Les études se suivent et se ressemblent, comme celle que vient de publier Panorama Group et dont nous nous sommes fait récemment l'écho (2010 ERP Report du Panorama Consulting Group, 1e partie et 2e partie). De nombreux projets d'ERP ne respectent ni leurs délais, ni leurs budget, ni même leur périmètre fonctionnel. Mais pourquoi un tel taux d'échec ? Que faut-il faire pour améliorer la situation ? Quelles actions opérationnelles faut-il mettre en place au cours du projet ?
Pour savoir quelles méthodes et quels outils peuvent répondre à ces questions, nous avons rencontré Philippe Vergne, président fondateur de Positive Value, conseil auprès des DSI en gestion de programme, et Alexandre Boudonne, Responsable Marketing Produit chez One2Team, éditeur de logiciels de conduite de projets.
Des éléments identifiables sur lesquels il est possible d'agir
La maturité varie beaucoup d'une entreprise à l'autre. « Dans de nombreux cas, il existe des soucis de gouvernance, de méthodes, d'outillage, de maturité des chefs de projets, » constate Philippe Vergne. Le problème prend réellement de l'ampleur dans les grandes DSI disposant de centaines de personnes. Elles doivent s'organiser de manière rigoureuse pour mieux conduire leurs projets. Faut-il continuer à développer en interne ou s'appuyer sur des progiciels ? Faut-il garder une maîtrise interne ou tout externaliser ? Que devient dans ce cas le rôle de la DSI ?
Dans le cas d'un projet d'ERP, la phase initiale est essentielle. « 50% des décisions importantes se passent en amont du projet et 40% pendant l'exécution. L'espérance de qualité du projet est fixée dès le début, », insiste Philippe Vergne. Il est essentiel de viser la qualité la plus haute dès le départ car dans la suite du projet, la qualité ne peut que se dégrader et il est impossible de remonter la pente. Il faut donc évaluer les coûts et les délais de manière très fine au tout début du projet.
Un projet ERP comprend de multiples facettes : système d'information, conduite du changement, migration, infrastructure. Il existe des outils du marché qui apportent une aide à ces divers aspects. Certains outils proviennent des éditeurs eux-mêmes. Ce qu'a fait SAP par exemple en remontant la formalisation des processus dans des outils. Dans la même logique, l'éditeur a créé un label de chef de projet pour mettre en ?uvre les bonnes pratiques. Des outils comme MS Project de Microsoft ou ceux de One2Team contribuent à mettre en place les principes dans la phase amont du projet, puis à les faire appliquer dans les phases suivantes. En supprimant les risques en amont, ils augmentent donc le taux de réussite du projet.
L'originalité des outils de One2Team est de mettre en avant un pilotage par des livrables identifiés, et non pas par des activités comme dans d'autres outils. L'outil pousse à la collaboration entre les équipes et contribue à casser les silos. Ces livrables obligent à fournir des indicateurs sur les activités réelles, à compter, à mesurer. À partir de l'expérience passée et mesurée, il est possible de déterminer combien de temps nécessite une activité produisant un livrable donné.
La gestion des réunions, un point clef de la gestion des projets
Un autre aspect important de One2Team est la gestion des réunions. One2Team structure la réunion en fonction des activités : elle est alimentée par des informations venant du terrain, telles qu'elles ont été enregistrées dans le système, par exemples les risques. Elle fournit des indicateurs dépendant de la réalité du terrain. A contrario, « si l'ordre du jour est établi par les participants à partir de zéro, sans informations structurées et tracées, on s'éloigne du problème par peur de le traiter, » indique Philippe Vergne. Le but de la réunion est de décider et de valider des actions. Les techniques d'animation de réunion permettent de réduire le nombre de problèmes, d'améliorer la capacité de décision.
« Dans une société, nous sommes intervenus pour améliorer l'organisation d'une réunion hebdomadaire de 10 personnes, » relate Alexandre Boudonne. « Grâce à l'utilisation de l'outil One2Team, nous leur avons fait gagner en 4 semaines 20 minutes sur une réunion de 2 heures. Ils ont utilisé ces 20 minutes pour suivre un sujet négligé jusque là. » Le consultant de One2Team est intervenu en 3 étapes principales. La première a consisté à mettre le pied à l'étrier de toute l'équipe pour l'utilisation de l'outil. Dans une deuxième étape, il a accompagné ceux qui demandaient une aide complémentaire. Dans un troisième temps, il s'est concentré sur ceux qui avaient encore des difficultés avec la méthode et l'outil.
L'outil oblige à appliquer les règles décidées à l'avance. Tout le monde doit donc respecter les règles et fournir les informations d'avancement avant la réunion. Si l'un des participants ne joue pas le jeu, ses indicateurs seront vides, contrairement à ceux des autres participants, ce qui lui posera des problèmes pendant la réunion. Dans un groupe, certains jouent immédiatement le jeu et d'autres non. Ceux dont les indicateurs ne sont pas visibles lors d'une réunion changent d'attitude et fournissent les informations lors de la réunion suivante. Un tel système permet de disposer du compte rendu dès la fin de la réunion, mais il est toujours possible d'y ajouter des commentaires textuels.
Des courbes synthétiques donnant une vue historique et instantanée d'un projet
L'identification des livrables au début du projet est une étape cruciale. Ceux-ci permettent de fournir des chiffres, des données mesurables, ce que ne permet pas une méthode ou un outil fondé sur les activités. L'outil constitue une trace des livrables, de leur identification jusqu'à leur livraison et fournit un certain nombre de courbes pour suivre un projet. La courbe des indicateurs d'évolution cumulée des livrables donne des informations très précises. Le nombre de livrables figure en ordonnées et le temps en abscisses.
Pour bien visualiser la courbe ci-contre, cliquez dessus pour l'afficher dans un autre onglet ou une autre fenêtre
Sur la courbe ci-contre, on constate que le nombre des livrables augmente au fil du temps, ce qui signifie que le périmètre fonctionnel du projet a augmenté depuis son démarrage, soit que des éléments ont été oubliés au départ, soit encore que de nouvelles fonctions ont délibérément été ajoutées. Mais cela aura nécessairement un impact sur la planification du projet. En principe, tous les livrables doivent être identifiés et comptés dans l'avant-projet : la difficulté consiste à ne pas en oublier.
De bas en haut, on trouve les livrables planifiés mais dont le développement n'a pas encore commencé, les développements en cours, les développements en attente de validation, les livrables pour lesquels il existe des réserves de validation (des corrections à apporter par exemple), les livrables validés. L'épaisseur des zones et leur évolution donne des informations pertinentes sur le déroulement du projet. L'épaisseur décroissante dans le temps de la zone « Planifié » confirme l'avancement du projet, mais l'épaisseur importante de la zone « Attente de validation » et l'épaisseur croissante de la zone «Réserves de validation » signalent un problème de retard potentiel. De même, l'épaisseur faiblement croissante de la zone « Validé » montre que le projet avance lentement. Mais au-delà de cette vision globale du projet, chaque membre du projet ou de la société peut voir une courbe d'avancement correspondant à son domaine.
Un outil comme celui de One2Team n'est pas une nouveauté en soi. Mais son gros avantage est qu'il remplace les petits outils ou autres feuilles Excel que chaque participant avait tendance à utiliser dans son coin. Il contribue donc à une gouvernance centrale du projet, donnant une vision actualisée de son avancement et de ses problèmes et permettant des actions correctrices immédiates.
René Beretz