La chambre professionnelle des SSII et éditeurs de logiciels Syntec informatique a créé un comité développement durable en juin 2007. Placé sous la co-présidence d'Éric Boustouller, président de Microsoft France et de Khaled Draz, PDG d'Euriware, ce comité se consacre à la responsabilité sociétale des Entreprises (RSE) et s'est fixé pour objectif d'accompagner lesdites entreprises, quelle que soit leur taille, dans la mise en ?uvre d'une politique informatique responsable.
Le "livre vert" (néologisme sans rapport ni avec le Tibet ni avec Mouammar Kadhafi) "Vision et recommandation sur le Green IT et le Développement Durable" publié en juin dernier ambitionnait d'ouvrir la voie et de montrer comment utiliser les TIC comme levier de développement durable dans tous les secteurs de l'économie. On y listait notamment un certain nombre de domaines, de la dématérialisation à l'architecture logicielle, du télétravail, de l'optimisation des processus métier, de l'impression à l'éco-conception ou à la comptabilité carbone, sur lesquels le Syntec envisageait de travailler et de publier des "livres verts", donc, à raison d'un tous les trois mois environ.
C'est très symboliquement sur le salon "entreprise durable", qui se tenait les 20 et 21 octobre dernier à la porte de Versailles à Paris, que le Syntec a lancé le premier de ces documents, intitulé "Dématérialisation, levier du développement durable". Le choix de ce sujet s'explique par la prééminence de la dématérialisation comme étape préliminaire de toute stratégie de développement durable et son caractère quasiment incontournable. La dématérialisation est d'ailleurs fortement encouragée par le gouvernement et Jean-Louis Borloo, ministre de l'écologie, de l'énergie et du développement durable, en particulier.
Ce volume du livre vert fait donc le point sur les enjeux, les bénéfices et les bonnes pratiques qui permettront aux entreprises d'intégrer la dématérialisation à leur démarche de développement durable. Après le rappel de quelques concepts et définitions, le document recense les enjeux de la démarche, qui vont bien au delà des factures et autres documents papier : on y évoque aussi les services, les transactions et même le capital intellectuel ou les ?uvres d'art !
Puis on s'intéresse au marché et au potentiel de la dématérialisation (seuls 3% des 2,5 milliards de factures inter-entreprises échangées annuellement seraient dématérialisées, selon une étude BVA) et surtout au retour sur investissement pour l'entreprise, qui peut être économique bien sûr, mais aussi environnemental, social et sociétal.
Le document se termine par la liste des points de vigilance à considérer, du cadre réglementaire et des contraintes techniques et administratives, avant de fournir quelques pistes et conseils aux entreprises. Parmi les principes clés à intégrer dans la démarche spécifique de chaque entreprise, citons l'intégration du développement durable dans le business plan, celle de notion d'entreprise étendue et la nécessaire évolution du management. On y trouve également quelques indicateurs de suivi et une liste des fonctionnalités et technologies disponibles.
On notera cependant deux zones d'ombre : la dématérialisation a elle aussi un coût, y compris en termes d'empreinte carbone et le Syntec ne semble pas avoir chiffré ces coûts dans son étude. Même si l'existence du document n'est pas visible à l'?il nu, qu'elle est immatérielle, un document dématérialisé a bel et bien une existence physique sur un support numérique de type disque dur, CD ou mémoire. La fabrication et l'utilisation de ces supports ont elles aussi un coût en espèces sonnantes et trébuchantes, mais aussi pour l'environnement.
Enfin, l'initiative du Syntec est certes louable et porteuse, mais au risque de passer pour un "greenwasher", la chambre professionnelle se contente de lancer ainsi quelques informations et quelques conseils dans la nature ? au sens propre du terme ? sans mettre en place, pour l'instant au moins, aucun mécanisme ni aucune structure d'analyse du retour des entreprises par rapport à ces conseils. Que vont-elles en penser ? Vont-elles adopter la démarche et dématérialiser à tout-va ? Rester circonspectes ? Dans quelles proportions ? L'avenir nous le dira sans doute. Rappelons que le Syntec ambitionne d'accompagner les entreprises dans la mise en ?uvre d'une politique informatique responsable. Espérons qu'il le fasse de bout en bout.
Benoît Herr