En introduction de la deuxième édition de ces rendez-vous, la députée LREM de la Loire Valéria Faure-Muntian est venue expliciter l'action de l'Assemblée Nationale en matière de numérique et notamment certains aspects de la loi PACTE (Plan d'Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises). "La pierre d'achoppement, c'est la formation", a-t-elle insisté. Il est vrai que l'une des principales problématiques des entreprises et en particulier des ESN est le maintien à niveau des compétences des collaborateurs, l'autre étant de les recruter et des les retenir une fois recrutés.
Six thèmes
Le panorama sur la vitalité et les tendances des ESN dresse un état des lieux du marché français. Il a été établi à partir de données collectées par Syntec Numérique et KPMG durant le deuxième trimestre 2019 auprès d'un échantillon représentatif de 185 ESN de toutes tailles, implantées en France, sur la base d'un questionnaire en ligne portant sur l'année écoulée (2018) et couvrant six thèmes : opérations financières, croissance organique, rayonnement à l'international, stratégie de croissance externe, talents et innovation. Les réponses ont été analysées en fonction de la taille des entreprises telles que définies par la réglementation : Grandes entreprises (GE – 12 répondants), Entreprises de taille intermédiaire (ETI – 57 répondants), Petites et Moyennes Entreprises (PME – 96 répondants), Très Petites Entreprises (TPE – 20 répondants).
Opérations financières
98 % des ESN ont confiance dans le financement de leurs futurs investissements et 43 % d'entre elles ont réalisé au moins une opération financière au cours des 24 derniers mois. C'est la croissance organique qui est la principale priorité de ces investissements, pour 86 % des ESN interrogées. Dans ce cadre, les objectifs sont surtout le développement des talents, mais aussi le développement de l'offre commerciale (84 %), le développement de l'offre et celui de la R&D (67 %).
Croissance organique
La transformation numérique est au cœur de la croissance organique des ESN ; mais si elle en est désormais un moteur incontournable, les activités historiques comme l'intégration de systèmes et l'infrastructure continuent à y contribuer. Par ailleurs, les solutions de data management intègrent le trio de tête des moteurs de croissance.
Cette croissance organique est surtout portée par le marché hexagonal, reflétant en cela le faible degré d'internationalisation des ESN françaises. Curieusement, le développement à l'international ne semble pas être une priorité, puisqu'il se classe toujours à la même place depuis trois ans.
Rayonnement à l'international
2,41 % : c'est la variation de la part du chiffre d'affaires réalisé à l'international entre 2017 et 2018, contre 1,52 % entre 2016 et 2017. C'est cette variation et le fait que 78 % des GE, ETI et PME aient une stratégie de croissance à l'international qui expliquent le relatif optimisme de l'étude. Pourtant, en moyenne, seuls 18 % du chiffre d'affaires sont réalisés à l'international. Et encore : on note une très forte disparité en fonction de la taille des ESN. Si les grands acteurs ont franchi très tôt ce cap et opèrent la majorité de leur activité à l'étranger, il n'en est pas de même pour les PME et les ETI.
En termes de stratégie, les deux principales cibles restent, comme en 2017, "profiter de la croissance locale" pour 48 % des répondants et "maintenir et/ou consolider leur position dans les zones où elles sont déjà présentes" pour 38 %. Pour 68 % des répondants (contre 48 % l'année d'avant) c'est l'accompagnement de leurs clients dans leur propre développement à l'international qui est la principale raison du développement des ESN à l'international. Avec 19 %, la croissance externe représente le deuxième facteur de développement au-delà de l'Hexagone. Mais Xavier Niffle, associé KPMG Technology, Media, Telecommunications et Practice ESN, souligne bien que "la majorité des ESN françaises considère la France comme le marché le plus porteur en 2018 et à horizon trois ans".
Stratégie de croissance externe
88 % des répondants envisagent de réaliser une ou plusieurs acquisitions au cours des 24 prochains mois. C'est dire si ces opérations sont plébiscitées ! "Les freins au développement des ESN ne sont pas du côté de la demande mais bien du côté de l'offre de compétences", constate Guillaume Cauchoix, Head of Technology M&A chez KPMG Corporate Finance. "La tension sur les recrutements reste vive et elles doivent trouver de nouveaux moyens pour poursuivre leur développement". De fait, l'objectif prioritaire des opérations de croissance externe, cité par 51 % des répondants, est d'acquérir des talents pour pallier les difficultés de recrutement. Constatée dès 2017, cette tendance se renforce encore en 2018.
Talents
C'est bien là que le bât blesse. Pour Pap' Amadou Ngom, président et cofondateur du groupe S&H (Des Systèmes et des Hommes), lauréat du trophée "Talents" décerné l'an dernier par Syntec Numérique (voir encadré), "s'il ne devait rester qu'un de ces trophées, ce devrait être celui-là".

De fait, il s'agit de la principale préoccupation des ESN, qui cherchent à se démarquer et à innover en matière de gestion des ressources humaines pour attirer et fidéliser les talents. Elles sont 89 % à citer la formation et plus particulièrement l'approfondissement technique comme priorité numéro un. 92 % proposent en priorité un CDI, en hausse de 6 % par rapport à 2017.
Se démarquer n'est pas facile dans un marché saturé et au vu de la rareté des compétences recherchées. Et si la rémunération reste un enjeu clé pour la rétention des talents (83 % des répondants estiment que les niveaux de salaires offerts permettent de retenir leurs employés), elle n'est plus le seul facteur et la flexibilité et l'intérêt des tâches jouent un rôle de plus en plus important. Ainsi, 82 % des ESN interrogées ont mis en place le télétravail et 75 % une politique de mobilité interne fonctionnelle ou géographique (contre 53 % en 2017).
Innovation
L'innovation, enfin, est est au cœur du développement des ESN, ce qui, pour Thierry Siouffi, co-président du collège ESN de Syntec Numérique, "est une évolution majeure au vu de tout ce qui a pu se dire et s'entendre de par le passé au sujet des entreprises de services. L'innovation est désormais dans leur ADN et s'incarne par une fonction du même nom". De fait, 83 % des répondants déclarent avoir mis en place un responsable de l'innovation et elles sont 40 % à avoir un collaborateur dédié.
Sans surprise, ce sont le cloud et l'intelligence artificielle qui sont les domaines d'investissement privilégiés. 51 % des répondants ont préféré l'innovation de produits et solutions à l'innovation de process (13 %). À noter toutefois que plus la structure est grande, plus une démarche globale d'innovation est mise en place, alliant innovation produit/solution et process.
À noter également que 28 % des répondants ont mis en place une logique d'alliance et de co-innovation, que ce soit avec d'autres ESN ou des organisations telles que des universités ou des écoles. C'est cette démarche qui a poussé Syntec Numérique à créer un septième trophée dédié (voir encadré).
"Le premier défi des ESN, ce sont les talents et le second l'innovation", ont conclu Thierry Siouffi et Jonathan Amar, l'autre co-président du collège ESN de Syntec Numérique.
Benoît Herr
Les lauréats des Trophées 2019
Ce "Rendez-vous des ESN" a été l'occasion pour le syndicat de récompenser 8 entreprises dans 7 catégories (deux entreprises pour le seul prix de la co-innovation) au travers de "trophées" (sur les six thèmes évoqués ci-dessus plus un nouveau trophée de la co-innovation). Sans compter le "coup de cœur du jury".
Prix de l'opération financière décerné à la société Datasolution
Prix de la croissance organique décerné à la société Acensi
Prix de la stratégie de croissance externe, décerné à la société Viseo
Prix du rayonnement à l'international, décerné à la société Technology & Startegy Group
Prix des talents, décerné à la société Neosoft
Prix de l'innovation, décerné à la société AFD Tech
Prix de la co-innovation, décerné à la société Atol et au CHU Dijon-Bourgogne
Prix coup de cœur du jury : Auticonsult, une ESN composée uniquement d'autistes et de personnes atteintes du syndrome d'Asperger.
BH