Pas moins de trois sessions (sur 13 au total) étaient dévolues aux ERP lors de l'événement annuel du CXP Group, à Paris : "Choisir un ERP en 2016 : les (bonnes) questions à se poser", "Améliorer le pilotage et la performance de l'entreprise par les nouveaux usages" et "Faut-il opter pour les ERP de nouvelle génération et les offres Cloud ? Quelles caractéristiques, quelle promesse ?".
Faut-il adopter un ERP dans le cloud ?
Sans surprise, dans la session "Faut-il opter pour les ERP de nouvelle génération et les offres cloud ? Quelles caractéristiques, quelle promesse ?", les intervenants présents (Comarch, Microsoft Dynamics et Netsuite) étaient plutôt consensuels et en faveur de l'adoption d'une solution dans le cloud, puisqu'ils en proposent tous. L'offre de Netsuite est d'ailleurs exclusivement cloud.
"Les PME s'intéressent de plus en plus au cloud, notamment pour les avantages de l'abonnement", commentait Estelle Delessard, directrice du marketing produits Dynamics ERP, qui était venue accompagnée d'un client en la personne de Cyrille Sidjouo, directeur de projet chez Viwone, une toute société nouvelle, qui propose des casques audio. "Le fait de pouvoir tester gratuitement les produits Microsoft a eu une grosse influence, d'autant que nos équipes ne sont pas pléthoriques", expliquait ce dernier. "Et l'avantage d'une solution locative est qu'on peut en sortir si on n'en est pas satisfait".
Lors de la session "Choisir un ERP en 2016 : les (bonnes) questions à se poser", Patrick Rahali, directeur des études ERP au CXP, qui animait les débats, n'a pas manqué de poser celle du cloud, qui ne figurait portant pas, ou à peine, dans le descriptif de la session. Il est intéressant de constater que les avis étaient très différents, dans ce panel réunissant surtout des intégrateurs et des utilisateurs. Et même Isabelle Saint-Martin, chef de marché chez Sage, seule représentante d'un éditeur autour de la table, a estimé que "le cloud est un scénario parmi d'autres". Pour Christophe Richer, directeur général de Gfi Infogen Systems, "le cloud pour le cloud n'a pas d'intérêt". Mais c'est Ahmed Mahcer, directeur général de TVH Consulting, intégrateur de SAP, Sage et Dynamics, qui a émis l'avis le plus sceptique : il estime que "le cloud est indiqué pour certaines typologies d'entreprises et de besoins. Mais d'une façon générale, nous restons dubitatifs et la première chose à étudier, ce sont les clauses de réversibilité".
Lors de la session "Améliorer le pilotage et la performance de l'entreprise par les nouveaux usages", Frantz Killi, directeur de mission au CXP, expliquait que les entreprises devaient, pour améliorer leur performance, développer leur agilité, renforcer la productivité de leurs collaborateurs et anticiper leur transformation numérique. C'est ce que permettent les nouveaux usages des ERP, au croisement de l'ergonomie, du collaboratif, de la mobilité et du fonctionnel. Et d'illustrer son propos à travers un exemple concret, celui du PIC (Plan Industriel et Commercial). Les éditeurs présents (Divalto, IFS et Microsoft), se sont ensuite livrés à des démonstrations de leurs produits. S'ils ont bien mis en avant les fonctionnalités et les avantages particuliers de leurs différentes solutions, on peut s'étonner qu'aucun n'ait, par exemple, illustré son savoir faire en matière d'applications mobiles "terrain".
Les bonnes questions à se poser
Cette session réunissait, outre Ahmed Mahcer, Isabelle Saint Martin et Christophe Richer, déjà cités, deux utilisateurs : Hervé Petit, DSI de la branche légumes du groupe Agrial et David Langevin, DSI de Maisonneuve.
Patrick Rahali a planté le décor en insistant sur la démarche globale : audit de l'existant en même temps que répondre à des questions comme "l'existant peut-il évoluer ou faut-il le changer", "allons-nous choisir seuls ou nous faire accompagner ?" ou encore "quelle évolution pour l'entreprise dans les 10 ans ?", sans oublier les notions de coûts et de retour sur investissement potentiel, de périmètre du projet et de niveau d'automatisation des processus. "Les grandes questions sont d'ordre financier, technologique, métier, c'est-à-dire fonctionnel, et concernent les services (hébergement, consulting etc.)".
Le panel de la session "Choisir un ERP en 2016 : les (bonnes) questions à se poser". De G à D : Ahmed Mahcer, Hervé Petit, Christophe Richer, Isabelle Saint Martin et David Langevin
"Déployer un ERP, c'est surtout re-réfléchir a l'organisation et aux processus", confirme Hervé Petit. "Auparavant, on se préoccupait des besoins des utilisateurs puis on cherchait une solution correspondante sur le marché. Mais le premier critère de choix d'un ERP, c'est la pérennité. L'éditeur sera-t-il encore là dans 10 ans ? Et la question vaut aussi pour l'intégrateur et pour les technologies. Aujourd'hui, il faut avoir une approche par le ROI et non par les fonctionnalités. Le vrai directeur du projet ERP, c'est la DG, qui a besoin de chiffres, pas les départements. Un ERP est avant tout un outil de pilotage d'une entreprise".
Isabelle Saint Martin se déclare complètement en phase avec ce qui précède : "le rôle de l'ERP est vraiment de supporter l'entreprise dans la durée. Il faut donc s'interroger non pas sur l'exhaustivité des fonctionnalités mais sur la rapidité d'implémentation et sur la flexibilité. Il faut aussi des projets accessibles, rapides à mettre en œuvre mais aussi adaptables aux besoins de l'entreprise, car chaque entreprise est unique", ajoute-t-elle.
L'intégrateur, acteur clé
Pour Ahmed Mahcer, "ce qui fait l'échec d'un projet, c'est rarement la solution, mais souvent l'intégrateur. Le choix de l'intégrateur est donc primordial. Mais il faut aussi que l'entreprise se dote des moyens nécessaires à la réussite du projet".
Maisonneuve est une entreprise familiale située en Mayenne, qui se spécialise dans le négoce et le transport des aciers. La particularité de cette PME de 200 personnes est de disposer d'un stock permanent de 50 000 tonnes (cinquante mille tonnes) de produits métallurgiques couvrant plus de 3 000 références immédiatement disponibles. "Dans notre contexte, les commandes doivent être préparées très rapidement", explique David Langevin, son DSI.
Pour l'ERP, "nous avons travaillé avec un conseil, car nous n'avons pas l'habitude de tels projets", poursuit David Langevin. "Dans un premier temps, il convient de bien choisir son conseil, et d'impliquer immédiatement la DG au plus haut niveau. Dans un deuxième temps, il faut aussi impliquer l'éditeur, même si on a fait appel à un intégrateur". C'est en effet l'intégrateur qui a fait la différence, dans le cas d'espèce : "nous avons eu beaucoup de mal à choisir entre Dynamics AX et Sage X3", se souvient le DSI. "Finalement, comme nous ne nous entendions pas avec l'intégrateur côté Dynamics AX, nous sommes revenus vers Sage X3". Lorsqu'il indique qu'il "ne s'entendait pas" avec l'intégrateur, cela concerne surtout les conditions financières du projet : Gfi, qui a finalement mené le projet, a non seulement accepté de travailler au forfait, mais aussi de commencer le paiement des licences non pas au démarrage du projet mais lors de sa mise en production.
Comme pour confirmer que chaque entreprise est un cas particulier, Hervé Petit, l'autre utilisateur présent autour de la table, estime que "le forfait est peu adapté, car le projet ERP est un projet de transformation. C'est un voyage et, en cours de route, se posent un certain nombre de questions qui vont en modifier le périmètre".
S'il appartient au client de choisir son intégrateur, l'inverse est vrai également : un intégrateur responsable ne se lancera pas dans n'importe quel projet ERP uniquement parce que cela va générer du chiffre d'affaires. Il faut qu'il soit convaincu que le projet sera un succès. Pour Ahmed Mahcer, "il faut que le client ait un bon projet. Si, par exemple, l'entreprise a consulté 18 éditeurs, cela signifie qu'il ne sait pas ce qu'il veut et pour nous c'est un critère de no-go". "Le client mène-t-il un projet pour aujourd'hui ou pour les 10 ans à venir ?", ajoute Christophe Richer. "Un bon client est un client qui 'veut', qui ait la volonté de réussi. Il faut donc qu'il s'en donne les moyens", conclut Hervé Petit.
Benoît Herr