"Aujourd'hui est un tournant dans l'histoire de Cegid", a déclaré son directeur général, Pascal Houillon, en accueillant les visiteurs des Cegid Connections. Suite à son rachat en 2017 par les fonds Silver Lake et AltaOne, sa place de "leader auprès des cabinets d'experts comptables", qui sont un sur deux à utiliser ses solutions, ne semble plus lui suffire.
"En fonction des produits utilisés, chacun a une vision très parcellaire et se fait son idée de ce qu'est Cegid", a expliqué Pascal Houillon. "Nous souffrons d'une notoriété inférieure à notre taux de pénétration. Ce déficit est dû aux nombreux rachats externes et au fait que nous avons souvent conservé les noms des solutions rachetées ainsi qu'à une organisation séparée des différentes activités". L'ambition de la nouvelle direction du groupe est donc "de mettre fin à ce brouhaha et d'affirmer clairement ce qu'est le groupe aujourd'hui, de réunir toutes ses composantes et de donner une direction commune".
Doubler la taille du groupe en trois ans
Pascal Houillon, directeur général Cegid
Quelle est alors la véritable place de Cegid dans le secteur numérique ? Le chiffre d'affaires a dépassé les 300 millions d'euros en 2017, ce qui permet à Pascal Houillon de déclarer que "Cegid a surperformé" sur un marché déjà en bonne santé et devrait croître à 400 millions d'euros en 2018. "Nous avons attiré beaucoup de nouveaux clients, ce qui nous permet de penser que nous sommes pertinents. Notre ambition est de dépasser les 700 millions d'euros de chiffre d'affaires d'ici fin 2021".
Ce doublement de la taille de Cegid passera par une croissance organique, un développement à l'international et l'accroissement de la part du SaaS. "Il y a une place à prendre pour devenir un leader européen puis mondial", a affirmé le directeur général du groupe. "Des acquisitions seront certainement nécessaires pour de nouvelles implantations à l'international, par exemple en Italie, en Angleterre et aux États-Unis dans le secteur des solutions retail, et pour apporter de nouvelles technologies dans nos produits".
Recentrage autour de trois activités : comptabilité, RH, retail
"Lors du rachat par Silver Lake et AltaOne, nous nous sommes rendu compte qu'il y avait plein de trésors cachés dans le groupe", a expliqué Pascal Houillon. Pour André Brunetière, directeur R&D, "en nous appuyant sur l'innovation technologique, notre excellence dans le domaine réglementaire et notre finesse fonctionnelle, nous voulons concentrer nos efforts sur quelques produits clés et réduire le nombre de métiers que nous souhaitons adresser". Il ne seront plus qu'au nombre de trois : la comptabilité d'une part, d'autre part la gestion de la paie, des talents et des ressources humaines en général et enfin le secteur du retail.
Les trois acquisitions réalisées fin 2017 par le groupe collent bien sûr à cette stratégie : Cegid a ainsi racheté Qualiac et son ERP financier utilisé par des clients de "l'upper-mid market" dont Cap Gemini ou le ministère de l'Éducation nationale, segment jusqu'ici non couvert par Cegid. Par ailleurs, Cegid, 1er éditeur européen dans le secteur du retail avec 120 millions d'euros de chiffres d'affaires, a acquis Cylande, 30 millions d'euros de chiffre d'affaires, "qui compte parmi ses clients des magasins multi-références comme Conforma, pour lesquels nous ne proposions pas de solution", a expliqué Pascal Houillon. Et enfin, Rita, société canadienne proposant une solution de publication et de collecte de CV, "va permettre d'élargir les compétences du groupe dans le talent management".
Des solutions retail pour des clients et des vendeurs augmentés
Dans le secteur du retail, Cegid compte parmi ses clients 1 000 enseignes, soit 70 000 magasins répartis dans 75 pays. Pour Nathalie Echinard, directrice exécutive retail, contrairement à certaines prévisions pessimistes, "l'eCommerce n'a pas fait disparaître les magasins mais a imposé partout l'omnichannel, avec une expérience client unique quel que soit le canal".
Matthieu Rinville, retail client and performance director de Moncler, entreprise italienne spécialisée dans la doudoune haut de gamme, et client Cegid depuis 2013, a confirmé que "nous sommes passés d'un monde de produit à un monde de client. Nous souhaitons créer un parcours client personnalisé et une relation unique entre le client et le 'client advisor' : la newsletter, c'est fini". Concrètement, cela se traduit par une logistique omnichannel pour répondre aux attentes "des clients 'augmentés'" avec des possibilités de e-réservation en magasin, de click and collect, de store to home ou de store to store. Et, au sein des espaces de vente, "des vendeurs également 'augmentés', grâce à des apps mobiles", offrant des fonctions de CRM, de présentation de produit et d'achat en direct, sans passer par la caisse, "pour ne jamais faire retomber l'émotion et éviter toute friction" dans le parcours client.
Cegid, "pionnier du SaaS"
150 000 entreprises utilisent les solutions SaaS du groupe, qui réalise 36 % de ses ventes en SaaS. Pascal Houillon a placé Cegid "parmi les trois premiers vendeurs de SaaS en France, avec Salesforce et Microsoft. À vrai dire, nous ne vendons pratiquement plus de licences". Pour Sylvain Moussé, directeur des technologies, le succès du groupe dans le cloud s'explique par le fait "que nous avons fait le choix du SaaS très tôt. Aujourd'hui, nous n'en sommes plus à comparer les solutions on-premise et le cloud. Il est établi que le cloud est là et est le lieu le plus sûr pour traiter les données : notre unique préoccupation est l'ajout de nouveaux services cloud pour mieux servir nos clients".
Le groupe a fait le choix d'un cloud "multi-sourcé" avec des partenariats avec Microsoft pour son cloud dédié au secteur du retail, avec IBM pour un projet d'hybridation du cloud privé de Cegid et avec Xerox pour la digitalisation des documents des TPE. Sur ce dernier segment de marché, André Brunetière, directeur R&D, a annoncé "chaque mois, 5 000 adhésions supplémentaires de TPE aux portails Cegid. Le SaaS nous permet d'aider les TPE à passer du carnet à souche et d'Excel à une véritable solution de gestion".
En tant qu'utilisatrice de QuadraExpert en mode SaaS, Claire de Bon, dirigeante d'un cabinet d'expertise comptable de petite taille, a insisté sur "l'importance de la formation des collaborateurs et des clients aux nouveaux outils et sur l'intérêt des solutions SaaS de Cegid pour une petite entreprise qui ne peut réaliser de développement interne". À l'autre bout du spectre de l'expertise comptable, Fabien Masson, associé du cabinet Mazart, 850 utilisateurs de Cegid Expert en SaaS, a rencontré "les mêmes problématiques d'accompagnement, avec un défi supplémentaire lié à l'harmonisation des pratiques, qui explique aussi notre choix du mode SaaS".
En visant un doublement du chiffre d'affaires à trois ans et un doublement de la part SaaS dans ce même chiffre d'affaires (pour la porter à 60 %), "nous devons multiplier par quatre nos capacités de production SaaS d'ici 2021" a expliqué Sylvain Moussé.
Hervé Baconnet