Un peu plus d'un an après avoir soufflé sa dixième bougie, Comarch France entend passer à la vitesse supérieure. Si la Pologne représente encore la moitié des quelque 250 millions d'euros de chiffre d'affaires de l'éditeur fondé à Cracovie en 1993, l'Hexagone est en effet amené à devenir, avec l'Allemagne, l'un des moteurs de sa stratégie d'internationalisation. Au moins sur le périmètre européen, où Comarch dispose déjà d'une quinzaine de filiales. Au-delà, le groupe, qui emploie environ 5 000 collaborateurs, envisage plutôt de nouvelles implantations, pour compléter sa présence actuellement limitée à moins de dix autres pays en Amérique du Nord (États-Unis, Canada), en Amérique Centrale et du Sud (Brésil, Chili, Panama), au Moyen-Orient (Émirats arabes unis) et en Asie (Chine, Malaisie, Turquie). Son ambition ? Devenir un acteur de référence dans le monde des ERP, toujours sur le segment des grosses PME qu'il dominerait outrageusement dans son pays d'origine avec "près de la moitié du parc installé", mais aussi sur celui des ETI et même des grands comptes.
Matthieu Lacroix, responsable marketing de Comarch en France pour la branche ERP et BI
Pour autant, le marché de l'ERP est loin d'être sa seule cible. Comarch souhaite également se faire une place dans de nombreux autres domaines, à la faveur de l'impressionnante politique de diversification engagée depuis plusieurs années pour enrichir son offre. D'abord spécialisé dans les solutions à destination des acteurs des télécoms, le groupe s'est ensuite orienté vers le monde du progiciel de gestion intégré, avant de s'intéresser à tous les sujets périphériques : depuis les briques fonctionnelles autour du CRM (relation clients, fidélisation), de l'e-commerce, de la SFA (forces de vente), etc. jusqu'aux couches plus techniques de Business Intelligence (décisionnel), de l'EDI et de la facturation électronique, de la GED (gestion de documents et de contenu). Si la distribution reste la locomotive, avec près de la moitié du portefeuille de clients, tous les secteurs d'activité sont concernés : industrie, énergie, transports, tourisme, etc.. D'ailleurs, Comarch a également structuré une offre de solutions à destination du secteur de la banque et des services financiers.
Une organisation structurée en deux grandes branches
Le portefeuille ERP, qui couvre nativement tous les métiers de l'entreprise (comptabilité, finance, gestion commerciale, gestion d'affaires, gestion des stocks, logistique, etc.), repose sur deux produits phares : ERP Standard, une version optimisée pour les entreprises évoluant principalement dans les secteurs de la distribution, du négoce et de la vente en ligne, et ERP Enterprise, davantage orientée vers la gestion de production dans le monde industriel. Au cours des dernières années, l'éditeur a encore étendu ses activités, principalement sur le terrain de la e-santé et des villes intelligentes, en s'appuyant sur les avancées autour de la mobilité et de l'Internet des objets. Il souhaite en particulier développer l'utilisation des capteurs "beacon" à travers ses applications pour démultiplier les usages, tant professionnels que personnels, dans les domaines des transports, de la logistique, du marketing, du suivi de produits ou de la localisation des individus.
En France, où Comarch compte aujourd'hui 70 collaborateurs, l'offre est plus uniforme. L'organisation de la filiale et le portefeuille de solutions ont été structurés en deux grandes branches. La première, la branche "ERP et Business intelligence", concentre le cœur de l'offre de gestion intégrée et les outils décisionnels. La branche "Commerce & Services" regroupe, quant à elle, les solutions dans les domaines du CRM et de la fidélisation, de l'e-commerce, de la SFA (forces de vente), de l'EDI ou encore de la GED (gestion de documents et contenu). Comparée à l'offre protéiforme du groupe, ce schéma plus resserré garantit une meilleure visibilité. "L'orientation vers des solutions avant-gardistes ou très spécialisés restent l'affaire de la maison mère", explique Matthieu Lacroix, responsable marketing de Comarch en France pour la branche ERP et BI. "Elle répond aux nouvelles opportunités, sur des marchés en plein essor, ou aux centres d'intérêt du fondateur et PDG du groupe, Janusz Fillipiak". Chercheur issu de l'université des sciences et des technologies de Cracovie, sa curiosité semble en effet insatiable.
L'ouverture prochaine d'un datacenter dans l'Hexagone
Pour se développer sur le marché français, Comarch a choisi plusieurs leviers. Il a d'abord renforcé son implantation à Grenoble, où il disposait déjà, en complément de son site principal de Lezennes (Nord), d'un centre de support et développement. "Depuis fin 2015, une petite équipe de quatre commerciaux et ingénieurs avant-vente a pour mission de développer nos activités ERP et BI dans le grand sud-est", détaille Matthieu Lacroix. Dans le prolongement, l'éditeur entend développer ses réseaux de partenaires. "Pas pour la distribution", prévient Matthieu Lacroix. "En France, nous assurons en effet les ventes de notre offre ERP en direct et s'il nous arrive de nous appuyer sur des cabinets de conseil, cela reste très marginal, au cas par cas". En revanche, pour l'aider à accompagner ses clients de façon plus proche, la filiale compte se construire un réseau de partenaires intégrateurs, notamment dans les territoires mal couverts.
Mathilde Roussel, responsable marketing de Comarch France pour la branche commerce & services
Parallèlement, l'éditeur a relancé son projet de datacenter. "Initialement programmé en 2015, le projet avait été repoussé pour introduire une dimension écodurable", assure Mathilde Roussel, responsable marketing de Comarch France pour la branche commerce & services. "L'absence d'un tel centre en France n'était pas rédhibitoire", poursuit-elle. "Mais nous allons pouvoir satisfaire nos clients désirant que leurs données sensibles restent dans l'Hexagone". Jusqu'ici, elles étaient hébergées dans l'un des cinq datacenters européens de Comarch, en Allemagne, au Luxembourg ou en Pologne, en plus de ceux qu'il exploite via une dizaine de partenaires aux États-Unis, en Amérique du Sud et en Asie. "Ce datacenter va aussi nous permettre de renforcer notre offre de services informatiques, pour l'hébergement de serveurs et les prestations associées", complète Matthieu Lacroix. Alors que les prestataires auraient été retenus, les travaux devraient commencer dans les prochaines semaines, pour une mise en service au début 2017.
Adapter l'offre à la mobilité et intégrer des solutions tierces
En termes d'offre, la filiale française va surtout profiter du lancement dans l'Hexagone de la solution décisionnelle BI Point. Dédié à l'exploration et la visualisation des données, cet outil full Web se positionne comme un concurrent à ceux proposés par Tableau Software ou Qlik. "Alors qu'il s'agit de rendre la définition d'indicateurs et de rapports accessible aux directions métiers, nous estimons avoir une plus grande expérience que nos concurrents sur les aspects techniques de la BI", explique Matthieu Lacroix. Enfin, Comarch continue d'adapter ses progiciels aux usages en mobilité et d'intégrer des solutions tierces pour être en mesure de répondre à des besoins très pointus. "En plus de connecteurs vers Magento ou Prestashop dans le domaine de l'e-commerce, par exemple, nous pouvons être amenés à proposer en standard des outils très spécifiques initialement développés par certains de nos clients", détaille-t-il. D'ajouter : "Avec tous ces investissements sur le marché français, qui traduisent une vraie confiance de la direction dans notre filiale, nous croyons beaucoup dans son développement et pouvons avoir de fortes ambitions dans les années à venir".
Parmi les derniers projets dans le domaine de l'ERP, Comarch met en avant celui mené avec le loueur français Kiloutou dans le cadre de son expansion internationale, notamment… en Pologne. Ou celui du chausseur britannique Clarks, qui souhaitait équiper sa filiale française. Une société spécialisée dans les vêtements et accessoires de surf bien connue achève quant à elle le déploiement de Comarch ERP Standard pour relier sa plate-forme d'e-commerce et ses boutiques. Du côté des offres commerce & services, Mathilde Roussel met en avant le projet du PMU, portant sur la refonte de son système de fidélisation autour de Comarch Loyalty Management, et celui du groupe Adeo (Leroy Merlin, Weldom, etc.), "le deuxième plus important système EDI en Europe". Autre initiative prometteuse : l'investissement de 8 millions de dollars consenti par Comarch dans Thanks Again, aux États-Unis. La prise de contrôle de cette organisation qui développe des solutions de gestion autour de la fidélité et de l'engagement clients (parkings, zones commerciales, espaces de restauration...) dans les aéroports, ouvre de nouvelles perspectives.
Thierry Parisot