La place du MES dans la chaîne d'information
Le contrôle de la fabrication, son exécution et la planification s'effectuent dans des échelles de temps différentes. Les automates programmables et les robots de production installés dans les ateliers travaillent au niveau de la seconde tandis que la planification et la gestion se font au niveau de la demi-journée ou de la journée. Entre les deux, le MES doit pouvoir répondre en quelques minutes.

La communication entre ces divers niveaux a évolué et son volume s'est fortement accru, favorisé par le développement des architectures d'automatismes réparties et par l'augmentation de la capacité de traitement des processeurs. Parallèlement, le fonctionnement des entreprises a considérablement changé : aujourd'hui, la réactivité est essentielle et elle doit être prise en charge par les processus. Il faut concevoir et produire plus vite, de manière plus adaptée à la demande, tenir compte des réglementations. La communication permanente devient une nécessité : tout doit se faire maintenant en temps réel. Le MES prend ainsi un nouvel essor. Dans les ateliers, les réseaux sont essentiels et Ethernet intervient à tous les niveaux, favorisant le transfert d'informations entre la production, la GPAO et les ERP.
Les différents types de procédés : batch, continus et discrets
Le monde de la production industrielle distingue généralement trois types de procédés de fabrication : les types batch, continus et discrets. Mais la distinction entre les diverses catégories n'est pas toujours bien tranchée.
Les procédés de type discontinu ou batch ou encore par lots transforment des quantités déterminées de matière en produit fini selon des procédures (recettes) spécifiques du cycle donné, sur une période de temps finie, en utilisant un ou plusieurs équipements. La taille des équipements détermine directement la production du cycle. Il s'agit souvent d'ateliers « flexibles » ou multi-produits. Ces procédés se rencontrent surtout dans la chimie des spécialités, l'agroalimentaire et la pharmacie.

Les procédés de type Continu ont une phase principale de production relativement longue par rapport aux autres (démarrage, arrêt). Le volume de la production dépend essentiellement de la durée de cette phase. La matière première « entre » dans l'unité, le produit fini en ressort sans discontinuité. Les matières susceptibles d'être produite par une unité de ce type ont des caractéristiques voisines. La production d'énergie, la plupart des procédés mis en ?uvre dans le raffinage et la chimie de base sont de ce type.
Les procédés de type Discret se rencontrent dans le domaine manufacturier. Ils regroupent des domaines aussi variés que la fabrication mécanique par assemblage ou transformations successives, la construction (automobile, aéronautique, immobilière?). Les concepts sont proches de ceux des procédés de type batch. La distinction provient surtout de la séparation entre les communautés culturelles.
Les différentes fonctions du MES
Les divers acteurs du secteur, éditeurs, fabricants et industriels, ont essayé de mettre de l'ordre dans l'offre et ont créé des organisations sectorielles chargées de clarifier le secteur. Le terme MES a été créé par le MESA, association américaine à but non lucratif, fondée au début des années 90. Elle a défini le MES en le caractérisant par une liste des 11 fonctions :
- Gestion des ressources
- Ordonnancement
- Cheminement des produits et des lots
- Gestion des documents
- Collecte et acquisition de données
- Gestion du personnel
- Gestion de la qualité
- Gestion du procédé
- Gestion de la maintenance
- Traçabilité et généalogie
- Analyse des performances
Cette liste très complète est bien sûr un cadre général. Peu d'entreprises implantent l'ensemble des fonctions et peu d'éditeurs fournissent une offre complèt
Les standards et les normes du MES
L'ISA, association professionnelle américaine impliquée dans la normalisation des domaines des automatismes est à l'origine de plusieurs standards et normes. La norme S88 a permis de modéliser finement les procédés de type batch. Elle a été extrapolée vers d'autres procédés, en particulier les procédés manufacturiers. Ce qui a abouti à la définition d'une norme applicable à tous les procédés : la norme S95.
La norme S95 vise à formaliser le système d'information du système de production et ses échanges avec les autres domaines de l'entreprise. Elle est conçue pour tous les types de production et n'impose donc pas de modèle d'organisation de l'entreprise ni d'architecture du système de production. Elle suggère toutefois un modèle physique de l'entreprise extrapolé à partir de la norme S88 et une définition des fonctions et des flux d'informations basée sur des modèles existants. La norme S95 est maintenant une norme internationale reconnue par l'ANSI et c'est la référence de tous les acteurs du MES.
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La connaissance du procédé devrait être la première étape de la mise en ?uvre d'un MES. Ce n'est pas toujours le cas : la norme S95 peut y aider. Elle permet de définir une installation physique comme un segment de procédé composé d'une ou plusieurs unités ou cellules de travail. Et elle modélise les flux entrants et sortants au niveau de ces sous-ensembles. Elle peut séparer la modélisation procédurale du modèle physique : un procédé se compose d'étapes qui requièrent du segment de procédé des capacités d'exécution.
Les fonctions du MES ne sont pas nouvelles. Et certaines se retrouvent même dans d'autres domaines comme les ERP. En outre, toutes ne sont pas au même niveau. Certaines sont des opérations comme l'ordonnancement, la gestion du procédé ou la gestion du personnel. D'autre sont des services transversaux comme la gestion des ressources, la traçabilité ou l'acquisition des données. La notion de MES n'est donc pas facile à percevoir : c'est avant tout un système dans lequel l'interactivité joue un rôle central.
La norme S95 met précisément en avant la nécessité des interactions entre les différents composants d'un MES. Sans interactivité forte entre eux, le système de production risque de ne pas répondre au problème posé. Par exemple, elle peut mettre en évidence les relations entre un manque de qualité périodique et des opérations de maintenance. Elle peut aussi améliorer la traçabilité si elle est liée à la gestion des équipes et aux informations de gestion du procédé.
Ce qu'offre le MES aux différents acteurs de l'entreprise
Tous les acteurs de l'entreprise ont des avantages à tirer du MES. Le responsable de production est concerné au premier chef. Avec le MES, il peut affecter les compétences de manière adéquate, organiser les équipes, obtenir des tableaux de bord en temps réel, suivre des indicateurs de performance, gérer les aléas (absences, ruptures ressources), contrôler les consommations de matières et donc respecter les délais.
Le MES met à disposition de l'opérateur les documents de production, permet de voir en temps réel l'évolution des indicateurs de la journée, permet de réagir avec toutes les informations utiles en cas de problème.
Pour le responsable qualité, le MES permet d'analyser les dysfonctionnements, de participer à l'élaboration des processus et de suivre leur utilisation en temps réel, permet de travailler « main dans la main » avec la maintenance. Il permet de respecter le cahier des charges du client, la réglementation, les obligations en matière de traçabilité, l'optimisation du processus qualité, les labels de certification.

Pour le responsable de la maintenance, le MES donne les temps d'arrêt de chaque machine en indiquant les causes, prévient des dérives et des paramètres critiques de fonctionnement, informe du planning de production et de maintenance, permet de gérer et programmer les interventions des équipes de maintenance, de travailler « main dans la main » avec la production. Il permet aussi d'effectuer l'analyse par corrélation des dysfonctionnements (types de produits, température), le suivi d'indicateurs de fonctionnement, de comprendre les pannes, d'aider à fiabiliser les équipements, à planifier les tâches de maintenance.
Avec le MES, le responsable des achats et approvisionnement connaît la valeur en temps réel des stocks (quantité, localisation) grâce à la mise à jour de l'ERP, les mouvements de matière entre les magasins et les ateliers, la qualité contrôlée à tous les stades de la fabrication.
Le MES informe le commercial de l'avancement réel de chaque commande, l'informe du planning de production actualisé en temps réel, lui permet de partager les mêmes informations avec tous les acteurs concernés. Il peut donc informer son client de l'avancement de sa commande, s'engager sur des délais et donc transmettre une image sérieuse et valorisante de sa société.
Quant aux clients, ils disposent à tout moment d'un planning de production actualisé, ils connaissent le coût réel des produits, ont la garantie de la traçabilité des produits et matières premières ainsi que du respect des normes. Et ils peuvent dialoguer efficacement avec la gestion commerciale. Réactivité, transparence, respect des délais, informations sur la traçabilité : l'image de la société en sort renforcée
Enfin la direction bénéficie d'une synthèse sur les informations de production. Avec le MES, elle maîtrise les prix de revient (bilan matière), les capacités de production, la réactivité de l'outil de production, les indicateurs de performance.
Les acteurs du marché
Les éditeurs de logiciels de MES proposent des gammes de logiciels modulaires qui assurent la plupart des fonctions du MES ainsi que d'autres fonctions comme la supervision, mais aussi la gestion de domaines spécialisés. Beaucoup sont aussi des fabricants d'automatismes, d'automates programmables et d'autres types de matériels de contrôle-commande.
L'offre se structure sous forme de suites logicielles cohérentes : plateforme système Wonderware, plates formes intelligentes de GE Fanuc, plate-forme de services FactoryTalk de Rockwell Automation, gamme Simatic IT, modulaire et intégrée, de Siemens, plateforme adaptative FlexNet d'Apriso. Les partenariats entre les éditeurs de solutions MES et les éditeurs d'ERP sont une réalité du terrain : chacun de son côté, Wonderware, Siemens et ABB ont établi un partenariat avec SAP.
Des intégrateurs gèrent les projets sur le terrain comme Clemessy, spécialiste des projets industriels ou Courbon, spécialiste du pilotage et de la traçabilité des processus industriels, mais aussi éditeur de logiciels de MES, impliqué dans des industries variées : pharmacie, chimie, cosmétique, agroalimentaire, automobile, environnement...
Le MES augmente la réactivité en temps réel de l'entreprise, permet de ne plus travailler dans l'urgence, transforme les contraintes (législation, cahier des charges client, qualité) en avantages compétitifs, assure l'unicité et la fiabilité des informations, favorise le dialogue entre les services. C'est un outil d'amélioration continue qui met à jour les informations de l'ERP et augmente l'agilité de l'entreprise.
René Beretz
Pour plus de renseignements, consulter le site du club MES France