Pour la comptabilité fournisseurs, il s'agit de réduire les délais de traitement et de simplifier les processus. Enfin, concernant la gestion du cash, il s'agit d'augmenter la compétitivité et la résilience des entreprises en partageant les risques et les opportunités avec les fournisseurs.
Ces évolutions sont d'autant plus importantes que la part achetée des entreprises n'a cessé d'augmenter. Deux mouvements de fond compensatoires ont été observés sur les marchés fournisseurs :
- la massification des achats pouvant augmenter l'impact du risque de défaillance en raison de la diminution du nombre de fournisseurs ;
- le développement de programmes collaboratifs permettant de mieux gérer la relation avec les fournisseurs et d'améliorer les prévisions d'activité.
La dématérialisation du processus d'achat au règlement, dite aussi "Purchase to Pay", est aujourd'hui mature sur le traitement des commandes d'achat, de la réception des commandes et du traitement des factures entrantes. En parallèle, d'autres formes de dématérialisation sont apparues en amont avec la nécessité d'une gestion optimisée des achats et en aval avec le financement des fournisseurs. L'extension progressive de la dématérialisation aux achats et aux règlements permet aux entreprises d'entrer dans l'ère de la "Supply Chain Finance". Cela est facilité par les systèmes désormais matures qui sont mis à la disposition des entreprises. Ainsi la dématérialisation permettra in fine aux entreprises d'optimiser l'ensemble du cycle opérationnel, d'améliorer la prévisibilité des cycles budgétaires, et de faciliter la gestion du cash. Les retours d'expérience des acteurs les plus avancés en matière de Supply Chain Finance démontrent que le prochain enjeu de la dématérialisation sera d'offrir aux entreprises la possibilité d'optimiser leur balance entre amélioration de l'EBITDA et sécurisation de leur chiffre d'affaires.
Quelles sont les pratiques actuelles en matière de dématérialisation dans les directions financières ?
Le 4ème baromètre Dématérialisation – Finance (réalisé chaque année par l'AFDCC, l'APDC, Canon, la DFCG et Itesoft, il couvre le périmètre France et a été établi en 2012 sur la base d'un questionnaire adressé à 4 500 décideurs) permet d'apporter des éléments d'analyse comparative de l'évolution des pratiques. Les processus achats et comptabilité fournisseurs sont jugés peu ou moyennement efficaces par les deux tiers des répondants. Cependant, l'augmentation des répondants satisfaits par rapport aux précédentes années donne à penser que l'optimisation des processus est en train de se mettre en œuvre. La réduction des délais et des coûts de traitement sont les objectifs prioritaires justifiant la mise en œuvre de technologies de dématérialisation de documents.
Il est à noter que 2012 marque une inversion des priorités constatées lors des éditions 2009/2010/2011 : la maîtrise des délais et donc de leur processus complet devient plus cruciale pour les entreprises que la réduction des coûts brute. Les deux leviers utilisés pour réduire les coûts de traitement sont :
- le rapprochement des données commandes-factures-réceptions ;
- la création et la validation des demandes d'achats et émissions de commandes. C'est donc l'intégralité du processus P2P qui est concerné.
Le baromètre montre que la part de répondants se déclarant satisfaits de l'efficacité de leurs processus achats et comptabilité fournisseurs est supérieure au sein de la population dont l'entreprise compte au moins un outil de dématérialisation. Aujourd'hui, 6 répondants sur 10 optent pour une exploitation internalisée pure ou partielle, privilégiant ainsi la maîtrise et l'évolutivité des processus. Par rapport aux précédents résultats, l'externalisation est en recul, bien que cette solution permette à l'entreprise de se concentrer intégralement sur son cœur de métier. Les entreprises combinent en moyenne deux à trois technologies de dématérialisation. En effet, la combinaison de technologies est perçue comme le moyen le plus rapide pour traiter l'intégralité du flux entrant. Enfin, le baromètre permet de constater, quelle que soit la taille de l'entreprise, une hétérogénéité croissante des systèmes d'information. Une certaine agilité sera donc nécessaire pour réaliser les gains de productivité attendus.
Quel mode organisationnel pour maximiser la performance du processus achats fournisseurs ?
Nous pouvons distinguer trois modes organisationnels pour maximiser la performance du processus financier :
- le BPR (Business Process Reengineering), qui est une démarche interne visant l'optimisation des procédures et des modes opératoires ;
- le Centre de Service Partagé (CSP), qui vise à mutualiser certains process sur une plate-forme de production interne ;
- l'externalisation, qui revient à confier le process ou la fonction à un prestataire dont le niveau d'engagement est contractualisé au sein de SLA (Service Level Agreement).
Le choix entre ces concepts varie généralement en fonction du niveau d'ambition de l'entreprise et des gains de productivité attendus ; il convient alors de mettre au point des solutions sur mesure qui varient en fonction des ambitions, des besoins et des organisations. Une formule mixte peut s'avérer être la plus pertinente. L'agilité, l'interopérabilité, la réversibilité sont des éléments clés d'un modèle cible optimal. Huit facteurs clés ont été identifiés pour permettre le succès d'un projet d'optimisation :
- l'appui de la direction générale ;
- une ambition claire ;
- une juste mesure de la capacité d'investissement ;
- la prise en compte de l'aspect ressources humaines du projet et des données sociales, en particulier en cas de mise en place d'un CSP ou en cas d'externalisation ;
- un travail de communication sur le projet ;
- la mise en place d'un système capable de s'adapter aux évolutions de la réglementation ;
- un pilotage fin des prestataires (externes ou internes) via la mesure de leur performance.
Une certaine agilité sera donc nécessaire pour réaliser les gains de productivité attendus, sans oublier une exploitation optimale des technologies disponibles sur le marché, véritables facteurs-clés de succès.
La dématérialisation et l'automatisation des documents : facteur d'agilité
L'intégration des technologies de dématérialisation des documents et d'automatisation des documents dans un processus P2P passe d'abord par la partie achats, via l'intégration de workflow (de création de demande d'achat, de validation de commandes d'achat, de gestion des réceptions, etc.). Le traitement de la facture fournisseurs est optimisé à travers la dématérialisation du document. Sa lecture, son contrôle et son rapprochement sont également automatisés. La validation, la comptabilisation et la présentation au paiement sont aussi dématérialisées et automatisés par le biais de workflow au sein desquels la facture électronique circule. L'ensemble du processus sera supervisé en temps réel par des logiciels permettant un reporting précis. Au-delà de ces fonctions de base, l'agilité des solutions de dématérialisation est une nécessité qui répond à différents enjeux actuels des entreprises :
- l'augmentation de leurs besoins en connectivité ;
- la nécessité de pouvoir mettre en œuvre des changements organisationnels rapides et réversibles ;
- l'accélération de leurs réflexions en matière d'optimisation des systèmes d'information appliqués aux processus métiers ;
- et enfin, la coexistence au sein des entreprises de multiples applicatifs hétérogènes.
Les solutions de dématérialisation qui ambitionnent de satisfaire à ces besoins croissants d'agilité doivent nécessairement intégrer :
- la mise à disposition de l'ensemble des fonctions interactives en mode Web ;
- le développement d'applications smartphones et tablettes ;
- l'orchestration de processus basés sur un hub d'intégration agnostique aux systèmes d'information hétérogènes de l'entreprise (applicatif, achats, plate-forme d'e-procurement, applicatif comptable, applicatif de gestion des règlements, etc.)
La dématérialisation et l'automatisation des documents : outils d'aide à la décision et au contrôle financier
Il est impératif de connaître à tout moment le statut d'un document, d'analyser la performance administrative comptable et de produire des rapports métiers standardisés sur l'intégralité du processus P2P. Pour cela, encore faut-il savoir réconcilier les données issues d'applicatifs hétérogènes. La dématérialisation de documents est, par nature, un outil transversal de gestion des données, qui permet notamment, de contrôler la bonne gestion des factures par les départements impliqués mais aussi de superviser l'ensemble du processus P2P. Grâce à l'interopérabilité entre les systèmes d'information hétérogènes, garantie par un hub d'intégration, la solution de dématérialisation de documents enrichie d'un module de supervision et de pilotage métier saura alors produire automatiquement des indicateurs de performance. Elle contribuera ainsi à l'analyse de la performance d'un CSP ou d'un prestataire BPO, à l'analyse financière, au contrôle de gestion, à la mesure de la performance de facturation des fournisseurs, etc.
Piloter la performance du processus
Les KPI (Key Performance Indicators) permettent de mesurer le progrès vers l'atteinte d'un objectif organisationnel prédéfini. Pour que ces KPI soient intéressants, ils doivent être :
- adaptés ;
- pertinents ;
- simples ;
- quantifiables ;
- validés ;
- comparables sur une période suffisamment longue pour qu'il soit possible d'analyser leur évolution.
La mesure de la performance ne peut passer par la seule appréciation des gains réalisés. Il convient de tenir compte du niveau de service et du risque accepté et de raisonner en termes de coûts complets (coûts directs, coûts indirects, coût du risque, coûts de la non-qualité et coûts cachés). Aujourd'hui, le coût de la fonction finance représente entre 1 et 2 % du chiffre d'affaires d'une entreprise. Les directions financières souhaitent ramener ce taux en dessous de 0,75 %, ce qui suppose notamment de travailler sur les outils de pilotage, et donc de procéder à :
- l'automatisation des indicateurs ;
- l'utilisation d'outils de reporting standardisés ;
- l'identification des KPI les plus pertinents.
Il convient de définir, pour chacun des KPI, l'objectif associé, et de mettre en place un système de recueil de données permettant de valoriser les KPI. C'est ainsi qu'il sera possible de piloter le process en fonction des résultats. Auparavant, les entreprises utilisaient plutôt des indicateurs de production, tels que le nombre de factures et le délai de paiement. Aujourd'hui, les entreprises recourent davantage à des indicateurs qualitatifs (coût de la facture, nombre de litiges, etc.). Désormais, il conviendra de réfléchir en termes d'indicateurs de performance (temps de traitement, écart entre la commande et la réception, temps de validation d'une facture, etc.). Toutefois, il est indispensable que les entreprises s'approprient les objectifs fixés.
François Lacas, responsable marketing et communication, Itesoft
Catherine Bergaud, associée, accompagnement comptable et financier, Mazars
Yann Guyomard, senior manager, consulting, Mazars