"Salesforce.com est la société de cloud computing pour le monde de l'entreprise" : c'est ainsi que se présente aujourd'hui ce géant du CRM dans ses communiqués de Presse.
Tentons de lever le brouillard sur cette présentation : ces nombreuses allusions météorologiques ne font que renforcer la brume dans laquelle on se plonge d'emblée en évoquant le cloud computing. La nébulosité est encore renforcée par la symbolique qui l'a fait naître, à savoir la représentation de l'Internet lui-même, sous la forme d'un nuage (d'où le nom). Réseau de dimension mondiale, l'Internet n'a effectivement ni centre, ni noyau, ni chef d'orchestre. Tout internaute peut tour à tour, alternativement ou simultanément, être demandeur ou serveur, récepteur ou envoyeur, et ce nuage correspond bien à sa représentation métaphorique.
L'horizon s'éclaircit toutefois un peu lorsqu'on explique que le cloud computing est la prochaine génération de SaaS (Software as a Service), lui-même forme évolutive de l'ASP (Application Services Provider).
Au début était l'ASP
Ou presque, parce qu'on pourrait aussi remonter jusqu'au service bureau, dont descend l'ASP lui-même... Un ASP est une entreprise fournissant à ses clients l'accès à des logiciels hébergés chez elle au travers d'un réseau, généralement l'Internet. Les contrats de fourniture de services peuvent être très variés, mais en général dans ce modèle l'application appartient à l'entreprise, qui en a confié l'exploitation et la maintenance à l'ASP.
Avec le modèle SaaS, la notion de propriété disparaît au profit de la seule redevance d'utilisation. Le client ne paie plus qu'en fonction de l'usage qu'il fait de l'application qui ne lui appartient plus. Le matériel sous-jacent reste cependant clairement identifié, ce qui a tendance à rassurer les clients, notamment lorsqu'il s'agit de savoir à quel endroit se trouvent les données de l'entreprise.
Le cloud computing va plus loin encore et banalise toutes les ressources : s'appuyant sur l'Internet, il rend même le matériel sous-jacent transparent pour l'utilisateur. En général basé sur la mise en place de très grosses fermes de serveurs, les ressources de ce type d'informatique se doivent d'être aussi évolutives que conséquentes. Et bien entendu, l'Internet est le levier de l'ensemble.
Salesforce
Marc Benioff Président, CEO et fondateur de salesforce.com
Crée en 1999 par Marc Benioff, un ancien d'Oracle, Salesforce a bâti son ascension sur les outils de CRM "à la demande" à une époque où la plupart des acteurs se demandaient encore ce que recouvrait exactement le terme ASP. Automatisation des forces de vente, gestion des relations partenaires, automatisation du marketing etc. Salesforce couvre tous les domaines fonctionnels imaginables dans la sphère de la relation client.
Mais fidèle à sa politique du "métro d'avance" la voilà qui se pose en pionnier du cloud computing, allant ? comme nous l'avons vu ? jusqu'à s'identifier à cette technologie lorsqu'elle se présente.
Pour étayer cette stratégie, l'entreprise multiplie les initiatives. Elle a créé Force.com, présentée comme la première plate-forme de développement à la demande du marché (ou PaaS). Début novembre, elle a lancé Force.com Sites, une série d'outils permettant de publier de façon très simple des données et applications Force.com sur n'importe quel site Web, le tout dans l'environnement de cloud computing de salesforce.com. "Avec Force.com Sites, nos clients peuvent exécuter leurs sites Web dans notre environnement de cloud computing", se félicite Marc Benioff, Président, CEO et fondateur de salesforce.com. "Force.com Sites va donner un essor considérable à Force.com au c'ur d'applications innovantes de cloud computing d'entreprise. Notre communauté va donner naissance à des applications et solutions d'un nouveau type démontrant la pertinence de notre vision stratégique de la 'fin du logiciel'."
Le mot est lâché : le cloud computing signerait la fin de l'ère du logiciel tel que nous le connaissions jusqu'ici. Il est vrai que, fidèle à son habitude, Salesforce n'a pas attendu que les entreprises veuillent bien adopter et adapter son extension Force.com Sites : dans la foulée de l'annonce, l'entreprise a d'ores et déjà lancé "Force.com for Amazon Web Services", une solution de développement intégrant les outils mis à disposition par Amazon : les développeurs peuvent grâce à cela concevoir des applications de gestion fonctionnant entièrement en mode "cloud", capitalisant à la fois sur les fonctionnalités de Force.com (bases de données, logiques, interfaces, etc.) et sur les capacités de stockage et de traitement d'Amazon S3 et Amazon EC2.
C'est dans la même logique que "Force.com for Facebook" a vu le jour. Salesforce a estimé nécessaire de fédérer la communauté des développeurs s'adressant aux 120 millions d'utilisateurs de Facebook (c'est-à-dire la plus importante communauté en ligne du monde) et les 100 000 développeurs salesforce.com. Cette nouvelle suite d'outils permet d'utiliser les API de Facebook au sein des applications Force.com. Ainsi, le développeur peut importer des données sociales en provenance de Facebook dans Force.com et les exploiter dans ses applications. Encore une innovation basée, cela va sans dire, sur le cloud computing.
À ce rythme là, nous n'allons pas tarder à nous retrouver dans les cirrocumulus, voire les cirrus.
Benoît Herr