Fondé au Canada par le français Alain Latry, qui en est toujours le président, Technomedia est un acteur significatif du secteur de la gestion des talents, dont le chiffre d'affaires (non communiqué car c'est un groupe privé) est de l'ordre de 30 millions d'euros. La société est surtout présente en Amérique du Nord et en France, avec des clients tels que le Crédit Agricole, Chanel, Areva, BPCE, RATP, la Mairie de Paris, le groupe Legrand...
Christophe Bergeon, vice-président et directeur général, EMEA, Technomedia
"Nous avons développé toute notre offre en interne", déclare Christophe Bergeon, "ainsi l'unicité de la technologie garantit la cohérence des divers processus au sein de la suite de modules."
L'éditeur se positionne à contre-pied de la tendance actuelle de rachats entre les divers éditeurs du domaine, qui aboutissent à des agrégats de modules hétérogènes. "Dans ces offres combinant des produits d'origine variée, seul le portail est commun : c'est juste une couche de peinture fraîche", ironise Christophe Bergeon.
Un positionnement soigneusement pesé
Technomedia a décidé d'accélérer son développement, considérant qu'il y avait une place à prendre entre les mastodontes (Oracle, SAP) et les petits acteurs. Les acteurs de taille intermédiaire sont peu nombreux : Christophe Bergeon cite, entre autres, Cornestone et Saba. "Il y a un vrai marché pour accompagner les sociétés qui s'engagent dans des projets internationaux mais ne sont pas prêtes à payer des fortunes pour des solutions surdimensionnées."
Historiquement, Technomedia a commencé avec la formation et la performance, comme Cornerstone, et dispose désormais de modules pour tous les aspects de la gestion des talents. Le recrutement a pris de plus en plus d'importance et représente aujourd'hui 40 % du chiffre d'affaires. Le SIRH, c'est-à-dire la gestion administrative, a été développé plus tard, à la demande des clients. Mais l'éditeur n'a ni paie ni gestion des temps, qu'il considère comme étant du domaine de spécialistes. La richesse fonctionnelle de l'offre de Technomedia est très appréciée : "nous arrivons souvent en tête dans les appels d'offres, se félicite Christophe Bergeon, et nous pouvons apporter une forte expertise dans tous les processus couverts."
Des technologies qui facilitent les usages
Le mode SaaS ouvre de nouvelles possibilités aux directions RH pour tester et adopter des solutions adaptées à leurs besoins. Malgré une prise de conscience grandissante, les directions informatiques freinent encore souvent ces élans et peuvent aller jusqu'à bloquer toute initiative. Pourtant le SaaS permet d'aller plus vite et de diminuer le coût des projets, qui reste souvent élevé. Technomedia s'est complètement impliqué dans le SaaS, qui représente 98 % de ses contrats. Ses solutions s'interfacent facilement avec les applications installées dans le SI de l'entreprise, grâce à la variété des scénarios disponibles.
Application mobile de Technomedia
Technomedia s'intéresse aussi aux réseaux sociaux, "qui vont apporter beaucoup de changements dans les RH avec le passage en mode collaboratif. Certains clients sont en veille active ou avancée mais aucun n'a encore effectué de déploiement." Les sociétés de high-tech sont particulièrement attentives à cette évolution. "Chez Technomedia, le réseau social interne s'est répandu de manière virale en une semaine", remarque Christophe Bergeon. Un exemple d'utilisation est l'évaluation à 360 ° dans laquelle à la vision du manager s'ajoute la vision des pairs : le collaborateur propose les compétences sur lesquelles il demande à ses collègues de l'évaluer. L'impact risque d'être important : "le réseau social d'entreprise met à plat une entreprise hiérarchisée et la transforme en mode projet. Ces outils anticipent les changements d'organisation." Par ailleurs, la R&D de la société travaille actuellement sur la mobilité : les deux axes principaux sont les applications pour tablettes et les interfaces tactiles.
Un marché complexe et dynamique
Les appels d'offres que reçoivent les éditeurs s'appuient sur des cahiers de charges volumineux. "C'est une perte d'énergie et de temps, regrette Christophe Bergeon. L'exercice se répète à chaque fois. Il faudrait simplifier le processus, pousser l'entreprise à se concentrer sur les points essentiels, ceux qui sont critiques pour elle."
Malgré l'environnement économique morose, le marché de la gestion des talents est dynamique : il est tiré en particulier par des projets de remplacement par des solutions de deuxième génération. Par ailleurs, les phénomènes de rachats ont entraîné un appel d'air : lorsqu'un grand acteur arrête de maintenir une solution rachetée et propose à ses clients une autre offre de sa gamme, des projets de refonte totale deviennent nécessaires. Les clients s'ouvrent alors à la concurrence et s'intéressent de plus près aux solutions innovantes proposées par les petits acteurs, plus agiles que les grands éditeurs.
La suite intégrée, atout principal de Technomedia
La pérennité de Technomedia est liée à l'existence de sa suite, explique Christophe Bergeon : "alors que les éditeurs qui ont été rachetés sont spécialisés dans un seul domaine, nous sommes trop complets pour être rachetés, nous serions plutôt un consolidateur." L'éditeur envisage d'ailleurs des rachats pour élargir sa présence internationale. Les offres sous forme de suite unique intégrée séduisent particulièrement les sociétés de 3 000 à 15 000 salariés implantées dans plusieurs pays.
Tableau de bord du manager
Le cœur du marché de Technomedia est celui des grandes entreprises, pour qui l'éditeur développe des solutions riches et souples. Par exemple, les outils développés pour le Crédit Agricole sont intrinsèquement multi-marques, avec une étanchéité totale des données entre les marques. "Cette orientation nous distingue de nos concurrents, qui ciblent plutôt les PME, avec des solutions plus rigides", estime Christophe Bergeon.
Tous les clients font évoluer la road map, en particulier au sein des clubs utilisateurs : il y en a un par continent. Des clubs thématiques travaillent sur des domaines spécifiques, par exemple la formation. Un conseil des produits, qui comprend entre autres des grands clients, valide les choix de l'éditeur et fait des suggestions d'amélioration et d'évolution.
En pratique, Technomedia propose à ses clients trois services packs par an : en janvier, mai et septembre. Il propose aussi en permanence des nouveautés et des innovations. Les nouvelles fonctions sont activées ou non par les clients selon leurs contraintes et leurs besoins. L'effectif de Technomedia est de 200 personnes dont 40 en Europe, parmi lesquelles des consultants qui accompagnent les clients : il y en a 20 en Europe. L'éditeur s'appuie aussi sur des partenaires, dont CGI et Althea.
"Technomedia se préoccupe essentiellement de la satisfaction de ses clients, conclut Christophe Bergeon. Nous ne voulons pas remporter une affaire à tout prix. Nous préférons raisonner à long terme, être toujours présents, réagir à toute demande. Les clients ne veulent pas être de simples numéros."
René Beretz