Rimini Street propose un support alternatif à celui des éditeurs, essentiellement SAP et Oracle, mais pas uniquement (voir Externaliser le support de son ERP). Récemment, le support de Salesforce a été lancé aux États-Unis et devrait bientôt arriver en Europe. De même, le support ne se limite pas aux ERP mais concerne aussi les bases de données, y compris Microsoft SQL Server, d'ailleurs, les middleware et des produits de business intelligence. L'entreprise se porte plutôt bien et vient de publier ses résultats pour le troisième trimestre : chiffre d'affaires de 62,6 millions de dollars, en hausse de 17 % par rapport au troisième trimestre 2017 et une marge brute à 64,5 % (contre 62,5 % en 2017). Le résultat net s'élève à 6,7 millions de dollars, à comparer à une perte nette de 3,1 millions au troisième trimestre de 2017.
Un support unifié
Américaine d'origine (siège à Las Vegas, Nevada), la société, fondée en 2005, réalise désormais 36 % de son chiffre d'affaires ailleurs qu'aux États-Unis au travers de ses 20 représentations dans le monde. En Europe, c'est le Royaume-Uni qui a été investi en premier, en 2009. La société n'est présente en France que depuis deux ans mais "c'est un marché clé pour nous", affirme Mark Armstrong, EMEA General Manager. "Nous y comptons une centaine de clients". Signalons que l'entreprise a ouvert des locaux à La Défense l'été dernier et qu'elle recrute.
"Les organisations ont besoin d'un support unifié et local. C'est pourquoi nous investissons dans les personnes", assure Dean Alms, Global Vice-President Product Strategy. L'entreprise compte aujourd'hui quelque 650 à 700 ingénieurs à plein temps. "Mais nous avons accès à 1 500 ingénieurs 'on demand', c'est-à-dire contractuels", précise le dirigeant. Le support de premier niveau bénéficie ainsi d'un ingénieur possédant de 10 à 15 ans d'expérience. Quant au support de second niveau, il fait appel à des ressources spécialisées dans le domaine concerné. "En général, nos ingénieurs sont des anciens consultants, qui peuvent travailler depuis chez eux ; ils sont basés localement", poursuit Dean Alms. De la même façon, lorsqu'un nouveau produit est mis au catalogue l'entreprise recrute des spécialistes.
Mark Armstrong, EMEA General Manager, Rimini Street
"La première chose que nous faisons quand nous signons un nouveau client, c'est de lui présenter son ingénieur support dédié", renchérit Mark Armstrong. Car lorsqu'un client fait appel à son support, il tombe toujours sur la même personne. En termes d'engagement de service, on est contractuellement sur une réponse en moins de 15 minutes. "Mais en moyenne nous répondons en 5 minutes", assure Dean Alms.
En termes d'économies réalisées par rapport au support de l'éditeur, Rimini Street affirme qu'elles peuvent aller jusqu'à 90 %. Mais ceci n'est vrai que dans certaines conditions et exclut notamment les montées de versions. En revanche, Rimini Street assure le support des développements spécifiques, ce que ne fait en général pas l'éditeur.
Au-delà du support
Mais l'ambition de Rimini Street ne se limite pas à assurer le support logiciel pour moins cher que les éditeurs une fois que l'application est en production : le prestataire souhaite accompagner les clients dans leur transformation numérique et en particulier dans leur mouvement vers le cloud. "En principe nous sommes une entreprise de support. Mais nous avons une valeur ajoutée et une dimension conseil dans ce que nous faisons", commente Mark Armstrong. "Le rôle du DSI n'a jamais été aussi compliqué : il est de plus en plus sous pression parce que le besoin de changement est de plus en plus prégnant. L'entreprise numérique a un gros impact sur lui, qui doit tout à la fois optimiser son exploitation, gérer le passage vers le cloud, adopter le SaaS best-of-breed, virtualiser la sécurité, moderniser l'expérience utilisateur, déployer le single sign-on, et déployer la connectivité cloud", poursuit-il. En outre, "la mission du DSI est de plus en plus orientée vers les métiers. L'assertion selon laquelle 'personne ne se fait virer parce qu'il a acheté IBM' n'est plus vraie. Le DSI ne gère plus des tickets mais des problématiques métier et L'IT n'est plus un centre de coûts mais un moyen de créer des avantages concurrentiels et de la valeur. Selon notre étude 'EMEA state of innovation readiness survey', 90 % des répondants souhaitent dépenser plus dans l'innovation et dans le même temps 83 % se déclarent dépendants des développements spécifiques. Quand on passe dans le cloud, ce n'est certainement pas pour y transposer son application on-premise en l'état. Cela implique de passer sur une application conçue pour le cloud". Et de citer les quatre piliers de la transformation numérique que sont selon lui le financement, les relations avec le fournisseur, une roadmap IT flexible et la rapidité d'innovation.
De son côté, Dean Alms confirme que le mouvement actuel est d'aller vers le métier et il cite l'étude "CIO survey" de la revue américaine Harvard Business Review, qui affirme que "les DSI sont mandatés pour innover. Ils seront un membre important de la task force de croissance du CEO et concevront l'organisation ouverte, agile et tournée vers le client qui va créer de la valeur nouvelle et un avantage concurrentiel".
C'est dans ce contexte que s'inscrit la démarche de Rimini Street, pour non seulement optimiser les coûts opérationnels mais aussi réduire les risques grâce à son expérience, ses compétences et sa réactivité, capitaliser d'un côté sur l'existant pour en prolonger la durée de vie et la valeur mais innover de l'autre en proposant de l'accompagnement à la modernisation des outils logiciels en place. En cela elle est en phase avec les propositions de Gartner d'amélioration continue (voir Gartner promeut de nouveaux concepts) : optimiser l'utilisation, l'adoption et la consommation pour créer de la valeur.
Nous ne sommes pas dans un monde de Bisounours
Dans un marché SAP et Oracle évalué à 32 milliards de dollars, la démarche de Rimini Street est diversement appréciée par les éditeurs concernés. "Nous apportons une solution alternative. Autant avec Salesforce ça se passe très bien parce que nous apportons un service complémentaire et nous sommes partenaires, autant avec SAP et Oracle c'est plus tendu", avoue Dean Alms.
De fait, si SAP semble faire la sourde oreille – encore que le géant de Walldorf doit certainement exercer des pressions commerciales sur ceux de ses clients qui ont choisi un support externe, mais pour Dean Alms "ça fait partie des négociations commerciales" – il n'en est pas de même pour Oracle, qui a sauté sur la première occasion pour intenter un procès à Rimini Street. Ce fut fait il y a huit ans déjà pour utilisation de logiciels (des outils destinés au support) protégés par le copyright sans en posséder les licences dans le cadre de son offre de support. En 2015, l'entreprise a été condamnée en première instance à payer des dommages et intérêts à Oracle à hauteur de 50 millions de dollars, s'est vue infliger une interdiction permanente d'utiliser ces logiciels et 46,2 millions supplémentaires de frais de justice. La décision a été entérinée en septembre 2016 et un mois plus tard, une amende supplémentaire de 27,7 millions s'est rajoutée à la première. L'affaire ne s'est pas arrêtée là et Rimini Street, qui a déclaré ne plus utiliser les logiciels incriminés depuis 2014, a fait appel et une nouvelle décision est intervenue en janvier de cette année, diminuant de 50 millions les premiers montants, arguant du fait que la première décision était trop large et trop vague. Et l'action se poursuit toujours : une autre décision est tombée en août, rallongeant à nouveau la note, et un nouvel appel a été interjeté tout récemment. À suivre.
Dean Alms, Global Vice-President Product Strategy, Rimini Street
Quelle que soit la véracité du fond de la plainte, ce procès n'en est toujours pas à son dénouement et Rimini Street doit bien vivre avec. "Il crée des doutes chez les clients et détourne le propos des vrais sujets que nous souhaiterions évoquer avec eux", se plaint Mark Armstrong. Etait-ce le principal but recherché par Big Red ?
La concurrence aussi, se fait pressante, avec notamment Spinnaker Support, autre entreprise américaine, basée à Denver, Colorado, celle-là, qui propose du support sur exactement les mêmes produits que Rimini Street.
Mais c'est le "business" et au-delà de ses bons résultats et du support annoncé de Salesforce en Europe, Rimini Street fait de nombreux projets, que ce soit en termes de couverture produits ou d'expansion. "Il est encore trop tôt pour en parler, mais il y aura des annonces en 2019", assure Dean Alms. "Nous supporterons d'autres applications on-premise, car c'est la réalité de nos clients, mais aussi des applications dans le cloud. Et nous les aiderons à passer dans le cloud. Nous ne voulons pas nous contenter de SAP et Oracle".
Benoît Herr