une saisie très tardive de certaines factures au bout de plusieurs semaines. Ce problème a été discuté avec le service comptabilité et il a été décidé de fixer un nombre minimal de saisies de facture par jour : en effet, la représentation calendaire a montré qu'en dessous de 1 000 factures saisies par jour, un retard considérable s'accumulait. Une alerte a donc été mise en place : elle se déclenche dès que le nombre de factures saisies par jour se maintient plusieurs jours de suite en-dessous de mille.
D'autres constatations ont été faites, comme le traitement systématiquement tardif des factures de certains fournisseurs, à cause d'un problème de conformité. L'analyse a permis d'en déterminer la cause et d'améliorer la situation. Un autre facteur aggravant des retards était le paiement des factures par décade : cette méthode a également été remise en cause. Autre événement mis en évidence, une baisse significative du nombre de traitements effectués pendant une période s'est avérée correspondre à l'absence d'un collaborateur particulier du service comptabilité.
Entre 2009, année où l'analyse a été faite, et 2010, le délai de paiement des factures s'est amélioré de 9 jours. Au-delà de ce gain chiffré, la qualité du traitement des factures s'est beaucoup améliorée.
Un outil convivial et pratique
"La prise en main de Qlikview a été très simple", résume François Nguyen. "C'est un outil qui peut être maîtrisé par tout le monde. Il contient un connecteur avec SAP. Dans notre cas, très peu de tables ont été concernées par ce projet.". Inévitablement, on ne peut s'empêcher de rapprocher cet outil avec la nouvelle offre HANA de SAP (voir HANA devient réalité ). "C'est exactement le genre d'outil qu'il nous faut pour effectuer le pilotage dans l'ERP", confirme François Nguyen. "Par exemple, pour identifier les factures à traiter en priorité dans un cycle de paiement, il faut absolument que les données soient en mémoire.".
René Beretz