Ce sont en effet quelque 1 400 personnes, membres de l'USF (association des Utilisateurs SAP Francophones), exposants et partenaires, qui se sont retrouvées à Lille Grand Palais durant deux jours, les 4 et 5 octobre dernier, autour de 7 conférenciers de haut niveau, comme nous l'allons voir.
Au cours de son introduction, Claude Molly-Mitton a annoncé que cette convention serait sa dernière en tant que président de l'USF, puisqu'il souhaite passer la main, après huit années à la tête de l'association. Un autre président accueillera donc les conférenciers à Lyon les 11 et 12 octobre 2018.

Autre annonce, celle des dernières publications de l'association, à savoir deux notes de perspectives, l'une sur la mobilité et l'UX sur SAP, l'autre sur le pilotage 2.0 des centres de compétences SAP. Et surtout un livre blanc sur les audits de licences SAP, rédigé en commun avec le Cigref. Pour Claude Molly-Mitton, "l'audit de licences est utilisé comme levier commercial". "Si nous prenons quelqu'un le doigt dans le pot de confiture, nous lui demandons de l'argent. Et nous le ferons toujours, car si nous ne le faisions pas, nous pourrions fermer la boutique", se défend Marc Genevois, directeur général de SAP France. Quant aux accès indirects, les outils utilisés pour auditer les licences ne les détectent pas toujours, mais permettent parfois de détecter une suspicion d'accès indirect.
Sur ce dernier sujet, SAP, par la voix de son directeur général France Marc Genevois, avait en 2016 déclaré ne pas avoir de position tranchée et être en train de prendre conscience du problème. Aujourd'hui, l'éditeur a dépassé le stade de la prise de conscience et s'est lancé dans une campagne plutôt agressive envers ses clients. Si en France nous n'avons pas encore connu de procès retentissant comme celui de Diageo au Royaume-Uni, qui a défrayé la chronique, il n'est pas exclu que cela arrive un jour. Marc Genevois cherche cependant à calmer le jeu en déclarant "Nous ne préconisons pas la voie judiciaire, mais recherchons d'abord un arrangement. Notre métier est d'aider nos clients dans leur métier, pas de leur intenter des procès". Et de préciser que "nous ne demandons pas à être payés pour l'accès aux données des clients, mais pour l'utilisation de l'intelligence embarquée dans nos solutions".
Nous reviendrons plus longuement sur ce livre blanc, les audits de licences et les accès indirects dans un article à venir.
Les robots ont des droits
C'est Alain Bensoussan, l'avocat technologue et futurologue bien connu, qui a ouvert la première matinée. Alain Bensoussan est également le fondateur de l'association du droit des robots et c'est sur ce thème qu'il a axé sa présentation.

Il appelle à la création d'un cadre juridique pour les robots, qu'il dépeint comme capables de comprendre et d'apprendre. Il distingue bien deux types de robots : les robots physiques et les robots logiciels. Seuls les premiers sont capables de modifier l'environnement.
"La 'personne' robot est libre et non contrôlée. C'est une personne juridique singulière, à part entière, car un robot a des attributs qui l'identifient, comme une adresse IP, une gouvernance et une assurance". Le droit classique est incapable de fournir une solution dans de nombreux cas, comme par exemple celui d'un accident impliquant une voiture autonome qui choisirait de percuter le véhicule d'en face où un seul humain a pris place plutôt que celui occupé par quatre humains. "L'avocat général va soutenir que le coupable est celui qui a écrit le code", estime-t-il.
Et de proposer la création d'un droit prospectif, un droit de l'IA, une charte, intégrant responsabilité, traçabilité et dignité, mais aussi la décision en dernier ressort : "Qui la prend ? L'humain ou le robot ? Les robots, il va nous falloir apprendre à vivre avec...".
Impact du numérique sur le travail
Retour à des choses plus terre-à-terre avec Denis Pennel, observateur des ruptures du travail et de l'emploi, dont les missions consistent à promouvoir les intérêts des services pour l'emploi privés auprès des institutions de l'Union européenne et des grandes organisations internationales.
Il explique que l'essor actuel de l'économie à la demande, qui impacte tous les secteurs, bouleverse l'organisation du travail. "C'est la fin de l'unité de lieu, de temps et d'action au travail. C'est la 'mobilité' ; 25 % des travailleurs en Europe sont déjà nomades. En outre, on observe une porosité croissante entre vie professionnelle et personnelle", constate-t-il. C'est aussi le retour du travail à la tâche, avec notamment ces micro-tâches payées quelques centimes qui se développent à l'heure actuelle, ainsi que la résurgence des freelances.
Et de terminer sur une note positive en affirmant que les robots et le numérique ne suppriment pas nécessairement d'emplois. " Les chiffres le montrent : le travail va sans doute prendre moins de place dans nos vies, mais pas disparaître. D'ailleurs, la technologie a toujours créé plus d'emplois qu'elle n'en a détruit". En d'autres termes, on va peut-être vers La fin du salariat et/ou du CDI et le multi-activité. "Le plein emploi est mort, vive le plein travail", conclut-il
La matinée s'est terminée sur l'intervention de Catherine Barba, qualifiée de "serial entrepreneuse du numérique", qui évolue dans le marché du retail. Installée à New-York depuis deux ans, elle se spécialise dans l'accompagnement de start-up. "La transformation numérique s'accélère. Et vous ?", a-t-elle lancé en forme de défi.
Décalage
Après l'intervention de Marc Genevois, qui "veut faire de la France l'entité SAP la plus innovante de tous les pays" et la remise des SAP Quality Awards (cf. encadré), la seconde matinée s'est terminée sur des interventions un peu décalées, comme de coutume à l'USF.
Ainsi Guy Vallancien, professeur de médecine, ancien dirigeant du département d'urologie à l'institut mutualiste Montsouris et auteur de l'ouvrage "La médecine sans médecin, le numérique au service du malade" (Éditions Gallimard - 2015), veut-il passer "de l'homme réparé à l'homme augmenté".

Ce n'est pas la première fois que l'USF laisse une place au mouvement transhumaniste dans ses conventions. Mais c'est bien la première fois qu'une intervention de ce type se termine par une standing ovation. "L'être sachant que je suis va disparaître au profit de l'être d'expérience. Car la machine apprend grâce au deep learning". Et souvent, elle fait mieux les choses : "on arrive aujourd'hui, grâce à l'imagerie, à détecter des cancers extrêmement précoces. C'est aussi une machine qui analyse le génotype, car notre cerveau en serait bien incapable". Toutefois, Guy Vallancien reste sceptique quant à la perpétuelle quête d'immortalité de l'Homme, qui "serait l'horreur... et ferait de nous tous des vieux cons". Et de conclure en appelant de ses vœux une "COP digitale sur le plan planétaire".
Le dernier intervenant, décalé lui aussi est un Youtuber : Bruce Benamran, qui sur sa chaîne Youtube e-penser présente des émissions de vulgarisation sur des sujets principalement scientifiques, excelle dans l'art de la digression et du coq-à-l'âne. Une conclusion divertissante à cette convention, même si comme l'a souligné Bruce Benamran en préambule à son intervention, "il partait avec un handicap, car l'intervenant précédent sauve des vies, lui".
Benoît Herr
Remise des SAP Quality Awards
Elle a cette année été réalisée par l'USF et ses membres, partie prenante dans le jury. Ils ont récompensé les meilleurs projets SAP dans trois catégories : Fast Delivery, Business Transformation et innovation.
Dans la catégorie Fast Delivery, c'est But International qui a décroché le bronze pour son projet SAP Business Objects Site on HANA. L'argent a été attribué à la PME spécialisée dans l'extraction d'algues et les gélifiants Algaia pour son projet SAP All in One, mené avec Gfi-ROFF. L'or est revenu au Groupe SAFO pour son projet SAP S4/HANA Retail & Customer Activity Repository, mené avec Beyond Technologies.
Dans la catégorie Business Transformation, la société Boulanger a obtenu le bronze pour son projet SAP Planning for retail on HANA, réalisé avec delaware. L'argent est revenu à la société Guerbet pour SAP Business Suite on HANA, un projet mené conjointement avec Capgemini et PwC. Et l'or a été attribué à Amadeus pour son projet SAP Portfolio & project management on HANA Enterprise Cloud, mené avec SOA People.
Dans la catégorie innovation, c'est la société SEF Textile (Société d'Enduction et de Flockage) qui a obtenu le bronze pour son projet SAP Business ByDesign, implémenté par Aldaïs. Cdiscount a décroché l'argent pour son projet SAP Successfactors Suite, mené avec Arago Consulting. Et l'or est revenu au "petit poucet" de l'assemblée, Medaviz (l'avis médical en un clic), une TPE de 5 personnes (mais dont les effectifs devraient bientôt passer à 7...) pour son projet SAP Business One on HANA, mené avec W3Com.
BH
