JEMM Vision a réalisé pour SAP un baromètre sur la Business Intelligence en décembre 2013 et janvier 2014 au moyen de questionnaires en lignes auprès de 62 entreprises et administrations françaises, complétés par quelques entretiens. Ses résultats ont été confrontés à la vision de responsables opérationnels lors d'une table ronde qui s'est tenue lors du récent SAP Innovation Forum.
Le baromètre Business Intelligence 2014
Christophe Toulemonde, directeur du cabinet JEMM Research, a présenté les enseignements principaux du baromètre. La BI est au cœur de la stratégie des entreprises, que ce soit au niveau global ou au niveau des directions métiers. Dans ce deuxième cas, une centralisation reste indispensable pour assurer la cohérence stratégique des solutions. Elle est le plus souvent portée par la DG et la DAF, avec la DSI en support technique et en garant de la gouvernance.
La réussite des projets BI repose sur la bonne articulation entre une direction métiers et une équipe de projet constituée de représentants fonctionnels et d'informaticiens, permettant de marier l'expertise du métier et la compétence technique. Les exigences diffèrent à chaque étape : processus complexes pour la collecte des données, mise au point de modèles par des experts pour l'analyse des données, solutions matures, performantes et d'usage simple pour la restitution.
La BI devient un outil indispensable pour tous les acteurs de l'entreprise. Le concept de la BI pour tous fait son chemin avec des solutions en libre-service, le requêtage ad hoc, son intégration dans les suites bureautiques. Nécessaire pour le travail quotidien, elle doit fournir rapidement les bonnes informations à partir de l'analyse de masses importantes de données.
Principales technologies dans les 2 ans
L'innovation dans les métiers dépend des initiatives stratégiques dans la BI et d'autres technologies d'avenir. C'est pourquoi les organisations réfléchissent à l'intégration de la BI dans leurs processus opérationnels, comme la planification financière et la relation client. Elles s'intéressent aussi à l'analyse prédictive et à l'analyse en temps réel des données en mémoire. Mais des freins subsistent autour de la perception de la sécurité et de la volumétrie des données.
Des projets décisionnels fédérateurs
Deux participants de la table ronde animent des projets décisionnels à long terme. CCPA Groupe, société spécialisée en nutrition et santé animales, a lancé son projet de BI il y a 5 ans, la DSI se coordonnant avec la direction générale. De son côté, la région Languedoc Roussillon a lancé sa démarche il y a 10 ans. Mais le contexte a beaucoup évolué, comme l'explique Bruno Stavy, directeur du contrôle de gestion de la région Languedoc Roussillon : "les contraintes financières sont importantes avec la diminution des financements. Il faut faire mieux avec moins."
Un tel projet démarre souvent par la constitution d'un vocabulaire, comme l'explique Nicolas Amet, responsable des systèmes d’information de CCPA Groupe : "nous avons commencé par définir ce que sont le chiffre d'affaires, la marge ou une zone régionale, avant d'effectuer un déploiement stratégique dans les différentes sociétés du groupe". Par définition, un projet de BI n'est jamais terminé, en particulier dans une société qui a plusieurs métiers : "nous avons commencé par les ventes puis nous nous sommes intéressés aux usines et aux laboratoires" indique-t-il.
Un aspect fondamental de la démarche est de mettre la BI à la portée de tous. "À côté des tableaux de bord destinés aux décideurs, nous avons mis en place des portails utiles au travail quotidien des utilisateurs grâce à des éléments souvent simples", déclare Bruno Stavy.
L'obsession de la qualité des données
Pour obtenir des indicateurs corrects, la qualité des données traitées est essentielle. "Il faut sensibiliser les utilisateurs à la qualité et obtenir un engagement de leur part à ce sujet. Une démarche adaptée à la qualité des données s'impose. Les processus de fabrication des données sont essentiels car des données fausses entraînent de gros soucis pas la suite", insiste Bruno Stavy. Ce que confirme Nicolas Amet : "lors du démarrage d'un projet informatique, si un utilisateur trouve une donnée fausse au bout de 15 minutes, le projet est définitivement discrédité."
Les solutions décisionnelles contribuent à améliorer l'utilisation des applications du SI : "nous exploitons les données de l'ERP de manière efficace et tirons son utilisation vers le haut, précise Nicolas Amet. Lorsque nous trouvons des erreurs dans les données de l'ERP, nous les corrigeons, ce qui contribue à améliorer la qualité de la BI."
Mais le manque de qualité des données ne doit pas bloquer la démarche, comme le décrit Bruno Stavy : "la première année, les RH avaient du mal à s'approprier les applications décisionnelles à cause du manque de qualité des données. Mais plutôt qu'un problème, cela a été l'occasion de l'améliorer." L'incohérence des données reste souvent invisible et n'apparaît que lors de la mise en place des outils décisionnels : une étape corrective est alors nécessaire. Une certaine quantité des données peut même être indisponible.
Les organisations exploitent aussi des données venant de l'extérieur. À côté de ses quelque 30 bases de données et du même nombre de "datamarts", la région Languedoc-Roussillon a des accords d'échanges de données avec le rectorat et la SNCF, par exemple. La compatibilité peut poser problème, l'ETL pouvant refuser des données qu'il considère comme aberrantes.
"Obtenir un engagement dans la qualité des données est complexe, confirme Christophe Toulemonde. Sa maîtrise est délicate et passe par la confiance dans les outils pour parvenir à la cohérence."
Des atouts incontestables pour vaincre les réticences
L'installation d'outils communs à toute une entreprise ou une administration entraîne des oppositions et des blocages : "certains collègues confondent savoir et pouvoir, constate Bruno Stavy. Certains cachent leurs fichiers sur des clefs USB, alors qu'il s'agit souvent de tableaux dynamiques Excel difficiles à manipuler." Il faut donc les convaincre que le passage aux outils de reporting leur fera gagner du temps et de la qualité.
"Agilité, confiance et simplicité sont les garanties du succès", affirme Nicolas Amet. Les applications doivent pousser les données de manière sécurisée vers les utilisateurs : si elles répondent bien à leurs besoins, ceux-ci font moins de requêtes car ils ont confiance dans les données qui leur sont envoyées.
Thème récurrent, les solutions de mobilité deviennent indispensables au personnel nomade. Dans la région Languedoc-Roussillon, les élus disposent de tablettes lorsqu'ils sont en visite sur le terrain, ce qui leur permet de répondre immédiatement aux questions sur les réalisations de l'institution.
La gestion efficace de grandes masses de données prend de l'importance avec l'évolution du contexte politique et administratif :"les projets de recomposition des régions en entités plus grandes exigeront des croisements d'énormes volumes de données économiques et socio-économiques, prédit Bruno Stavy. Les collectivités territoriales vont beaucoup changer avec les évolutions de la France et de l'Europe. Nous devons nous adapter en permanence, innover et répondre aux besoins et aux usages."
"Les nouveaux outils sont tellement intuitifs qu'ils sont livrés sans mode d'emploi", constate Nicolas Amet. Ils se répandent dans tous les domaines et se fondent dans le paysage. "Les outils décisionnels s'intègrent de plus en plus dans les applications utilisées quotidiennement. La BI en tant que telle disparaît." conclut Christophe Toulemonde.
René Beretz
Le point de vue de l'éditeur
Participant à la table ronde, Brice Faure, directeur des ventes des solutions analytiques chez SAP France, insiste sur le double rôle de l'éditeur. Le premier consiste à accompagner les clients dans le reporting avec la mise en place des meilleures pratiques : "ce n'est pas innovant en soi. Mais la conduite du changement reste un travail à poursuivre", explique-t-il. Le deuxième rôle est celui de visionnaire avec des solutions innovantes comme l'analyse comportementale dans les réseaux sociaux. Le statut des applications décisionnelles varie beaucoup d'une structure à l'autre : certaines applications figées n'évoluent que de version en version, d'autres s'enrichissent régulièrement. Enfin, des applications font évoluer leur périmètre et sont plus sensibles à l'innovation.
Les évolutions de la BI suivent celles des points de vue. La BI traditionnelle, mise en œuvre par BusinessObjects, va du haut vers le bas et impose une vision unique. "Mais la réalité est plutôt représentée par un 'réseau de vérités' permettant de tracer les données : chacun possède sa vérité, qui reste compatible avec celles des autres.", remarque Brice Faure. Chez SAP, elle se concrétise avec l'application Lumira, qui s'interface avec les outils décisionnels traditionnels.
Autre tendance forte : alors que le reporting n'exige pas des résultats immédiats, le temps réel prend de plus en plus d'importance. "Lumira permet à chacun d'explorer les données sans être un expert mais pour cela il faut avoir une infrastructure efficace : HANA fournit les informations instantanément."
RB