En quoi les ERP actuels constituent-ils une nouvelle génération ? Quatre éditeurs et une utilisatrice ont débattu de ce thème lors de la table ronde inaugurale des Salons Solutions. De quand datent-ils ? "Pour nous, cela remonte à 5-6 ans environ avec une refonte des produits fondée sur une nouvelle architecture orientée vers les services, plus communicante, plus collaborative", déclare Virginie Garlasain, chef de produit ERP chez Microsoft France. Les ERP actuels se distinguent de leurs prédécesseurs par un élargissement de leur périmètre fonctionnel, avec la prise en compte de la relation client et l'intégration de fonctions avancées comme la réponse à des besoins sectoriels et l'internationalisation, ainsi que l'explique Isabelle Saint-Martin, chef de marché ERP, chez Sage division MGE. Mais c'est aussi en termes d'usages que les progiciels ont évolué. Pour Philippe Plantive, directeur général de Proginov, "ils doivent être constamment disponibles sur le Web et sur mobile, et un service de support doit pouvoir répondre à tout moment". Enfin, outre les services comptables, financiers et commerciaux de l'entreprise, un ERP peut concerner aujourd'hui le client d'un client, qui doit pouvoir accéder à l'information de manière fluide et interactive, selon Christophe Perrinet, directeur général, d'Octave.biz, créateur de sites e-commerce avec gestion commerciale intégrée.
Les usages évoluent
"Il y a une convergence des usages personnels et professionnels : l'utilisateur professionnel est aussi un consommateur, remarque Virginie Garlasain. L'utilisateur de l'ERP veut du tactile." L'ERP doit être facile à appréhender et paramétré de manière à ce que les utilisateurs disposent instantanément de toutes les fonctions dont ils ont besoin. "Chaque catégorie d'utilisateurs doit pouvoir accéder à l'ERP sans avoir besoin de faire appel au service informatique, les uns pour la gestion des droits, les autres pour les tableaux de bord", explique Patrice Castejon, PDG d'AvenueSoftware.
Distriboissons, réseau de distribution de boissons, utilise l'ERP Proginov depuis le 1er janvier 2013. "J'accède très rapidement aux écrans et je peux les personnaliser moi-même de manière très souple, alors que je ne suis pas informaticienne", déclare Alice Martelle, chef de projet. Mais cela ne doit pas mettre en danger la sécurité des informations de l'entreprise. "L'ERP doit demeurer un coffre-fort car il contient des informations critiques et confidentielles, et tout doit être contrôlé par la DSI", insiste Philippe Plantive. C'est d'autant plus important que l'ERP est maintenant largement utilisé au-delà du coffre-fort.
Respecter l'identité de l'entreprise dans tous les modes
L'époque des ERP normatifs auxquels toutes les entreprises devaient s'adapter semble révolue. "Aujourd'hui, les entreprises doivent s'approprier l'ERP et acquérir de l'autonomie, note Isabelle Saint-Martin. Elles personnalisent l'environnement en fonction de leurs spécificités." Pour les ERP proposés en mode SaaS, la personnalisation se fait par dossier client : "chaque client a sa base de données et son environnement", précise Philippe Plantive. L'approche est similaire chez Octave.biz, qui est passé en 2007 du modèle de commercialisation par licences au modèle SaaS. "Nous proposons maintenant le même ERP à tous nos clients et nous adaptons les règles métiers à chacun, à partir de règles standards", explique Christophe Perrinet.
Le cloud et ses multiples interprétations
Les éditeurs s'approprient le cloud de manière extrêmement variée. Sage a une approche singulière, privilégiant les modèles hybrides, allant jusqu'à dissocier la notion d'hébergement de celle de souscription. De son côté, Proginov privilégie le mode hébergé : "il est plus adapté à la fourniture de services et c'est pour ce mode que nous avons le plus de demandes, remarque Philippe Plantive. Mais si un DSI est porteur de projet, le mode traditionnel en hébergement local est plus adapté." La notion de réversibilité est essentielle pour les applications dans le cloud. "Il faut laisser aux clients la possibilité de récupérer leurs données chez eux", ajoute-t-il. Ce n'est pas la préoccupation de Christophe Perrinet : "le mode SaaS n'a que des avantages. Avoir l'e-commerce et l'ERP intégrés sur un serveur hébergé nous permet de proposer à nos clients des règles métiers beaucoup plus fines."
La richesse fonctionnelle va de pair avec l'ouverture
De son côté, Avenue Software a plus de demandes pour un hébergement sur les serveurs de l'entreprise, même pour les applications Web. Pour Patrice Castejon, "les facteurs essentiels sont la puissance, la qualité et la richesse fonctionnelle. Par exemple, les configurateurs industriels sont très demandés. Les PME ont les mêmes besoins que les grandes entreprises." Tous les éditeurs de la table ronde ont une position similaire : de nouvelles fonctions sont intégrées dans les produits et parallèlement, l'ouverture des ERP permet l'interconnexion avec des solutions d'éditeurs spécialisés. "L'ERP n'est pas nécessairement un mange-tout, déclare Virginie Garlasain. Il répond à beaucoup de besoins mais pas à tous", confirme Christophe Perrinet. Son de cloche un peu différent de la part de notre utilisatrice, qui apprécie un ERP riche, totalement intégré, qui recèle des fonctions inexplorées : "nous n'utilisons qu'une partie des capacités de l'ERP et nous progressons marche par marche pour tirer parti des nouvelles fonctions", explique Alice Martelle.
Dématérialisation et mobilité, des réponses innovantes à des besoins récurrents
Les avancées technologiques et les nouveaux usages doivent répondre à des besoins essentiels toujours présents. Philippe Plantive en donne des exemples : "il y a toujours un besoin de stockage mais il s'agit aujourd'hui de stockage numérique dans un contexte de dématérialisation. Autre progrès, les Web services remplacent avantageusement les moteurs d'EDI, très coûteux, ce qui représente un progrès sensible pour l'internationalisation des PME/PMI." Mais la dématérialisation, c'est aussi l'ensemble des services en ligne, comme des configurateurs permettant aux clients de calculer les quantités de produits à commander, ainsi que les notices et vidéos pratiques, comme le détaille Christophe Perrinet.
Les innovations se déclinent de diverses manières selon les métiers et les fonctions. Parfois, il faut en rester aux solutions traditionnelles : "le clavier et l'écran restent bien adaptés à la saisie en masse", signale Isabelle Saint-Martin. Mais les terminaux mobiles trouvent de plus en plus d'usages. "Les cols blancs consultent des indicateurs et des tableaux de bord sur tablettes, tandis que les opérateurs d'entrepôts travaillent avec des terminaux mobiles légers", constate Virginie Garlasain.
René Beretz