Les ERP sont nés pour répondre aux besoins des entreprises industrielles. Mais leur mise en œuvre dans un tel environnement demeure souvent plus complexe du fait des process industriels et de leur manière d'interagir. De ce fait, même si aujourd'hui les ERP savent répondre aux besoins de toutes les entreprises, ces installations sont souvent plus chères que les autres. En outre, de nombreuses entreprises industrielles personnalisent leur solution pour répondre à leurs particularismes, ce qui grève encore les coûts.
Toutes ces raisons ainsi que l'évolution actuelle de ce secteur (relocalisations, par exemple) ont poussé PCS à renouveler l'étude qu'il avait menée en 2008 : l'enquête a été conduite entre mai 2012 et septembre 2013. Sur cette période, SAP a été retenu dans 17 % des cas par les entreprises industrielles, suivi d'Oracle et de Microsoft, pour respectivement 14 % et 7 % des parts de marché. Les nombreux éditeurs qualifiés de "Tier II" par PCS représentent dans leur ensemble quelque 21 % de ce marché, ce qui est supérieur aux autres secteurs d'activité. Parmi ceux-ci Infor avec 7 %, Epicor avec 5 % et l'éditeur allemand ABAS, avec 5 % également.
Durée et budget des projets
Figure 1 (cliquez sur l'image pour l'agrandir)
La durée des projets ERP dans le secteur industriel est de 18,5 mois, soit 3 % de moins que les 19,1 mois enregistrés dans l'ensemble des secteurs. En revanche, les écarts entre durée prévue et durée effective sont plus importants, soit 3,8 mois de plus alors que tous secteurs confondus cette durée est en moyenne plus courte de 0,2 mois que le planning initial. Cela montre que les entreprises industrielles font souvent des estimations irréalistes. La bonne nouvelle, c'est que les dépassements de délais s'observent moins souvent dans l'industrie qu'ailleurs (cf. figure 1).
PCS avance une explication et pense que les problèmes organisationnels (gestion du changement, de l'équipe projet etc.) et les modifications de périmètre du projet sont le plus souvent à l'origine de ces dépassements. Mais la formation, la migration des données et les plannings irréalistes entrent en jeu également.
Côté budget, les coûts s'établissent en moyenne à 11,4 millions de dollars, selon l'étude de PCS, supérieurs de 14 % à ceux observés dans l'ensemble des secteurs (9,8 millions). Ceci s'explique par une plus grande complexité entraînant des développements spécifiques plus nombreux. L'intégration avec les systèmes en place (PLM, MES, assurance qualité etc.) est une autre source de coûts.
Figure 2 (cliquez sur l'image pour l'agrandir)
Plus de 63 % des projets d'ERP industriels sont en dépassement de budget, les coûts réels dépassant en moyenne de plus de 3 millions de dollars le budget initial. Ce chiffre est moindre dans l'ensemble des secteurs (59 %), où la moyenne des dépassements n'est que de 1,7 million. PCS estime que c'est l'intégration avec les systèmes existants qui est à l'origine de ces dépassements. A contrario, les entreprises industrielles sont aussi plus nombreuses que les autres à boucler leur projet ERP en deçà du budget initial (cf. figure 2).
Retour sur investissement
L'un des aspects fondamentaux de tout projet ERP est la mesure des bénéfices qu'il apporte et le délai nécessaire à l'apparition d'un retour sur investissement. L'étude de PCS montre que 50 % des industriels ne sont pas encore rentrés dans leurs frais tandis que 31 % d'entre eux ont enregistré un ROI en 2 à 4 ans. Pour PCS, ceci suggère que les entreprises ne prennent pas le temps de mettre sur pied une analyse de rentabilité. Mais PCS se déclare encore plus troublé par les 13 % d'organisations industrielles qui déclarent enregistrer un retour sur investissement en moins d'un an : "lorsqu'une organisation ne fixe pas de repère de départ en évaluant sa situation avant implémentation, il lui est impossible de savoir s'il y a retour sur investissement ou non. Elle devrait faire une analyse de rentabilité qui intègre les gains de productivité et les bénéfices non liés au travail pour calculer un délai de ROI fiable".
Quant aux bénéfices tangibles initialement attendus, 40 % des installations d'ERP en milieu industriel en enregistrent de 0 à 30 % et relativement peu (13 %) en réalisent de 80 à 100 %. Parmi ces bénéfices, celui que l'on rencontre le plus souvent (33 % des répondants) est l'amélioration des délais de réponse grâce à une meilleure disponibilité de l'information, mais aussi une facilitation des interactions entre acteurs au sein de l'entreprise (23 %).
Point noir
Le pourcentage de développements spécifiques est sensiblement plus élevé dans l'industrie que dans l'ensemble des secteurs : comme on peut le voir sur la figure 3, les entreprises industrielles personnalisent deux fois plus leur ERP que les autres. Elles sont 13 % à réaliser des modifications en profondeur et à changer plus de 50 % du code, contre 6 % dans l'ensemble des secteurs.
Figure 3 (cliquez sur l'image pour l'agrandir)
Pour PCS, ce niveau de personnalisation relativement élevé s'explique par le degré de spécialisation et de complexité inhérent aux entreprises industrielles. "La plupart des ERP ne répondent pas à tous leurs besoins parce que les éditeurs ne peuvent pas se permettre de développer des solutions spécifiques pour chaque métier", souligne le rapport. "Une personnalisation importante peut parfois s'avérer nécessaire, mais il faut éviter de s'y lancer si elle n'est pas fondamentale pour l'activité de la société", conseille PCS.
En conclusion, PCS indique que cette enquête met en lumière la complexité et la singularité des installations d'ERP industriels : de ce fait, leur coût est significativement plus élevé. "Les entreprises industrielles tirent également moins de bénéfices de leur ERP et le délai de retour sur investissement est plus long : alors même que les ERP ont été initialement créés pour elles, ces entreprises ne tirent aucun avantage de cet historique", constate le rapport. "La première chose à faire pour s'assurer du succès de son projet ERP en milieu industriel est d'élaborer une analyse de rentabilité énonçant clairement les buts et les objectifs, de manière à avoir un point de comparaison par la suite".
Benoît Herr
L'étude complète (en anglais) est disponible ici : http://panorama-consulting.com/resource-center/erp-industry-reports/