La tendance est claire. Une enquête menée par Markess International auprès de 85 fournisseurs d'applications en ligne à la demande le montre : 58 % d'entre eux pensent que les éditeurs de logiciels devraient faire basculer à terme leur modèle économique vers ce nouveau modèle. Nombreux sont en effet les éditeurs qui proposent aujourd'hui une solution hébergée en plus des solutions installées chez les clients. Les ERP n'échappent pas à cette tentation : de nombreux éditeurs mettent à disposition leurs solutions en mode hébergé. Mais le succès de cette approche dépend d'un certain nombre de conditions.
Des avantages et des contraintes
Le premier avantage est celui du coût et de sa prédictibilité. Le calcul du coût d'une application en ligne à la demande dépend de plusieurs facteurs qu'il faut quantifier avec exactitude : modules utilisés, nombre d'utilisateurs ou de postes, volumétrie. Un contrat bien fait permet de connaître le coût à l'avance sur plusieurs années, y compris les augmentations indicielles. Un facteur d'économie important est la mutualisation des plates-formes par le fournisseur. La mutualisation totale est la plus économique : les données de plusieurs entreprises sont hébergées sur un même serveur physique. Des entreprises peuvent demander une mutualisation partielle pour des raisons de sécurité, de confidentialité ou de personnalisation des applications : mais il faudra en payer le prix. Un facteur d'économie important est l'absence d'infrastructure à l'intérieur de l'entreprise si elle décide de s'en remettre totalement à une solution hébergée. En contrepartie, le fournisseur doit s'engager à fournir une qualité de service quantifiée.
Ce sont les applications génériques qui conviennent le mieux au mode ASP. Un progiciel qui demande de nombreuses adaptations personnalisées sera plus facilement installé sur un serveur interne à l'entreprise. C'est d'ailleurs pourquoi les applications hébergées répondent mieux aux besoins des PME qu'à ceux des grands comptes dont les besoins peuvent être complexes et spécifiques.
Un facteur d'économie important est l'absence d'infrastructure à l'intérieur de l'entreprise si elle décide de s'en remettre totalement à une solution hébergée. En contrepartie, le fournisseur doit s'engager à fournir une qualité de service quantifiée.
Des ERP en ligne à la demande pour répondre aux attentes des utilisateurs
L'équipement des PME en progiciels de gestion intégrés ou ERP continue à progresser. En 2006, 53 % des PME de 100 à 2000 salariés étaient équipées, soit une augmentation 10 % par rapport à 2005. Les applications en ligne à la demande y apportent leur contribution.
Cegid (CCMX à l'époque) a commencé à fournir ses premiers modules de RH en ASP dès l'année 2000. Ce qui l'a amené à faire évoluer ses produits pour s'adapter aux contraintes d'hébergement et de mutualisation. Ensuite, l'éditeur à progressivement proposé d'autres modules en mode ASP. Mais il lui a aussi fallu s'adapter sur le plan juridique. « Le plus gros travail a été la conception du plan qualité », explique Florence Déprets, responsable de l'offre hébergée de Cegid : « en effet, la définition des niveaux de service ou SLA a pris du temps. Un point crucial est la mise à jour de l'applicatif : elle impose des procédures de contrôle de qualité extrêmement rigoureuses en interne et en externe. »
Proginov a dû également partir de zéro quand il lui a fallu concevoir le premier contrat d'applicatif hébergé : rien n'existait dans ce domaine. L'évolution de l'éditeur vers ce type de solution s'est faite à la demande de certains de ses clients qui recherchaient une solution d'hébergement. Cet éditeur de solutions d'entreprise est donc devenu hébergeur tout en faisant évoluer ses progiciels d'entreprise pour prendre en compte le nouveau modèle. Aujourd'hui, Proginov propose ses progiciels à la fois en mode client-serveur et en ASP. « La couverture fonctionnelle est strictement la même », affirme Philippe Plantive, directeur commercial de Proginov. « Un tiers de nos clients a adopté le mode ASP pur. Mais beaucoup gardent un déploiement local des solutions en plus de la connexion à distance, ce qui leur permet de continuer à travailler en cas de coupure. Nous leur offrons un traitement batch qui assure une reprise complète lors du rétablissement de la connexion. »
L'hébergement : des acteurs spécialisés pour répondre à de fortes contraintes
De nombreux acteurs du monde de l'ASP s'appuient sur des sociétés spécialisées dans l'hébergement. Ainsi Aspaway, qui fournit en ASP des solutions de plusieurs éditeurs dont Generix, s'appuie sur un data center d'IBM. Mais d'autres éditeurs, Comme Cegid et Proginov possèdent leurs propres serveurs. Proginov a poussé la logique de l'hébergement jusqu'au bout lors qu'il a dû répondre aux contraintes des PRA (Plans de Reprise d'Activité), en liaison avec les assureurs. Tenté un moment par des solutions externes, la société a finalement financé la construction de son propre bâtiment autonome destiné aux serveurs de sauvegarde et de reprise.
Les services à la demande bénéficient aujourd'hui de la disponibilité de nombreuses technologies haut-débit : VPN, xDSL... Proginov qui s'appuie depuis le début sur Equant, opérateur historique, a choisi un deuxième opérateur, Altitude Télécom. Sa diversification concerne aussi les technologies : l'éditeur s'intéresse actuellement au déploiement du Wimax.
L'ASP, une opportunité pour les PME, une solution de confort pour les grands comptes
Generix a enrichi son offre avec le mode ASP en 2006 en lançant « Generix on demand ». « Ces applications hébergées à distance nous ouvrent un nouveau marché, celui des TPE », déclare Emmanuel Amartin, responsable commercial de l'offre Generix on demand. « Même si elles ont les mêmes besoins fonctionnels que les plus grosses, Generix y répond en les gérant pour elles : nous proposons des offres industrialisées toutes prêtes dans lesquelles 95 % des fonctions sont utilisables directement. Le paramétrage est donc marginal. La formation initiale y est même intégrée. »
Par contre, les moyennes et grandes entreprises exercent de fortes contraintes sur la plate-forme ASP. Ce mode représente pour eux une brique supplémentaire qu'il faut intégrer dans l'existant installé en local. Il faut pouvoir s'adapter à leurs processus. En outre, elles ont des contraintes de services, comme les astreintes de week-end ou les sauvegardes, que les plus petites n'ont pas.
Proginov a constaté que des DSI choisissent une solution ASP pour régler un problème particulier et ainsi se donner les moyens de mieux s'occuper du reste. L'équipe informatique n'est plus confrontée en permanence à des demandes urgentes des utilisateurs. Elle peut alors se consacrer à des domaines qui avaient été jusqu'alors laissés de côté.
Le modèle économique des ASP
Alors que le système de licence permet à l'éditeur ou au distributeur de percevoir immédiatement un revenu, le mode ASP implique des revenus lissés. Une évolution douce vers ces nouvelles offres permet de conserver un équilibre entre les deux. La question de la rémunération des ingénieurs commerciaux et des distributeurs se pose aussi. Philippe Plantive a constaté des réactions variées lors de l'arrivée du mode ASP : « Ceux qui jouent le jeu profitent des revenus réguliers. Mais certains distributeurs préfèrent recevoir l'intégralité de leur dû lors de la signature du contrat initial. Dans ce cas, ils ne touchent plus rien lors de l'évolution ultérieure des contrats. »
Les témoignages figurant dans cet article proviennent des ateliers « choisir ma solution ASP » et « Solutions traditionnelles vs ASP, les bons critères de choix » qui se sont déroulés lors des États Généraux de l'ASP le 25 janvier 2007 à Paris. Ils ont été organisés par l'ASP Forum : www.aspforum-france.org.
EG ASP 2007
René Beretz