Le paysage : quatre catégories, quatre cibles

Pour Amor Bekrar, les éditeurs d'ERP entrent aujourd'hui dans quatre grandes catégories :

- Les éditeurs qui se livrent à une bataille technologique, au rang desquels il compte SAP, Oracle et Microsoft. "Leur source de revenus principale est la technologie", explique-t-il. "Y compris chez SAP, surtout depuis le rachat de BO et avec des outils comme NetViewer, même si c'est encore un peu en devenir".

- Les "conglomérats". Ces éditeurs se sont créés par des fusions et acquisitions successives : c'est le cas d'Infor, mais aussi de Sage "qui possède aussi toute une série de lignes de produits dans son portefeuille".

- Les "pure players" : ces éditeurs ne font que de l'ERP, à l'exclusion de toute autre chose. On y trouve notamment IFS ainsi que pléthore d'acteurs français.

- Les éditeurs locaux : ils s'adressent à des niches particulières et vivent souvent très bien sur leur marché, car ils répondent bien à une demande. Pour Amor Bekrar, Cegid, par exemple, est un "gros" éditeur local. On y trouvera aussi Generix, Divalto, Sylob et autres.

Les cibles des différentes catégories d'éditeurs se répartissent aussi en quatre catégories :

- Les grands comptes, qui sont, selon les classements, des entreprises de plus de 5000 personnes ou de plus de 1000 personnes. De très grosses sociétés, dans tous les cas.

- À l'autre extrémité, les TPE, qui comptent moins de 20 personnes.

- Les PME/PMI, qui vont de 250 à 500 personnes.

- Les Entreprises de Taille Intermédiaire (ETI), qui comptent plus de 500 personnes mais qui ne sont pas des grands comptes.

À ces quatre cibles correspondent des éditeurs qui se positionnent de manière plus ou moins significative selon les marchés. Et chacune de ces cibles se répartit en secteurs d'activités. "Quand on observe le marché de l'édition, on constate que tous les acteurs précédemment évoqués ne se retrouvent pas forcément dans les cibles", constate Amor Bekrar. "C'est pour cela que de nombreux éditeurs locaux restent présents : ils répondent à des demandes soit en terme de taille d'entreprises, soit à des usages ou des pratiques qu'on ne retrouve pas forcément à l'international (comme les fournisseurs de la grande distribution, par exemple)".

Les attentes des entreprises

On note avant tout un volet contextuel : la crise financière a démarré en 2008 et n'a pas terminé d'avoir des répercussions. Mais cette crise date maintenant de 3 ans. "Au début, on était dans un schéma d'attentisme, mais les entreprises ne peuvent pas se permettre de rester dans l'attentisme pendant 2, 3 voire 4 ans. Aujourd'hui, les entreprises et notamment les PME/PMI et les entreprises de taille intermédiaire, se remettent à investir parce que, de toutes façons, personne n'a une vision claire du timing de la sortie de crise réelle", constate Amor Bekrar. "Autre élément contextuel : de nombreuses entreprises avaient investi lors du passage à l'an 2000, c'est-à-dire il y a plus de 10 ans maintenant, ce qui correspond au cycle de vie d'un ERP. Nombreuses sont donc celles qui ne se retrouvent plus dans leur outil en place, que ce soit fonctionnellement ou en termes de technologie, et envisagent un renouvellement. Qui plus est, un grand nombre d'informaticiens qui développaient des solutions "maison" prennent maintenant leur retraite, ce qui créée un contexte de fragilisation de l'entreprise et l'amène à mettre en place des outils standards".

Enfin, Amor Bekrar estime qu'on ne peut aujourd'hui échapper à l'entreprise 2.0. L'entrée de l'entreprise dans l'ère du Web 2.0 entraîne forcément des transformations. "On assiste par exemple à une explosion du nombre de smartphones mis en circulation, qui devraient passer de 300 à 650 millions entre 2010 et 2013, selon une enquête de Morgan Stanley Research. De la même façon, les tablettes devraient passer de 20 à 80 millions sur la même période, d'après la même enquête. On assiste donc à une consumérisation de l'informatique. Par ailleurs, plus de 80 % des DSI déclarent héberger énormément d'applications qui ne sont jamais utilisées. Il y a donc des données inutilisées, ce qui génère des coûts".

De fait, on assiste à l'émergence de nouveaux profils d'utilisateurs, notamment de la génération Y, qui ont des habitudes de travail différentes, issues de l'usage privé qu'ils font de l'informatique. "Ils veulent retrouver ces usages dans leur environnement professionnel, tout simplement pour gagner en productivité. Il faudra bien que dans l'environnement de l'ERP on retrouve ces usages (réseaux sociaux, messagerie instantanée, traitements collaboratifs, échanges de documents) de manière naturelle".

"Il y a deux manières de procéder", explique notre interlocuteur. "Soit on interface les outils existants avec l'ERP, ce qui entraîne des gros problèmes de sécurité et d'intégration dans le SI, soit on les intègre dans un environnement sécurisé au sein même de l'ERP. De cette manière, l'utilisateur ne quitte pas son application pour accéder à ces outils : il continue à travailler au sein même de l'ERP.

On trouve ensuite un volet fonctionnel répondant aux attentes des entreprises. Actuellement, les PME/PMI doivent aller à la conquête de nouveaux marchés, soit en régions, soit à l'international. Elles deviennent donc multi-sites, multi-langues et multi-modes de gestion (à la commande, à la livraison...). Une modification des processus de l'entreprise est nécessaire pour s'adapter à ces besoins.

De nombreuses entreprises ont également à gérer les risques environnementaux : il existe une pression réglementaire, mais aussi du marché, dans ce sens. "Et demain il va falloir fournir des éléments chiffrés dans ce domaine, un rôle dévolu à l'ERP", estime Amor Bekrar.

Sur la mobilité, au-delà des utilisateurs nomades, il existe aussi de nouveaux besoins, liés à la conquête de nouveaux marchés. "Prenons l'exemple d'une PME industrielle fabriquant des machines-outils. Jusqu'ici, elle fabriquait, livrait et se contentait d'assurer le SAV. De plus en plus, une telle entreprise sera amenée à chercher de nouvelles sources de revenus en fournissant des services : non seulement elle met la machine à disposition, mais s'engage aussi à ce que sa machine reste en production opérationnelle. Cela implique de la maintenance préventive, des visites régulières ou encore du rééquipement de cette machine si nécessaire, etc. L'entreprise industrielle doit donc introduire un nouveau processus, lié au service, et le gérer. Nous rencontrons de plus en plus de demandes de ce type".

Amor Bekrar constate aussi un nombre croissant de ce qu'il appelle les "applications composites" : malgré la présence de l'ERP, on trouve toujours une application Excel qui remplit tel ou tel rôle quelque part, ce qui crée un élément de rupture, car il y a des données de chaque côté, qu'il faut faire communiquer. "IFS, plutôt que de se battre contre ce type d'usages, les accompagne désormais. Cela donne lieu à des applications composites. Nous encourageons l'utilisateur à continuer à travailler comme il le souhaite, mais au sein d'un ensemble applicatif composite, qui rend le travail sous Excel transparent, via l'ERP et inversement". La même démarche s'applique aussi dans d'autres domaines, comme la géolocalisation par exemple.

L'ERP et les données collectées : "nous avons dans IFS un module appelé Dynamic Scheduling, qui permet à un technicien dans son camion, par exemple, de choisir son itinéraire, mais aussi de réorganiser sa tournée en temps réel, en cas d'événement intercurrent. Un ERP de bonne facture ne peut plus actuellement ne pas être ouvert à ce type d'applications", explique Amor Bekrar. "Mais le temps réel physique, comme la température d'un four, par exemple, n'a pas un intérêt immédiat d'être connecté à l'ERP. Il demeure beaucoup plus efficace de passer par un dispositif d'alerte intermédiaire, qui informera l'ERP dans un second temps. L'ERP reste tout de même dans un horizon temporel de gestion. IFS fournit des composants permettant de collecter des informations émanant de machines de ce type. Mais ce type de besoin est rarement l'élément déclencheur d'un projet ERP. C'est un 'plus' s'il sait le faire".

Et de conclure : "les besoins des projets se répartissent en général en trois grandes catégories dans les cahiers des charges : les besoins actuels et immédiats, les souhaits d'évolution et les autres offres de l'éditeur, qui répondent potentiellement à des besoins dont on n'a même pas conscience aujourd'hui. Les critères de choix des entreprises se font sur ces trois volets".

Benoît Herr

Le positionnement d'IFS

IFS entre dans la catégorie des "pure players". Il propose une seule ligne de produits et un seul code source pour toutes les implantations dans le monde.

Depuis le milieu des années 90, la solution de l'éditeur se base sur des composants. Il y a aujourd'hui quelque 6000 composants, qui répondent tous à une demande. Ces composants ne dépendent d'aucune technologie figée : si le client l'exige, n'importe quelle technologie en place peut être remise en cause à tout moment. Autre particularité de cet éditeur : il est aussi intégrateur (non-exclusif), ce qui est assez rare pour un éditeur international.

En termes de cible, IFS s'adresse à des entreprises de plus de 20 M€ de chiffre d'affaires, dans quatre secteurs : industrie, service, distribution et commerce.

Ses concurrents les plus directs sur le marché français se nomment SAP All-In-One, Sage ERP X3 ou Microsoft Dynamics AX. IFS compte aussi un certain nombre de concurrents locaux, comme Generix ou Sylob, par exemple.

BH