Comme la plupart des éditeurs d'ERP, Netsuite propose des "success stories" sur son site Web (américain). Elles sont classées par secteur d'activité, par domaine fonctionnel ou par géographie. Mais ce que ne font pas la plupart de ses concurrents, c'est les classer par "application remplacée" : Epicor, Microsoft, MYOB (Mind Your Own Business : un éditeur australien), Oracle, Quickbooks, Sage et SAP font partie de cette liste de "win-back". Car Netsuite est très agressif et très présent dans de nombreux pays : jusqu'ici, la France, où l'éditeur n'était pas représenté, faisait figure d'exception. Pourtant, parmi les 24 000 entreprises et filiales qui s'appuient aujourd'hui sur Netsuite pour gérer des processus stratégiques complexes dans le cloud, il y en a déjà 170 françaises, dont Mazars ou Peopledoc.
Netsuite a été créée en 1998 et propose depuis toujours des solutions ERP, de CRM et de commerce électronique dans le cloud. Elle a donc une antériorité certaine sur le champion européen en la matière, SAP, avec Business ByDesign, qui a officiellement été lancé en 2007. Pourtant, jusqu'ici l'américain était dramatiquement absent du paysage hexagonal.
Nicolas de Taeye, en charge de cette activité, explique : "Netsuite a une grande ambition sur toute la planète. Mais il était sans doute un peu plus difficile pour eux de s'implanter en France qu'au Royaume-Uni, par exemple. C'est alors qu'ils se sont dit 'pourquoi ne pas contacter le leader du marché en France pour lui proposer un contrat de distribution en exclusivité ?'". Et c'est ainsi que l'éditeur a contacté Capgemini.
Une filiale dédiée
De fil en aiguille, les négociations ont avancé et un accord a fini par se conclure. Aux termes du contrat, Capgemini est devenu en octobre dernier distributeur et partenaire exclusif de Netsuite en France. Dans le cadre de cet accord, Capgemini a mis en place une filiale spécifique, baptisée Cloud ERP Solutions (CES). Et c'est Nicolas de Taeye qui en est le directeur exécutif. Cette entité inclut une équipe commerciale qui bénéficie du support commercial et marketing de Netsuite. Parallèlement, la constitution d'équipe de consultants pour la mise en œuvre de la solution sera également nécessaire. Mais CES n'en est pas encore là : pour l'heure, aucun contrat n'est encore en cours, même si un certain nombre de prospects sont "chauds". Aujourd'hui, l'équipe compte 12 personnes dédiées, mais devrait monter en puissance dans les mois qui viennent.
À noter que le contrat de Capgemini ne concerne pas les 170 utilisateurs français actuels, qui restent des clients directs de Netsuite. "Capgemini sera bien sûr capable de faire évoluer leur solution ultérieurement. Mais CES s'adresse avant tout à de nouveaux clients", souligne Nicolas de Taeye.
Nicolas de Taeye, directeur exécutif de la filiale Cloud ERP Solutions et vice-président de Capgemini France
Cette filiale adresse le marché français et plus particulièrement quatre secteurs d'activité : le high tech, la grande distribution, le commerce de gros et les services. "La solution étant en mode cloud, elle permet d'adresser des tailles d'entreprises variables. Notre cible prioritaire est les ETI et les PME ainsi que les filiales de grands groupes", précise Nicolas de Taeye.
Ce dernier ne cache pas ses ambitions pour la France, qui sont importantes : "nous voulons devenir le n°1 des ERP dans le cloud dans un délai raisonnable", affirme-t-il. Et quand on parle de "délai raisonnable" dans le cloud, ce n'est pas à horizon cinq ans, mais l'an prochain. "Nous visons 10 % de ce marché d'ici fin 2017", poursuit notre interlocuteur, qui pour étayer son optimisme constate que "beaucoup de nos clients considèrent actuellement que le cloud n'est plus une option mais un must".
La solution
Efficacité du cloud, intégration entre ERP, CRM et e-commerce, visibilité grâce aux tableaux de bord, accès ubiquitaire, adaptabilité et "scalabilité" sont quelques uns des avantages mis en avant par l'éditeur. "C'est un outil agréable à montrer, car il a été conçu pour le Web", commente Nicolas de Taeye. "Bénéficiant d'une ergonomie moderne, il permet d'augmenter la productivité".
Parmi les points forts de la solution, son caractère international et le bénéfice de sa longue expérience. "Netsuite est présent dans 70 pays et disponible en 19 langues", précise le dirigeant. "D'ailleurs, un certain nombre de localisations du produit ont été faites avec la collaboration de Capgemini".
Les solutions de Netsuite destinées à l'Europe ne résident pas dans des datacenters aux États-Unis : les données sont hébergées en Irlande et aux Pays-Bas.
Le marché
Les "vrais" ERP dans le cloud, c'est-à-dire répondant aux quatre grands principes fondamentaux du cloud (paiement à l'usage, mutualisation, ouverture et ressources en libre service) se comptent sur les doigts d'une seule main, même si la plupart des éditeurs d'ERP clament aujourd'hui haut et fort qu'ils disposent d'une solution dans le cloud.
Pour Capgemini et CES, le marché qui est pris en considération est celui sur lequel Netsuite propose des solutions, c'est-à-dire la finance, la chaîne logistique, le CRM et le e-commerce. "Ce dernier est un facteur différenciateur de Netsuite, car c'est avec ce domaine fonctionnel que tout a commencé", précise Nicolas de Taeye.
"Nous tablons sur une croissance de ce marché", ajoute-t-il. "Nous prenons aussi en compte la notion de vitesse de transformation du marché en France, car nous n'allons pas tarder à y voir apparaître d'autres acteurs".
L'écosystème
Les revenus de CES proviendront essentiellement d'un pourcentage du montant des souscriptions. "C'est un modèle win-win incitatif pour Capgemini et pour Netsuite", estime notre interlocuteur, qui ne se lance toutefois pas à dévoiler ses objectifs de chiffre d'affaires. "Nous cherchons surtout à vendre de la valeur. Mais les objectifs de chiffre d'affaires ont été discutés et acceptés par Netsuite et permettent de dimensionner l'effort d'investissement de Capgemini". Car le gros intérêt de cet accord, c'est bien sûr que derrière CES il y a toute la force de frappe de Capgemini, même si "Netsuite participe à l'effort, notamment sur le marketing".
Le premier partenaire intégrateur de CES sera bien sûr Cap, mais la filiale entend bien construire un véritable écosystème et travailler avec d'autres intégrateurs. "Nous avons des contacts avancés avec d'autres acteurs, qui se sont déclarés intéressés", confie Nicolas de Taeye.
Les actions de prospection ont apparemment démarré tous azimuts : "nous avons commencé il y a quelques semaines un tour des commerciaux de Capgemini, afin de sensibiliser et d'évangéliser les équipes. Quant aux prescripteurs et partenaires, nous allons leur organiser des webinars, des démonstrations et des petit-déjeuners de présentation. Pour être efficaces, nous avons aussi mis sur pied une équipe de télémarketing", poursuit le dirigeant qui, s'il ne dévoile pas le chiffre du budget marketing alloué à ces actions, admet "qu'il est conséquent. Il va nous permettre de participer à des salons, de réaliser des livres blancs etc.".
"L'arrivée de Netsuite va bénéficier au cloud en général : elle va certainement bousculer le secteur. Et le fait qu'elle se fasse avec Capgemini est de nature à rassurer beaucoup les gens : nous sommes un acteur local et majeur, pas un obscur éditeur américain", conclut Nicolas de Taeye.
Benoît Herr