Internet et les usages mobiles ont bouleversé le secteur de la distribution. Pour Nathalie Echinard
directrice de la branche retail de Cegid, "le commerce linéaire traditionnel, de l'entrepôt au client en passant par le magasin, c'est terminé. Place au commerce unifié : une approche
omnicanale augmentée où tous les scénarios de vente convergent vers une seule finalité : vendre mieux et plus grâce à une nouvelle personnalisation du parcours d'achat. Du Web aux réseaux sociaux en passant par le magasin physique, le magasin de demain sera un hub complet, connecté et intelligent". Le modèle linéaire de base était simple : un fournisseur livrait des marchandises à un magasin qui les vendait à ses clients. Puis vint le multicanal : un magasin physique qui ouvre un site marchand créant ainsi un point de contact supplémentaire avec la marque. Or, le multicanal créé des silos : les canaux sont concurrents, les vendeurs du magasin ignorent tout des pratiques commerciales en ligne et vice-versa. Chaque canal agit de manière indépendante.
Pour solutionner ce problème, les marques ont développé le "crosscanal", qui fluidifie le parcours du consommateur et permet de passer d'un canal à l'autre. C'est ainsi que l'expérience client a été placée au centre des préoccupations des entreprises de distribution. Elle se définit comme l'ensemble des sentiments, conscients ou inconscients, ressentis par un client à travers une interaction avec une marque avant, pendant et après un achat, que ce soit en ligne ou dans un magasin. Elle puise ses racines dans le marketing, la vente, mais également dans l'optimisation des flux logistiques, l'ergonomie Web, le design, la théâtralisation du point de vente, le bon partage des informations personnelles et le service client.
L'omnicanal rebat les cartes et propose une expérience client complète, quel que soit le canal utilisé. Plus aucun silo ; toutes les informations sont partagées. Un client peut acheter un produit en ligne et le retourner dans le magasin de son quartier. L'omnicanal repose sur deux grandes piliers : le "vendeur augmenté" et le magasin connecté. Quant au commerce unifié, Cegid le définit comme étant la version ultime de l'omnicanal, qui fait communiquer toutes les composantes de l'entreprise, internes et externes, des clients aux fournisseurs afin d'optimiser l'expérience client.
Et le point focal de ce commerce unifié, c'est le magasin physique. Un magasin qui est non seulement loin de disparaître, puisque, aux États-Unis par exemple, 80 % de la génération Y souhaite un paiement en magasin depuis l'application mobile de la marque (enquête Acosta, printemps 2017). Et selon Pragma Consulting, 33 % des clients en magasin recherchent des offres et
comparent les prix depuis leur téléphone. Partant de ce constat, Cegid définit le magasin physique comme étant un "hub", c'est-à-dire un point central regroupant un ensemble de flux. Le hub centralise, trie, exploite et facilite le partage d'informations. Le magasin de demain en tant que hub sera, selon l'e-book de l'éditeur, au centre d'un écosystème unique d'où de nombreux flux arriveront et partiront de manière synchronisée (marchandises, clients, finances, retours de produits, entreposage temporaire, expédition, vente directe, gestion des stocks, etc.).
Le magasin fait la différence
L'éditeur étaye son raisonnement en expliquant que l'évolution et la démocratisation des technologies permet l'émergence de nouveaux modèles de magasins connectés, capables de servir de point d'ancrage à tous leurs clients, mais également d'optimiser la productivité des équipes pour créer de nouvelles approches commerciales omnicanales. Et de citer les nombreuses innovations : du côté du client le paiement sans caisse, l'accueil personnalisé et l'unification des approches (collecte, shopping classique, test, essayage, shopping augmenté, démonstration de produits, retour, échange etc.). Du côté du distributeur : la gestion optimisée des produits grâce à une organisation adaptée, le gain de temps apporté par les outils numériques ou encore la différenciation concurrentielle apportée par les innovations mises en œuvre dans le magasin connecté.
Rôle pivot du vendeur
Pour Cegid, le vendeur est le deuxième pilier du commerce unifié. Pour cela, il se transforme en vendeur augmenté avec une simple tablette : grâce à cela, il connaît le client sans jamais l'avoir vu, est capable de fluidifier l'acte de vente, d'optimiser la relation client et de proposer une expérience positive en magasin. L'analyse de l'historique des échanges, des préférences, des moments de consultation ou des interactions sociales converge alors vers la création d'un nouveau modèle, appelé "clienteling".
L'action du vendeur se résume à trois actes : information, relation personnalisée et encaissement rapide et décentralisé. Dans ce cadre, la tablette devient un outil central : l'application mobile de
vente permet d'avoir une vue complète du client et de connaître ses intentions et ses besoins sans même l'avoir rencontré au préalable. L'information est agrégée de différentes sources et partagée afin de nourrir la relation client. Le vendeur se sert de sa tablette pour emmener le client dans une relation basée sur une approche globale où la technologie se fait oublier au profit du service rendu. Enfin, la caisse fixe traditionnelle est un goulot d'étranglement dans un magasin : en remplaçant les files d'attente par un système d'encaissement mobile, rapide et réalisé sur une borne ou directement en rayon, on supprime cet obstacle, qui n'est pas anodin pour le client, à l'instar de ce qui se fait dans les Apple Stores.
L'e-book de Cegid fournit également un certain nombre de conseils pour réussir sa transition vers le commerce unifié et insiste sur la formation : "la numérisation à marche forcée est vouée à l'échec, car l'humain est au centre de tout le dispositif", met-il en garde. "Les vendeurs doivent être partie prenante du projet et être formés pour savoir comment utiliser ces nouveaux outils. La formation doit aussi souligner la dimension interpersonnelle : trouver les bons messages et les bons mots pour rassurer, accompagner et aider les clients. La tablette est un outil de vente qui doit être inclusif et ne pas créer une frontière ou faire peur. Le passage au commerce unifié ne concerne donc pas que les outils, mais bien l'organisation au sens large, qu'il faut accompagner et adapter dans le cadre d'un plan de conduite du changement soigné et anticipé".
Et de conclure en résumant le propos de l'opuscule en trois points :
- Le magasin physique ne va pas disparaître mais s'adapte et devient connecté ;
- La personnalisation de la relation client est la clé de la réussite ;
- Le magasin et le site marchand forment un tout : c'est pourquoi l'expérience vécue en magasin doit être pensée
comme partie intégrante du processus de vente.
Benoît Herr