Le marché français des ERP regorge d'éditeurs indépendants, souvent régionaux, à taille humaine, qui, depuis des décennies, tiennent tête avec brio aux grands éditeurs internationaux. Qualiac en est l'un des plus brillants exemples. Pour ces éditeurs, l'existence d'un club utilisateurs n'a ni plus ni moins d'intérêt que pour les géants allemands ou américains. C'est pour cela que l'éditeur auvergnat a, il y a 25 ans déjà, poussé à la création de son propre club utilisateurs.
Bien sûr, ce club ne saurait rivaliser en termes de taille avec les USF (Utilisateurs de SAP Francophones) et autres AUFO (Association des Utilisateurs Francophones d'Oracle) : le club utilisateurs Qualiac compte aujourd'hui 80 membres, dont quelques noms prestigieux comme l'INA ou l'Opera de Paris, soit tout de même une bonne moitié des entreprises utilisatrices de la solution. Pour mémoire, Qualiac compte quelque 160 collaborateurs pour un chiffre d'affaires de l'ordre de 19 M€ (prévisions 2016).
Gwenhaël Hébert (de la STIME, la filiale informatique du groupement des Mousquetaires) est la présidente du club et Benoît Billot (Le Figaro Classifieds) son vice-président. Association de type "Loi de 1901", les intérêts pour une entreprise utilisatrice à y adhérer en versant ses 500 euros de cotisation annuelle sont nombreux : information et suivi des évolutions technologiques et fonctionnelles des produits de la gamme (matériels, outils, applications), partage d'expériences échanges... Mais le club est aussi force de proposition auprès de l'éditeur, même si, comme le souligne Gwenhaël Hébert, "notre rôle n'est pas de dicter sa stratégie à l'éditeur". Selon une étude menée par le club lui-même auprès de ses adhérents, 77 % y voient l'occasion d'échanger expériences et bonnes pratiques.
Plutôt fonctionnel
Le rôle du club est aussi de favoriser et d'étendre le spectre d'utilisation dans le progiciel, d'infléchir les orientations et évolutions des constructeurs que ce soit en termes de matériels, de systèmes d'exploitation, de logiciels systèmes ou d'outils.
Pas moins de quinze commissions sont actives au sein du club, parmi lesquelles celles s'occupant des achats (stockés et non-stockés), des ventes, du secteur public, de la santé, de la GPAO, des stocks, de la maintenance, des finances, des immobilisations (étonnamment NdlR), du RIA (Rich Internet Application), c'est-à-dire de l'ergonomie, de la dématérialisation... Toutes répondent à des besoins utilisateurs et au sein de chaque commission siège un représentant de l'éditeur : celui-ci est là pour chiffrer les demandes et déterminer comment y répondre : "le club est autonome et nous ne sommes pas intrusifs", déclare Claude-Emmanuel Chapelan, responsable avant-vente et partenariats technologiques chez Qualiac.

Mais aucune de ces commissions ne concerne la technique, comme les performances de la base de données ou le cloud, par exemple. "il y en a eu par le passé, notamment sur l'archivage, les performances ou encore la possibilité de monter des data-warehouse. Mais il n'y en a plus pour le moment", constate Claude-Emmanuel Chapelan.
Pourtant, sur les bases de données, il y aurait un vrai sujet, au moins de vigilance : 80 % des utilisateurs de Qualiac tournent sous Oracle (le reste se répartissant sur SQL Server pour 15 %, puis sur Sybase et DB2. L'utilisation d'une base de données Open Source n'est pour l'instant techniquement pas possible car l'ERP repose sur les procédures stockées, une fonctionnalité peu probante sur les bases de données libres) et une grande proportion utilise cette base de données en mode runtime. Or, Oracle a récemment beaucoup augmenté ses tarifs de runtime pour certains éditeurs, dont SAP. Il semblerait que Qualiac échappe pour l'heure à cette hausse : "nous ne sommes pas touchés par cette augmentation tarifaire", déclare Claude-Emmanuel Chapelan. "Nous bénéficions d'une offre tarifaire agressive qui nous permet d'assurer la maintenance de niveaux 1 et 2. Ainsi, notre client n'a qu'un seul interlocuteur, pour l'ERP comme pour la base de données".
La pratique du co-développement
Selon l'étude citée plus haut, 79 % des adhérents du club estiment que celui-ci contribue à l'évolution des produits. De fait, l'éditeur a une démarche originale et alloue chaque année un quota de jours de développement au club, qui a ainsi les moyens d'apporter des améliorations mineures au produit : depuis cinq ans, 700 jours de développement ont ainsi été offerts au club, permettant d'intégrer 116 besoins utilisateurs au standard de l'application. "Nous sommes une société un peu singulière", estime Claude-Emmanuel Chapelan.
En 2016, ce sont 185 jours de développement qui ont été alloués au club. Le nombre de jours destinés à traiter un sujet est limité à une vingtaine, sans quoi cela devient un projet de développement à part entière. Et il fluctue également selon les années en fonction du plan d'édition de l'éditeur et de ses effectifs. "Mais nous essayons toujours de rester dans un volant de jours intéressant pour le club", précise Claude-Emmanuel Chapelan. Actuellement par exemple, l'éditeur mène un projet d'envergure avec le passage de toute sa solution en HTML 5, afin d'être agnostique et de s'adapter à tous les devices. "De fait, le nombre de jours alloués au club devra être adapté, mais sera quoi qu'il en soit proposé", affirme Claude-Emmanuel Chapelan.
À noter qu'il existe par ailleurs aussi des formules de co-financement des développements. Et le club appuie pour la certification de personnes au sein des intégrateurs : Qualiac passe en effet pour deux tiers de ses projets par ses partenaires, soit que la distribution et l'intégration soient réalisées entièrement par le partenaire, soit en mode hybride, Qualiac étant alors co-traitant ou sous-traitant, mais l'intégration étant réalisée par le partenaire. Peu nombreux, ces partenaires sont néanmoins d'importance et ont pour nom Deloitte, Capgemini, Syxperiane ou encore Sopra Steria.
Pas de cloud
"La STIME ne s'est même pas posé la question du cloud lorsque nous avons changé notre infrastructure", se souvient Gwenhaël Hébert, alors même que cette évolution est récente. Et Claude-Emmanuel Chapelan enfonce le clou : "sur tous les cahiers des charges que nous traitons, soit une cinquantaine dans l'année, il n'y a pas une seule demande de cloud. Je pense que c'est lié à notre cible, les ETI, qui n'est pas forcément prête à externaliser ses informations, notamment financières. En outre, le système est central et doit pouvoir interférer aisément avec les autres systèmes. Dans ce contexte, les DSI sont réticentes à faire le pas vers ce genre d'infrastructures".
En disant cela, notre interlocuteur fait toutefois la différence entre SaaS et cloud. "Qualiac ne souhaite clairement pas s'orienter vers le SaaS, car nous estimons que ne n'est pas un modèle économique que l'on peut proposer sur de l'ERP. En revanche, s'agissant du cloud, nous avons depuis plus d'un an une plate-forme qui tourne sur Amazon Web Services".
D'autres activités
Parmi celles-ci, la journée utilisateurs du club se confond avec l'assemblée générale annuelle : la dernière en date s'est tenue les 17 et 18 novembre à Paris. Elle rassemble en général la quasi-totalité des adhérents et l'édition 2016 n'a pas failli à la règle. En outre, le club va désormais également prendre part au "Qualiac Day", l'événement annuel de l'éditeur. "Nos relations avec l'éditeur sont cordiales et symbiotiques, même s'il y a eu parfois des points de friction, comme ça a pu être le cas à propos de la gratuité de l'intégration de nouvelles fonctionnalités légalement ou réglementairement obligatoires", se satisfait Gwenhaël Hébert.
Le club est également présent à travers son site Internet et sur Linkedin. Ses ambitions non dissimulées sont de recruter encore plus d'adhérents et de faire fonctionner encore plus de commissions, pour encore plus d'efficacité.
Benoît Herr