Depuis 1947, trois générations se sont succédé à la tête de Cauquil, PMI familiale aujourd'hui devenue spécialiste de l'usinage de précision des alliages de pointe, dont l'inconel, utilisé notamment pour fabriquer des pièces destinées à résister aux fortes chaleurs régnant à l'intérieur des réacteurs. Ses prestations vont de la fabrication en série au dépannage (urgences, grande série...) et au prototypage en passant par tous les services associés. Il lui faut donc être réactive et souple.
Certifiée EN9100, Cauquil est partenaire des donneurs d'ordre de l'industrie aéronautique. Parmi ses clients, on peut citer Aircelle et Hispano, filiales du groupe Safran, Latécoère, Mecachrome, Mecahers, le groupe anglais Gardner ou encore le groupe Lauak. En 2004, à la suite d'un accord intervenu dans la fratrie, c'est Didier Cauquil et Marc Alaux qui ont pris les rênes de l'entreprise. Il a fait entrer son partenaire Marc Alaux au capital à hauteur de 37,5 %, ainsi que la Banque Populaire, à hauteur de 25 %, qui lui assure la stabilité financière. Lui-même conserve 37,5 % des parts.
La forêt de forets et autres outils coupants qu'utilise Cauquil (cliquez sur la photo pour l'agrandir)
Un premier plan d'investissement est alors intervenu, qui prévoyait le doublement de l'infrastructure en passant de 6 à 13 machines, dont un centre d'usinage MCM 5 axes. Ce plan prévoyait également une restructuration de l'entreprise, avec une réorganisation de l'encadrement et la création de tableaux de bord. L'objectif était d'accroître la réactivité grâce à la mise en place d'une production en flux tirés de type Kanban de production, avec une standardisation des moyens et l'intégration de l'activité dépannage et prototypes dans le même atelier.
Ce plan a été mené à bien et terminé en 2010. Mais 2011 a marqué un creux de la vague dans l'industrie aéronautique : Cauquil ne vivait pour ainsi dire plus qu'au travers de son activité de commandes de dépannage, ce qui lui a néanmoins permis d'augmenter son activité globale. Didier Cauquil a alors recruté un directeur de production : les effectifs sont passés de 45 à 80 personnes et l'entreprise a racheté un terrain pour y implanter un bâtiment de 4000 m2. Dans le même temps, l'atelier est passé des flux tirés aux flux poussés, ce qui implique de planifier la production.
"Ce fut une erreur, car les OF de dépannage s'intercalaient sans cesse dans la planification, qui de fait devenait irréaliste", explique Didier Cauquil. "Forts de ce constat, nous avons rebasculé à l'ancien principe des flux tirés en 2012". Aujourd'hui, les OF sont envoyés en fonction du besoin des machines et le temps de transit sur chaque machine est mesuré de manière très fine. Dès qu'un OF dépasse 5 jours de temps de traitement, il est identifié et la raison de ce délai analysée. Ainsi, le taux de service a pu grimper à 98 %. Le chiffre d'affaires s'en ressent, puisqu'il est passé de 7,1 M€ en 2011 à 8,5 M€ en 2013.
Une organisation collaborative
Une revue de performance quotidienne (cliquez sur la photo pour l'agrandir)
La production se fait sur un mode collaboratif et implique l'ensemble du personnel : avant de prendre leur poste, tous les collaborateurs d'une section d'atelier se réunissent quelques minutes autour d'un tableau (cf. photo) pour une revue de performance quotidienne. Là, on identifie les éventuels problèmes, on analyse les indicateurs et les remontées de l'atelier, on déclenche les actions correctives, dont on vérifie ultérieurement l'efficacité. Plus tard dans la journée, les responsables de chaque atelier se réunissent, coordonnent leurs actions et résolvent les éventuels problèmes d'interface entre services. Cette cascade de revues de performance trouve son point d'orgue dans la réunion hebdomadaire des cadres, destinée à coordonner l'ensemble, qui inclut cette fois la direction.
Des SI qui s'adaptent
L'outil informatique qui gère ce mode de fonctionnement singulier repose sur deux composantes principales : l'ERP Hélios de Clip Industrie (initialement créée par la société Manager, récemment rachetée par Clip Industrie) et le système de supervision de machines à commandes numériques jFMX, que propose le constructeur italien de machines-outils MCM. La particularité de jFMX est que non seulement le logiciel est capable de piloter, de contrôler et d'intégrer les systèmes de production MCM au SI de l'entreprise, mais qu'il s'interface aussi avec les machines-outils d'autres constructeurs.
Didier Cauquil utilise un poste jFMX (cliquez sur la photo pour l'agrandir)
Or, Cauquil utilise également des machines-outils d'autres marques, Mori Seiki, Akari Seiki et Doosan notamment. jFMX s'interfaçant avec ces machines, il est utilisé de la même façon pour les piloter. Ainsi, tout le personnel de l'atelier conduit les machines à partir d'une application unique. De ce fait, les conducteurs de machines deviennent plus mobiles. "Grâce à cela, le personnel n'a pas à être aussi spécialisé qu'avec une interface propriétaire", ajoute Didier Cauquil. "Et les reconversions s'en voient facilitées. Il m'est par exemple arrivé d'embaucher un boulanger qui souhaitait changer d'orientation".
Hélios au cœur des SI
L'ERP Hélios, dédié aux métiers de l'industrie, est l'élément de référence des SI de Cauquil. C'est lui qui recense toutes les nomenclatures, toutes les gammes et assure la maîtrise des coûts, des délais et la traçabilité des flux sur l'ensemble des processus. "Tous les relevés d'heures sont envoyés dans Hélios, qui ressort tous les indicateurs de qualité et autres qui nous permettent de travailler", précise Didier Cauquil. C'est également Hélios qui diffuse l'information en interne, dont notamment celle qui sert de base aux revues de performance.
Cette situation perdure depuis de nombreuses années et satisfait pleinement l'entreprise, qui a compté parmi les premiers clients de Manager, à la fin des années 1990. En outre, la version installée étant complètement standard, aucun développement spécifique ni aucune verrue n'ayant été mis en place, les montées de versions ne posent aucun problème.
Lorsque Cauquil a entrepris son bref aller-retour vers la production en flux poussés, le système s'est adapté : il a suffi d'installer et d'utiliser le module de planification et d'ordonnancement Cynaps, proposé par l'éditeur en complément de l'ERP Hélios. Ce module est entièrement intégré à l'ERP, sans interfaçage. Le retour aux flux tirés a été encore plus simple : il a suffi de cesser d'utiliser Cynaps.
Au fil des années, ce SI simple et efficace a permis à Cauquil d'absorber son évolution, sa croissance et ses réorganisations. Avec l'aide d'un cabinet extérieur spécialisé dans le conseil aux PME, l'entreprise a aujourd'hui entrepris une nouvelle mutation destinée à la faire passer du statut d'atelier à celui d'usine.
Benoît Herr