À 16,3 milliards d'euros, le chiffre d'affaires total de SAP a crû de 8 % en devises constantes entre 2012 et 2013. Ce chiffre d'affaires s'est déplacé vers le cloud : certes, le mouvement reste encore modeste, avec 758 millions d'euros d'abonnements et de support cloud contre 4,518 milliards pour les licences traditionnelles, ou perpétuelles, auxquels il faut ajouter les 8,758 milliards de maintenance qu'elles génèrent. Mais lorsqu'on compare ces 758 millions aux 343 réalisés en 2012, on voit que l'activité cloud a crû en flèche, de 121 % d'une année sur l'autre, soit 130 % en devises constantes. Notez que tous les chiffres fournis dans cet article ont été établis en normes non-IFRS ; SAP a en effet l'habitude de publier ses résultats dans les deux normes, IFRS et non-IFRS mais définit sa stratégie et ses prévisions en fonction de cette dernière.
A contrario, les ventes de licences perpétuelles ont décru de 3 % par rapport aux 4,658 milliards réalisés en 2012, ce qui, en devises constantes, représente une petite croissance de 2 %. La transition vers le cloud, renforcée par la reprise de SuccessFactors et d'Ariba, est donc bien en cours : SAP prévoit d'y réaliser un chiffre d'affaires de 950 millions à 1 milliard d'euros en devises constantes en 2014, ce qui représenterait une croissance de 32 %, si l'on compare les chiffres en excluant les acquisitions. "Au vu du fort mouvement initié en 2013, nous allons accélérer la transition vers le cloud en offrant le choix aux clients. Toutes nos solutions seront transférées dans le cloud et bénéficieront de notre plate-forme temps réel HANA", ajoutent Bill McDermott et Jim Hagemann Snabe, Co-CEO de SAP. Rappelons que ce dernier devrait quitter la co-présidence en cours d'année pour laisser Bill McDermott seul aux commandes (cf. SAP : plus qu'un éditeur de logiciels ?).
Jim Hagemann Snabe (à G) et Bill McDermott (à D), Co-CEO de SAP, lors de la conférence de Presse d'annonce des résultats 2013 (cliquez sur la photo pour l'agrandir)
Quant au chiffre d'affaires global, on se souvient que l'objectif initialement défini était d'atteindre 15 milliards d'euros en 2015 (cf. SAP France a le sourire). Cette échéance a été repoussée à 2017, mais l'objectif est passé à 22 milliards.
Autres chiffres intéressants : la marge brute et le bénéfice après impôt. Le premier se monte à 5,513 milliards, en hausse de 6 %, le second à 4,024 milliards, en hausse de 12 %. La marge brute s'établit à un confortable 32,6 %, ce qui fait dire à Franck Cohen, président de SAP pour la région EMEA, que "le profit croit de manière significative et que la transition vers le cloud n'affecte pas la rentabilité de l'entreprise".
Une bonne année pour la France et l'Europe
Sur la zone EMEA, la croissance a été forte au dernier trimestre de 2013, à 9 %, et en France elle est même à deux chiffres. "La France a réalisé son meilleur trimestre des 7 ou 8 dernières années", commente Franck Cohen. Ces bons résultats hexagonaux sont à mettre en relation avec un certain nombre de gros contrats signés avec Decathlon, qui a décidé de gérer sa chaîne logistique avec la bases de données HANA et incarne un "partenariat très fort", selon Franck Cohen. D'autres gros contrats sont venus émailler ce trimestre, dont celui avec Danone, qui va gérer ses RH avec Successfactors, Faurecia, qui a adopté la Business Suite sous HANA, ou encore Arkema ou Eramet.
Sur l'année, l'Europe aura connu une croissance de 13 % sur la partie licences logicielles et une croissance à deux chiffres sur l'ensemble. "C'est donc une bonne année, y compris sur la profitabilité", se satisfait Franck Cohen. Quant au chiffre d'affaires lié au cloud en Europe, il a crû de 132 %. Dans certains domaines, l'Europe fait même mieux que les autres régions : sur HANA, par exemple, le chiffre d'affaires a crû de 74 % en Europe, contre 69 % sur l'ensemble du monde. Il en va de même pour les applications de mobilité, qui ont crû de 31 % en Europe. "Les deux pivots de notre croissance continuent donc d'être importants sur la région", commente Franck Cohen. Mais ce bon chiffre régional masque des disparités importantes en fonction des pays. En France en particulier, on sait que l'adoption de HANA est en retard. "Il y a eu des signatures importantes sur le dernier trimestre et je pense qu'en 2014 il y en aura beaucoup plus. Les grandes entreprises françaises prennent le temps d'analyser la solution, ce qui explique un certain décalage. Je suis optimiste pour 2014", se rassure Franck Cohen.
D'autres secteurs, comme le secteur public, sont stratégiques pour SAP : la croissance de revenus issus du secteur public a été de 28 % en 2013. Il en va de même de la grande distribution, autre secteur stratégique, qui a connu une croissance de 110 % en Europe sur l'année. "Nous entendons bien capitaliser sur ces domaines en 2014", promet Franck Cohen.
Stratégie en trois points
La stratégie de SAP pour les années à venir est fort logiquement tournée vers le cloud. Trois grands domaines sont en ligne de mire :
- Les RH, dont la partie cloud, liée à SuccessFactors, croit de manière importante, de 132 % l'an passé ;
- Les achats, avec Ariba et sa formidable communauté d'utilisateurs. "La croissance est également forte dans ce domaine, avec une dizaine de dossiers très significatifs", signale Franck Cohen ;
- Le CRM : "2013 a été l'année du lancement de la solution CRM on demand", rappelle Franck Cohen, "et nous venons là aussi de signer de gros dossiers, dont Speedo en Angleterre".
Franck Cohen, président de SAP pour la région EMEA (cliquez sur la photo pour l'agrandir)
Pour la partie e-commerce, le dirigeant cite aussi Hybris, dont la reprise par SAP est plus récente (juin 2013), avec là encore des signatures importantes, comme Burberry ou L'Oréal, un projet européen, pour l'instant initié en France.
Au sens plus large, de l'éditeur dans son ensemble, Franck Cohen annonce que les priorités sont de simplifier les modèles utilisés, qu'il s'agisse de prix, de contrats, de façons de travailler ou de s'assurer que les clients sont le plus satisfaits possible. Il précise que sur sa région, EMEA, le développement des secteurs stratégiques, comme le secteur public, la distribution ou la finance, va continuer de faire partie des préoccupations et que le développement de la croissance dans les pays émergents va se poursuivre, avec des moyens supplémentaires. Mais le développement sur le cloud, notamment le CRM, constitue la première des priorités "Il est vital de travailler sur le domaine des clients", poursuit-il.
Quelques zones d'ombre
En ce qui concerne l'adoption de la solution bancaire de SAP, la situation est contrastée d'un pays à l'autre. "Les résultats sont excellents dans les pays émergents, avec des dossiers significatifs comme la Standard Bank ou la NedBank en Afrique du Sud, par exemple. Les résultats en Australie sont spectaculaires : une grande banque a fait le choix SAP et 4 des 5 autres ont suivi. Il en va de même en Israël et dans certains pays d'Afrique. Mais dans les pays d'Europe de l'ouest, il y a plus d'inertie et de latence et les résultats sont moins rapides que prévu", constate Franck Cohen.
Par ailleurs, Business ByDesign passe aux oubliettes, si l'on ne le rappelle pas au bon souvenir de Franck Cohen. Pourtant, "nous poursuivons nos investissements sur Business ByDesign, qui est désormais parfaitement localisé pour le marché français", assure-t-il. "Mais je continue à penser que cette solution est en avance sur son temps. Cependant, de plus en plus d'entreprises vont envisager de basculer, notamment leur gestion financière, sur le cloud. L'adoption de Business ByDesign n'est qu'une question de temps".
Benoît Herr