Cabinet de consulting américain spécialisé dans le choix et la mise en place d'ERP, le Panorama Consulting Group (PCG) est un observateur objectif et perspicace du monde des ERP. Il mène depuis de nombreuses années une large enquête annuelle et collecte des données issues d'entreprises du monde entier. L'édition 2012 a porté sur 250 projets ERP qui se sont terminés en 2011 et ont été menés par des entreprises de toutes tailles, de tous secteurs d'activité et utilisant des solutions logicielles très diverses.
Pourquoi les entreprises adoptent-elles un ERP ?
Cette question est une nouveauté de l'étude 2012 et les réponses apportées sont intéressantes. Avec la recherche permanente de gains de productivité et de réduction des coûts qui prévalent aujourd'hui, l'ERP est le plus souvent envisagé comme un outil d'intégration de l'information disséminée à l'intérieur et à l'extérieur de l'entreprise. Il permet de simplifier et d'accélérer les flux d'information transitant tous azimuts au sein de l'organisation. L'étude du PCG montre que 63,8 % des entreprises adoptent un ERP pour améliorer leur performance. Les autres raisons citées sont l'amélioration de l'intégration de systèmes géographiquement disséminés et la standardisation des tâches opérationnelles. "Bien que la finalité de toute installation d'ERP soit la réduction des coûts et celle du temps passé à la gestion des diverses tâches métier, les projets ERP sont longs par nature et nécessitent un soin tout particulier dans la définition des besoins et la gestion des changements organisationnels", commente le Panorama Consulting Group.
Bon taux de satisfaction
Figure 1 (cliquez sur l'image pour l'agrandir)
81 % des répondants se disent globalement satisfaits de leur choix d'ERP. Mais les vrais problèmes commencent après cette phase de choix : ce bon chiffre est tempéré lorsqu'on passe les différents domaines en revue. Bon nombre d'entreprises s'estiment insatisfaites de la souplesse du processus de changement de logiciel et se plaignent aussi du processus de création de rapports et de la documentation fournie par l'éditeur (cf. figure 1). 29 % des répondants font état de défis à relever lors de la mise en place de l'ERP du fait de définitions de besoins inappropriées.
Globalement, 94 % des répondants déclarent avoir enregistré des bénéfices grâce à l'installation du logiciel. 50 % estiment avoir récolté plus de la moitié des bénéfices qu'ils attendaient de leur ERP. Ce chiffre est en hausse de 8 % par rapport à celui de l'étude de 2011. Les bénéfices à attendre d'un ERP sont nombreux et très divers. Parmi ceux-ci, on peut citer la disponibilité de l'information, citée par 75 % des répondants, une meilleure interactivité (60 %) et l'amélioration de la réactivité (38 %). Les répondants citent également l'amélioration des interactions avec les clients et fournisseurs, la réduction des coûts de main-d’œuvre et le raccourcissement des délais de livraison.
Des projets toujours trop chers
L'étude du PCG montre que 56 % des projets ERP sont encore en dépassement de budget (cf. figure 2). Ce chiffre est meilleur que celui du rapport de 2011, dans lequel 74 % des projets étaient déclarés en dépassement de budget. "En général, les projets dépassent le budget de quelque 2 millions de dollars, la moyenne des budgets alloués en 2011 par les répondants à l'enquête s'établissant autour de 10,5 millions de dollars", précise l'étude. Les raisons le plus souvent citées de ces dépassements sont l'élargissement du périmètre initial du projet et des problèmes techniques ou de gestion du changement qui n'avaient pas été anticipés. En moyenne, les écarts entre budget et coûts réels sont de 25 %, ce qui est un décalage important entre estimations et réalité.
Figure 2 (cliquez sur l'image pour l'agrandir)
En ce qui concerne le retour sur investissement, 29 % des entreprises interrogées estiment qu'elles n'ont jamais atteint ce stade (cf figure 3). Mais ces déclarations sont à mettre en rapport avec la difficulté à apprécier le ROI, surtout si les indicateurs ne sont pas mis en place dès le départ. Certaines entreprises attendent aussi des retours irréalistes de leur ERP, comparativement aux investissements réalisés et au planning. 71 % d'entre elles enregistrent cependant un ROI, en moyenne un à deux ans après le passage en production. Pour 19 % des entreprises, 3 ans sont nécessaires pour y arriver. "Ces chiffres sont raisonnables et en accord avec ce qu'on peut attendre d'un gros projet ERP. Il importe de définir ses attentes en accord avec la direction générale et l'équipe du projet, pour éviter déceptions et frustrations", commente le Panorama Consulting Group.
Figure 3 (cliquez sur l'image pour l'agrandir)
Des délais toujours importants, mais qui raccourcissent
En moyenne, une mise en place d'ERP dure 16 mois. De nombreux facteurs sont de nature à impacter le planning dont notamment une modification de périmètre du projet, des soucis de gestion du changement, de formation ou de ressources.
L'étude montre que 38 % des projets restent dans le planning (cf. figure 4). 54 % des projets sont en dépassement de délais, dont 23 % de plus de 25 %. Ces chiffres sont meilleurs que ceux de la précédente étude, qui faisait état de 61 % des projets hors délais. "Les entreprises planifient mieux et identifient certains risques plus en amont, pour atténuer certaines perturbations, qui se traduisent cependant en général par des coûts supplémentaires", estime le Panorama Consulting Group.
Les modules vedettes
Sans surprise, ce sont avant tout les applications de gestion financière (77 %) et de gestion commerciale (62 %) qui arrivent en tête des modules adoptés par les entreprises. Suivent la gestion de la supply chain (51 %), les ressources humaines (50 %) et le CRM (45 %).
Figure 4 (cliquez sur l'image pour l'agrandir)
Le niveau de personnalisation est, contre toute attente, en hausse par rapport aux précédentes études du PCG, qui conseille "de bien définir ses besoins lors de la rédaction du cahier des charges. Bien souvent, on constate alors que le logiciel choisi correspond bien mieux qu'on ne le pensait aux besoins et nécessite moins de développements spécifiques".
En revanche, le mode SaaS ne décolle pas vraiment : seuls 16 % des entreprises utilisent un ERP en mode SaaS (contre 17 % en 2011 et 6 % en 2009). Il convient néanmoins d'y ajouter les 21 % qui hébergent leur ERP à l'extérieur de l'entreprise. Mais ils étaient 24 % dans l'étude de 2011. Et 58 % des entreprises continuent à mettre en place des installations traditionnelles, on-premise.
En conclusion, les résultats de cette étude sont quelque peu contrastés : les taux de dépassement de budget et de délais s'améliorent indubitablement, ce qui signe une meilleure prise en compte des risques et des objectifs par les entreprises. De même, le niveau de satisfaction global est bon, mais il chute immédiatement après la phase de choix, ce qui va à l'encontre du constat précédent : il faut rapprocher cette situation des étonnants 63 % d'entreprises qui éprouvent des difficultés à gérer les changements de process et d'organisation. Seuls 13 % des répondants se conforment à des bonnes pratiques et ont adapté leurs process métier indépendamment du choix de leur ERP. La clé du mystère se trouve sans doute là.
Benoît Herr