Avec plus de 20 000 clients dans 150 pays, l'éditeur équipe les entreprises de son ERP, bien sûr, mais aussi de ses solutions de RH, financières, de gestion de production et de gestion logistique. Le portefeuille de ses solutions est impressionnant et fruit des nombreuses acquisitions successives qui en ont fait une entreprise de 3 800 collaborateurs : Clientele (1997), CompuNet (2003), Scala (2004), CRS Retail (2005), NSB (2007), Spectrum (2010), Solarsoft Business Systems (2012), QuantiSense (2014), ShopVisible (2015) et le dernier en date, DocStar (janvier 2017) avec sa solution de gestion de contenus. Aujourd'hui, l'entreprise est détenue par le fonds d'investissement privé américain KKR (ex Kohlberg Kravis Roberts & Co) depuis 2016 et dirigée par Joe Cowan depuis quatre ans, qui a donc été maintenu à son poste. Ce changement d'actionnaire a néanmoins été l'occasion d'apporter du sang neuf dans l'équipe de direction, qui a beaucoup été remaniée, mais pas entièrement, cependant. "Le changement est constant. C'est la croissance qui est optionnelle", lançait Joe Cowan lors de son introduction. Il pensait évidemment à ses clients en disant cela, mais cela s'applique également à son entreprise. "Le changement, c'est le monde dans lequel nous vivons".
Joe Cowan, CEO d'Epicor
Dans son "Top 10 ERP Systems Rankings Report" 2017, le cabinet de conseil américain spécialisé dans le choix et la mise en place d'ERP Panorama Consulting Solutions place Epicor en tête du classement, devant Infor et SAP (cf. Et le gagnant est...), ce qui ne laisse pas de surprendre le lecteur européen en général et français en particulier. En effet, l'éditeur réalise de l'ordre de 80 % de son chiffre d'affaires, qui avoisine le milliard de dollars, aux États-Unis, le reste du monde n'intervenant qu'à hauteur de 20 %.
L'éditeur avait mis les petits plats dans les grands pour cette conférence en l'organisant dans ce qui est présenté comme rien moins que le plus grand hôtel du monde (hors hôtels liés au jeu). Ce sont quelque 3 800 personnes, clients, prospects, partenaires, collaborateurs et représentants de la Presse et des cabinets d'analyse qui se sont retrouvés au Gaylord Opryland Resort & Convention Center de Nashville, Tennessee.
Les produits sont si nombreux et divers que les conférenciers devaient être identifiés par un code couleur en fonction de la solution principale qu'ils utilisent. Prophet 21, par exemple, est une solution de gestion de la chaîne logistique, Eclipse une solution métier destinée aux plombiers, chauffagistes et entreprises d'électricité, Eagle une solution métier pour le commerce de détail, iScala un ERP issu du rachat de Scala en 2004 et destiné aux entreprises de taille relativement restreinte, de type PME, alternative à la solution phare qu'est Epicor ERP, qui se destine quant à lui à des ETI. Distribution, industrie, automobile, services sont les principaux secteurs auxquels l'éditeur s'adresse. Mais il propose aussi un certain nombre de solutions transverses, comme un SIRH ou une solution de e-commerce. CRM, analytique ou réseau social d'entreprise complètent la panoplie. Bref, faites votre marché chez Epicor, vous trouverez certainement chaussure à votre pied.
Un potentiel énorme
Et pourtant, lorsqu'on s'adresse à la filiale française de l'éditeur américain, on ne verra figurer aucun des produits précités à son catalogue, à l'exception de l'ERP. Même iScala, qui est pourtant utilisé par certaines entreprises françaises si l'on en croit les dirigeants de l'entreprise, n'y figure pas. Seul le MES, baptisé Mattec, vient compléter l'offre ERP dans l'hexagone.
Sabby Gill, executive vice président en charge de l'international chez Epicor
Au-delà de la frustration qu'engendre un tel décalage, on peut se demander pourquoi un choix aussi limité alors que le catalogue est colossal. Pour Robert Sinfield, directeur du marketing produits au niveau mondial, "il y a de bonnes raisons de proposer uniquement l'ERP dans certains pays : les problèmes de localisation, mais aussi les spécificités américaines de certaines solutions., par exemple. Il n'y a pas forcément besoin de tout le catalogue dans tous les pays". Pourtant, au Royaume-Uni, d'où sont gérées les opérations pour l'Europe, l'offre est plus large. "La situation est différente : nous avons des produits spécifiques, mais aussi d'autres qui n'équipent que des filiales de sociétés étrangères", explique Robert Sinfield.
D'ailleurs la structure en France n'a pas d'existence juridique : il s'agit d'un simple bureau destiné à gérer les relations avec les partenaires. Car le modèle en France repose entièrement sur une distribution en indirect. Un nouveau partenaire va être dévoilé dans les tout prochains jours et venir compléter l'écosystème hexagonal : nous ne manquerons pas de tenir nos lecteurs informés. Mais là encore, tous les pays ne sont pas logés à la même enseigne : la Scandinavie, l'Ukraine ou encore la Pologne, par exemple, sont sur un modèle de distribution directe.
La France demeure pourtant un marché important pour l'éditeur. Mais il semblerait que les investissements ne soient pas extensibles et pas forcément destinés à l'hexagone dans l'immédiat : "nous allons investir massivement en Afrique du Sud, en Inde et au Japon, cette année", assure Sabby Gill, executive vice président en charge de l'international. La France devra donc encore attendre un peu. Sabby Gill met aussi en avant un accord important signé ces jours-ci avec Dubaï South, un projet de ville nouvelle colossal au sud de l'aéroport international Al Maktoum devant accueillir quelque 4 000 entreprises qui auront toutes, si elles le souhaitent, accès aux logiciels d'Epicor, en particulier iScala. "Nous allons accueillir l'exposition universelle de 2020 et la capacité actuelle de l'aéroport, de 235 millions de passagers par an, sera portée à 255 millions", commente son excellence Ali Al Muwaijei, senior vice président de Dubai South, en charge du développement et de la stratégie. "Dubai South a toujours été un rêve et son excellence le sheikh Mohammed bin Rashid Al Maktoum l'a développé" Il s'agit du projet phare des émirats en matière d'urbanisme.
Matthias Müller-Wolff, en charge des ventes en Europe (hors Royaume-Uni), soit 42 pays au total, reste optimiste : "notre objectif global est de doubler notre chiffre d'affaires global en trois ans. Et nous sommes déjà dans la deuxième année de ce plan. Pour atteindre cet objectif, nous avons beaucoup recruté et bien entendu, c'est l'international qui offre le plus de potentiel pour cela".
Matthias Müller-Wolff, en charge des ventes Europe, Epicor
Le cloud à fond
L'ERP – comme tout le reste – est proposé dans le cloud depuis 2009 : mode hébergé ou vrai multi-tenant, les clients avaient le choix. Avec l'analytique, le cloud est considéré comme un pilier de la croissance. La conférence a été l'occasion d'annoncer un nouveau mode de fonctionnement dans le cloud, la base de données étant unique et spécifique de chaque entreprise utilisatrice, mais les programmes étant partagés. Baptisé "dedicated tenancy", ce mode se place entre le multi-tenant et le single-tenant et, selon Himanshu Palsule, chief technology and product officer, est promis à un bel avenir.
Epicor exploite ses propres datacenters, en Australie, au Royaume-Uni et aux USA. Mais dans d'autres régions, comme l'Asie, mais aussi en Europe et aux USA, il s'appuie sur Microsoft Azure et est en train de considérer AWS, sans pour autant que la diversification se fasse à outrance.
La conférence Insights a été l'occasion de nombreuses autres annonces, dont notamment la V10.1.600 de l'ERP, mais aussi d'avancées dans le domaine de l'Internet des objets ou de la réalité augmentée, que nous évoquerons dans un article à venir.
Benoît Herr
Pour un portrait détaillé de l'éditeur vu de la France, voir l'article "Epicor attendu au tournant".