La vedette de la journée a sans conteste été Olivier Ezratty, aujourd'hui conseil en stratégie de l'innovation et auteur de l'e-book "Les avancées de l'intelligence artificielle", mais aussi ancien directeur marketing et communication de Microsoft France. Après avoir rappelé que l'IA était née dans les années 1950 avec des systèmes heuristiques s'appuyant sur des moteurs de règles et qu'elle a connu des années fastes lors de la décennie 80, il a souligné que "ça s'était cassé la figure à la fin de la décennie parce qu'il était très difficile de tirer leur savoir-faire des gens des métiers pour établir les moteurs de règles". En effet, il fallait alors mettre à contribution les métiers pour établir ces règles, contribution à laquelle on comprend aisément qu'ils étaient réticents pour diverses raisons allant du manque de disponibilité à la protection du savoir-faire.
Olivier Ezratty
Dans les années 2000, sont apparues de nouvelles techniques comme le machine learning puis le deep-learning. "Mais ça n'a toujours pas permis de savoir gérer correctement les moteurs de règles... Toutefois, cette problématique est en train de se résoudre grâce aux volumes de données et aux possibilités de les analyser". Ce que suggère là Olivier Ezratty, c'est que l'analyse du Big Data et de diverses sources de données allant des réseaux sociaux aux données d'entreprise en passant par les sites Web, se substitue aux métiers. Du coup sont apparues ce qu'on appelle les plate-formes : Amazon Echo et Alexa, Watson d'IBM, Einstein de Salesforce, ou encore la plate-forme GPU Jetson de nvidia, car "l'IA fait évoluer à la fois le logiciel et le hardware, mais aussi les métiers". Pour Olivier Ezratty, ce sont ces plate-formes qui font véritablement la loi dans le monde de d'IA et non les utilisateurs ou les grands constructeurs, à l'instar de ce qui se passe dans le monde de l'automobile, où ce sont les grands sous-traitants qui imposent leurs produits aux constructeurs.
Et l'ERP
La transformation numérique était omniprésente dans toutes les sessions de ce forum, comme l'a souligné Laurent Calot, directeur général de CXP Group, en introduction : "toutes les interventions sont bâties autour de la transformation numérique". Et à travers elle les technologies qui "poussent" fort en ce moment, comme l'IA et l'IoT.
Les deux sessions consacrées aux ERP au cours de ce forum n'ont pas échappé à la règle. Intitulées "Soutenir les nouveaux business models dans le système d'information de gestion" pour la première et "Maîtriser son budget ERP tout en favorisant la transformation numérique de l'entreprise" pour la seconde, elles étaient toutefois l'une comme l'autre plus orientées organisation et stratégie que technologie.
De G. à D. : Eric Foulart - IFS, Isabelle Saint-Martin - Sage, Christophe Nuss - Divalto et Patrick Rahali - CXP Group
En introduction de la première, Patrick Rahali, directeur et market leader de CXP Group, a refait un point sur les évolutions rapides et disruptives qui caractérisent la transformation numérique et constaté que "en France, le numérique n'est pas toujours perçu comme une opportunité par les dirigeants. L'ubérisation fait peur aux entreprises". Et de citer une enquête de KPMG menée auprès de plus de 1 300 dirigeants dans le monde, selon laquelle 91 % des entreprises françaises craignent de se faire "ubériser" et 47 % pensent que le numérique est un phénomène passager, contre 30 % seulement qui jugent la transformation numérique comme stratégique ou essentielle. Une enquête sur la perception de la transformation numérique menée par PAC corrobore ces éléments : ils sont également 30 % à estimer qu'il s'agit d'une question de vie ou de mort dans les 3 ans à venir et 17 % à penser que c'est une question de vie ou de mort maintenant. Autrement dit, les entreprises françaises ne sont pas prêtes à faire leur transformation numérique, ce que confirmeront les intervenants lors du débat qui a suivi : "Non, elles ne sont pas prêtes. Elles ont beaucoup envie de le faire, mais ne sont pas prêtes. La transformation numérique n'est pas encore actée", commente Christophe Nuss, consultant ERP chez Divalto. "Il y a un stress et une prise de conscience, mais il n'est pas sûr que les entreprises soient prêtes", estime de son côté Isabelle Saint-Martin, chef de marché ERP chez Sage. " Le problème n'est pas la technologie, mais ce que veulent réellement faire les entreprises". Seul Eric Foulart, consultant avant-vente chez IFS, s'inscrit en faux : "De plus en plus d'entreprises nous demandent de présenter des solutions et des outils. En tous les cas dans l'industrie, qui est notre marché de prédilection. Mais l'industrie est sans doute en avance sur les autres secteurs", concède-t-il.
Patrick Rahali poursuit sur la nécessité pour l'entreprise de se réinventer au travers d'une nouvelle proposition de valeur passant par plus de services autour des biens, des services et de la donnée. Pour lui, les conditions sont réunies pour une transformation globale, au cœur de laquelle se trouve la donnée : les nouvelles technologies ont engendré de nouveaux entrants dont les offres permettent de gérer les connaissances et les volumes de données au travers de nouveaux services répondant aux nouveaux usages.
En termes d'impacts sur l'ERP et la gestion d'entreprise, "car l'ERP est toujours là", Patrick Rahali estime qu'il faut être "'customer centric' sur le front office (CRM etc.) et 'user centric' sur le back office (ergonomie, intuitivité et simplicité).
Le débat qui a suivi s'est clôturé sur la manière de faciliter l'obtention de budgets dans l'entreprise auprès des directions générales. Isabelle Saint-Martin souligne que "la transformation numérique est un projet d'entreprise" et insiste sur l'important rôle du conseil pour et du partenaire intégrateur pour démontrer le ROI. Pour Eric Foulart, "il importe que les chefs de projets et les DSI prennent en compte la réduction des coûts et fassent des PoC (Proof of Concept)".
Yannick Carriou, CEO de CXP Group, remettant sa distinction à Edouard Epaud, Mytraffic
Les coûts, justement étaient en première ligne dans la seconde session ERP de ce forum. Frantz Killi, directeur de mission chez CXP Group, a rappelé que le "legacy", c'est-à-dire les applications dites héritées, représente encore aujourd'hui 70 % du budget informatique total d'une entreprise. Les DSI doivent donc réaliser des économies sur l'informatique existante afin de financer des projets de transformation numérique. Pour Frantz Killi, "le cloud en particulier, qui permet de transformer des coûts d'immobilisation (CAPEX) en coûts d'exploitation (OPEX) et, est un facteur de lissage et de réduction des coûts. Par ailleurs, il agit aussi comme un levier pour la transformation numérique". En outre, il est aussi un facteur de recomposition de l'écosystème car il redistribue les cartes dans le monde de l'édition et de l'intégration et transforme la relation entre les différents acteurs. "Le modèle de distribution indirect est bousculé par les offres cloud et les équilibres évoluent, notamment, les intégrateurs, qui doivent trouver un nouveau positionnement", explique-t-il. Pour relever ces défis, éditeurs, ESN et fournisseurs de services proposent de nouvelles offres comme des verticaux, des add-on, des outils d'industrialisation et d'automatisation des tests et de nouveaux services comme la TMA, l'hébergement ou le support indépendant, visant à conférer plus d'agilité au SI et à optimiser son exploitation tout en réduisant son budget de mise en œuvre, d'exploitation et de support.
Le forum s'est clôturé par la présentation de huit start-up innovantes et la remise d'un prix à la meilleure, selon le vote du public. C'est la jeune société Mytraffic qui a été élue : Mytraffic aide les commerçants dans leur sélection et leur gestion d'emplacements en s'appuyant sur une plate-forme Big Data. Et au cœur du système d'analyse des importantes quantités d'information permettant d'établir la fréquentation d'un lieu ou d'une zone, on trouve encore un peu d'IA.
Benoît Herr
La GDPR (General Data Protection Regulation) ou réglementation générale sur la protection des données
Elle concernera les données personnelles existant dans tous les pays membres de UE dès le 25 mai 2018 et au sein de ces pays toute personne ou toute organisation qui gère des données de résidents européens.
Elle met en place l'obligation pour les organisations concernées de protéger ces données à caractère personnel (nom, téléphone, coordonnées bancaires etc.) et harmonise les règles qui s'appliquent au sein de l'UE pour lutter contre la violation de données personnelles (destruction, perte, altération ou divulgation). L'organisation devra être en mesure de prouver qu'elle protège les données personnelles et surtout que ces données seront inexploitables en cas de vol.
Pour ce faire, il sera nécessaire de maîtriser les changements de processus internes. La GDPR encadre la durée de conservation des données et leur traçabilité, notamment en cas de sous-traitance, et crée un cadre éthique et de confiance dans le traitement des données.
En cas de non-respect de ces dispositions, l'organisation risque une amende pouvant aller jusqu'à 4 % de son chiffre d'affaires mondial, dans la limite de 20 millions d'euros.
BH