Sur le front de la numérisation de la fonction achats, Synertrade occupe depuis plusieurs années le devant de la scène. À l'occasion de son désormais traditionnel Digital Procurement Summit (DPS), dont l'édition 2019 s'est tenue le jeudi 19 septembre à Paris, l'éditeur racheté il y a quatre ans par Econocom (11 000 collaborateurs, 3 milliards d'euros de chiffre d'affaires) n'a pas manqué de rappeler ses ambitions pour rester dans le peloton de tête, aux côtés de SAP Ariba, Jaggaer (BravoSolution inclus), Coupa, Proactis (Perfect Commerce inclus), Corcentric (Determine inclus) ou encore d'Ivalua, son principal concurrent français. Surtout l'année de ses 20 ans !
Bien qu'apparu sur le marché en 2005, Synertrade est en effet issu de la fusion entre les éditeurs français Synerdeal et allemand Trade2B, tous deux fondés quasiment au même moment : début 2000 pour le premier, et fin 1999 pour le second. A l'époque, les deux acteurs partagent une spécialisation sur le marché du "e-sourcing", sur les phases amont du processus achats allant de l'expression du besoin à la contractualisation, en passant par les procédures de sélection des fournisseurs et de consultation-négociation, et un savoir-faire en termes à la fois de conseil et de technologies. Répondant avant tout à des considérations stratégiques, cette fusion offrait au nouvel ensemble une taille critique indispensable pour s'adresser à des grands comptes et à leur fonction achats devenue stratégique, une large présence internationale et une palette complète de solutions et de services.
Quelques mois plus tard, début 2006, Synertrade présentait sa première offre, une suite logicielle de gestion des achats comptant dix modules regroupés en quatre grandes thématiques. L'offre historique de sourcing, avec la gestion des appels d'offres et des enchères inversées, y conservait une place essentielle, complétée par des solutions d'analyse des dépenses, de pilotage de la relation fournisseurs (référentiel, négociation, contrat, performance, etc.) et de gestion des commandes. Le tout, chapeauté par le "buyer cockpit", un portail Web offrant une vision globale de l'ensemble des applications de la fonction achats.
Au fil des années, la suite rebaptisée Accelerate s'est progressivement enrichie jusqu'à couvrir l'intégralité du processus achats, selon un découpage que l'éditeur présente aujourd'hui en trois grands pans : Source-to-Contract (S2C), du sourcing stratégique à la gestion du cycle de vie des contrats ; Procure-to-pay (P2P), de la gestion des catalogues à la dématérialisation des factures ; Supplier relationship management (SRM), de la qualification des fournisseurs à la collaboration stratégique. S'adressant aux acteurs de la fonction achats mais aussi à leurs partenaires des autres directions (finance, qualité, juridique, etc.) et aux fournisseurs, dans les grands groupes et les organisations intermédiaires, Synertrade revendique aujourd'hui quelque 700 clients dans le monde, dont Alstom ou Schneider Electric, venus témoigner lors du DPS.
Fort d'un effectif de plus de 300 collaborateurs et d'une croissance à deux chiffres en 2018, qui devrait se confirmer cette année avec une progression particulièrement notable en Amérique du Nord et une bonne dynamique sur ses marchés historiques (France, Allemagne, Suisse, Autriche, Europe du Nord), Synertrade entend poursuivre ses efforts pour continuer de tirer son épingle du jeu. Pour cela, il table évidemment sur les capacités de sa solution. "Les offres de certains de nos concurrents sont le résultat de 15 années d'acquisitions", a rappelé Eberhard Aust, PDG et fondateur de la société, en ouverture de la journée de rencontres parisienne. "Depuis la création de Synertrade, notre solution, qui offre une couverture complète des processus achats et connexes, a été totalement développée en interne, sur base d'un code unique".

Pour se démarquer, l'éditeur fait également valoir plusieurs autres atouts. La puissance du groupe Econocom, d'abord, présent dans 28 pays à travers le monde et positionné sur des domaines stratégiques de l'édition et des services informatiques : la sécurité, le développement d'applications Web et mobile, les solutions numériques en mode cloud, le conseil en transformation numérique. Ensuite, un écosystème étendu d'une trentaine de partenaires en conseil et intégration, ainsi que des connexions natives avec les bases de données des grands opérateurs d'"intelligence économique" (RiskMethods, Rapid Ratings, LexisNexis, Bureau van Dijk, Dun & Bradstreet, Ecovadis, etc.) pour nettoyer-enrichir les référentiels et piloter la relation fournisseurs. "Notre solution SynerConnect rend aussi l'intégration plus facile en simplifiant l'interfaçage avec les autres composants du système d'information (ERP, CRM, etc.) et leurs données", a complété Eberhard Aust.
Enfin, Synertrade insiste sur sa démarche d'innovation continue, lui permettant d'intégrer au plus tôt les technologies les plus en pointe. Dernières en date : l'intelligence artificielle (IA) et l'automatisation robotisée des processus (Robotic Process Automation, RPA), pour optimiser l'expérience utilisateur (interfaces de navigation, signature électronique, catalogues, etc.) et la capture de la connaissance. "Nous innovons en permanence, avec nos clients, en réinvestissant chaque année environ 20 % de notre chiffre d'affaires dans la R&D", a détaillé le PDG. Une approche qui a d'ailleurs souvent permis à l'éditeur de jouer les pionniers, avec par exemple la première enchère inversée en France dans le secteur public (2000), le premier système PLM intégré (2006) ou la première app mobile dans le domaine des achats (2011). Ou encore sur le terrain des "systèmes intelligents" : premier moteur d'harmonisation des données en mode prédictif, dès 2007, et première recherche à partir d'images dans les catalogues, en 2015.
Depuis, l'évolution vers l'"acheteur augmenté" s'est encore accélérée. "La tendance est aux applications intelligentes, proposant des notifications en temps réel avec des suggestions proactives", a souligné Duncan Jones, vice-président et analyste chez Forrester, lors de son intervention, insistant au passage sur l'importance des données : "Qu'il s'agisse des données opérationnelles achats, sur les marchés, sur les fournisseurs, etc. leur collecte, consolidation, mise en qualité et exploitation sont devenues déterminantes". En matière de systèmes avancés, Synertrade a d'abord été l'un des précurseurs sur son marché dans l'intégration d'un "assistant conversationnel" (chatbot). "Avec notre assistant Marvin, il s'agit d'apporter la réponse la plus juste possible aux questions que peuvent se poser les acheteurs lors de leurs tâches quotidiennes, et d'offrir une assistance dans l'utilisation de la suite Accelerate", a expliqué Sébastien Dumas, vice-président marketing, lors du DPS.
Toujours en matière d'IA, Synertrade s'est aussi associé avec EasyKost, prestataire spécialisé dans l'estimation de coûts, pour proposer une offre de "costing prédictif" dans le cadre du processus de sourcing. Exploitant les bases historiques des donneurs d'ordres, à partir de technologies de machine learning, la solution permet d'anticiper les prix des fournisseurs pour optimiser la stratégie d'appels d'offres, d'améliorer la définition technique (Design to cost) en jouant sur divers critères, puis d'analyser les offres des candidats pour négocier aux meilleures conditions. Au-delà, elle donne aussi la possibilité aux équipes achats d'identifier des pistes d'économies sur les produits existants.
Enfin, c'est à la RPA, consistant à confier à des robots logiciels certaines opérations répétitives et à faible valeur ajoutée, simples (saisie, copier-coller, extraction de données, etc.) ou plus complexes, que s'intéresse Synertrade depuis quelques mois. En s'appuyant sur les technologies de l'éditeur spécialisé UiPath, avec lequel un partenariat a été conclu, l'objectif est de soulager les équipes pour leur permettre de se concentrer sur des missions plus critiques ou stratégiques. À travers Accelerate, la mise en œuvre de l'automatisation robotisée s'effectue en trois étapes : conception et définition des processus (UiPath Studio), contrôle et analyse des performances (UiPath Orchestrator), déploiement (UiPath Robots). D'autres pistes de fonctionnalités avancées, liées aux nouvelles technologies dites "disruptives" seraient à l'étude, à la fois pour faciliter le travail des acheteurs et améliorer la performance de la fonction. Sans attendre l'édition 2020 du Digital Procurement Summit, les prochains mois pourraient être riches en annonces.
Etienne Tartivel