C'est le 1er mars, à l'occasion de l'annonce officielle de ses comptes annuels, au demeurant très bons (cf. Résultats Cegid 2011 : + 25 % sur le SaaS, + 7,5 % sur l'édition et les services associés), que l'éditeur a annoncé un partenariat dans le cloud avec IBM, dans le domaine de l'IaaS (Infrastructure as a Service). Jean-Michel Aulas, président, et Patrick Bertrand, directeur général, avaient convié Alain Bénichou, président d'IBM France, autour de la table pour une annonce commune.
En 2011, Cegid a enregistré une forte accélération de l'adoption de ses offres en mode SaaS, dont le chiffre d'affaires a progressé de 25 % à 20 millions d'euros. Il entre maintenant pour 15 % dans le chiffre d'affaires récurrent de l'éditeur (qui représente lui-même 50 % du chiffre d'affaires global de 263,8 millions d'euros). On sait que Cegid cherche à se positionner comme un acteur de référence pour les solutions SaaS : outre la progression du chiffre d'affaires SaaS, déjà supérieure à celle du marché, c'est son portefeuille de commandes qui a crû de plus de 50 %, explique Patrick Bertrand. Il lui faut donc absorber cette croissance et mettre les infrastructures nécessaires en face de la demande.
Pourquoi IBM et Cegid ?
Cette stratégie initiée il y a un an répond à la volonté de Cegid de rester un éditeur-hébergeur. En passant d'une infrastructure physique, héritée de l'activité ASP historique de CCMX, à une infrastructure virtuelle dans un cloud privé personnalisé développé et maintenu par IBM, Cegid pourra rester l'interlocuteur unique de ses clients.
Par ailleurs, pour absorber la croissance du SaaS, il lui aurait fallu investir beaucoup dans l'infrastructure, sans certitude d'offrir le niveau de qualité nécessaire à ses clients. "Un partenariat sur l'hébergement s'imposait", affirme Patrick Bertrand. "Ce partenariat avec IBM s'inscrit pleinement dans notre stratégie SaaS : construire des bouquets de services cloud innovants autour de Cegid et de ses partenaires éditeurs, fournisseurs de services, de contenus ou d'infrastructures, capables de répondre aux enjeux de performance et de sécurité des entreprises françaises, du secteur public, des associations et de l'éducation, en leur permettant de s'affranchir de contraintes techniques et technologiques", confirme Jean-Michel Aulas. De son côté, Alain Bénichou ajoute "Quand on pense au cloud et à Cegid, il y a une sorte d'attraction élective. Tous les experts comptables de France sont clients Cegid ! Dès 2009, IBM France a investi 300 millions d'euros dans le cloud et est devenu un acteur majeur du domaine. L'ultra-sécurisation est centrale dans cet accord : celle des données, mais aussi celle des applications, du réseau et des infrastructures, toutes choses que nous garantissons".
Un nuage français
Cette alliance est franco-française et lie deux sociétés de droit français au travers d'un contrat français, relevant de tribunaux français, soulignent de concert les trois intervenants. Qui plus est, les données seront hébergées en France, notamment à Clichy, mais les autres sites d'IBM France, comme Montpellier, Seclin ou La Gaude, pourront également être mis à contribution en cas de besoin. Il faut souligner que le contrat liant les clients à Cegid ne précise pas les moyens dont doit se doter l'éditeur mais uniquement ses engagements de service. Autrement dit, celui-ci reste libre d'héberger les données où bon lui semble.
Ce sujet est en fait éminemment sensible, car IBM France étant la filiale d'une entreprise américaine, c'est le spectre du Patriot Act, qui autorise notamment les juges américains, en cas de menace sur la sécurité intérieure du pays, à accéder aux données hébergées par les sociétés américaines, qui se profile. Cette perspective pourrait ne pas être du goût de certaines organisations françaises, qu'il s'agisse de collectivités locales ou d'entreprises privées. Alain Bénichou a étouffé dans l’œuf toute velléité de polémique sur le sujet en précisant que "les équipements mis à disposition de Cegid sont en France, exploités par des personnels de nationalité française, employés par IBM France, société de droit français, qui échappe donc au Patriot Act". Et d'ajouter : "de nombreuses grandes entreprises françaises, dans des secteurs aussi variés que l'assurance, l'industrie, l'automobile, mais aussi la défense, font confiance à IBM pour l'hébergement de leurs données".
Le lancement opérationnel du "Nuage Cegid" a lieu en ce moment même et les premiers clients devraient pouvoir basculer dans cet environnement en milieu d'année. La montée en charge devrait être rapide pour les quelque 40 000 utilisateurs actuels des solutions SaaS de l'éditeur, essentiellement des TPE, mais aussi 650 collectivités locales, qui sont tous appelés à basculer sans aucune conséquence contractuelle ni financière. Les ambitions de Cegid vont cependant bien plus loin : les infrastructures qui font l'objet du partenariat sont taillées pour accueillir de l'ordre de 400 000 utilisateurs pour plusieurs dizaines de milliers d'entreprises.
Au travers de cet accord, Cegid entend bien non seulement renforcer son positionnement dans le cloud et le SaaS en France, mais aussi asseoir son développement à l'international et jouer son rôle aux côtés des acteurs majeurs du secteur que sont les Salesforce, Oracle et autres SAP.
Benoît Herr